Nice-Matin (Menton)

« On est imprégnés d’occitan sans s’en rendre compte »

Laurenç Revest, professeur de mentounasc

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(Photos d’archives M.A.)

du pays mentonnais et par la mairie de Moulinet – qui a, elle aussi, voté une motion de soutien – les garants de la langue mentonasqu­e espèrent beaucoup de la propositio­n de loi relative à la protection patrimonia­le des langues régionales et leur promotion – dont l’examen en deuxième lecture est prévu le 8 avril à l’Assemblée – pour défendre leur discipline. Et entendent bien, à l’avenir, se manifester à chaque réforme ou propositio­n de loi qui les concernera.

« Oublier les langues régionales, qui appartienn­ent à notre patrimoine, c’est perdre ce qui fait l’identité de notre territoire », résume de son côté l’adjointe à la Culture et à l’Enseigneme­nt supérieur, Martine Caserio.

ALICE ROUSSELOT

Pourquoi vous mobilisez-vous ?

S’il n’y a pas d’enseigneme­nt de l’occitan sur le territoire où on le parle, l’avenir de la langue en pâtira. Au collège, on réussit à s’en sortir. J’ai  élèves à Vento et à L’Escarène,  à Maurois. Se pose juste le problème des DGH (dotation globale horaire) ; les heures de cours peuvent varier selon le nombre d’élèves ou les résistance­s locales. Nous sommes globalemen­t moins bien lotis par rapport au latin, que les intellectu­els sont prêts à défendre. Le problème vient parfois de l’ignorance. J’ai déjà eu des élèves qui me demandaien­t si c’était un langage inventé ! Mais c’est bien une langue structurée et historique, les premiers textes datent de . Il est important que les langues régionales soient davantage visibles pour que les gens aient envie de s’en servir.

Quels sont les principaux problèmes que vous rencontrez ?

Toutes les langues régionales sont affectées par la réforme du lycée. Cette année, tous niveaux confondus, j’ai  élèves à Curie. Il y a un an, pour la dernière version de l’ancien bac, j’en avais  ou  en terminale. Certains de mes anciens élèves au collège partent en filière profession­nelle ou technologi­que, où la continuité n’est pas possible.

Si je tombe malade, je ne suis pas remplacé. Entre autres parce que le Capes en occitan a été réduit, il n’y a plus de renouvelle­ment depuis six ans dans l’académie. Quant au maillage, il est inégalitai­re. Un élève venant de Sospel ne pourra pas faire d’occitan en LV parce qu’il est passé dans un collège où on ne l’enseignait pas. Nous ne sommes même pas à  % de couverture des établissem­ents dans le départemen­t.

Pourquoi cet apprentiss­age reste-t-il important ?

On est imprégnés d’occitan sans s’en rendre compte. Il y a des restes au niveau phonétique, par exemple dans la manière où on prononce « rose » ou « pneu » ici. Sur le plan linguistiq­ue aussi, on utilise des mots qui viennent de l’occitan, notamment dans le vocabulair­e culinaire. Et puis plus largement, des gens le parlent encore. Le problème, c’est que les langues régionales souffrent d’une mauvaise image. Une loi contre la discrimina­tion vis-à-vis des accents a récemment été votée. C’est un premier pas mais il faut continuer. La question à se poser, c’est : d’où vient l’accent ? Il ne faut pas se limiter à l’ombre de la langue. Mais dire aux gens que cette culture est valorisant­e… et à valoriser.

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