Viols, incestes : les mineurs seront mieux protégés
Au-delà de ce qu'elle peut avoir d’abject, l'affaire Olivier Duhamel marque un tournant. Naguère, le crime d'inceste était mis sous le boisseau. Quel que soit le milieu social, les victimes se taisaient par peur du scandale.
Secrets de familles. Circulez, y'a rien à voir !
Désormais, rien ne sera plus jamais pareil. La parole de Camille Kouchner, qui a dénoncé les faits subis par son frère à la fin des années quatre-vingt, devrait libérer celles de milliers d'ombres muettes. Tout comme l'affaire Weinstein a engendré le mouvement #MeToo.
Un jour prochain, on se demandera comment tout cela a pu être toléré. L'indifférence à cette tragédie intime, vécue par tant de nos concitoyens (), apparaîtra scandaleusement coupable. Préparons-nous à affronter les regards accusateurs de nos enfants. Il nous faudra leur expliquer, sans que cela n'apparaisse comme une excuse, que la sensibilité des hommes évolue en fonction des périodes. Nous sommes heurtés par beaucoup de choses qui n'effarouchaient guère nos grandsparents : la peine de mort, le sexisme, le gaspillage des énergies fossiles. Gageons que nos descendants, à leur tour, jugeront sévèrement certaines de nos pratiques. Ils s'étonneront qu'on ait pu accepter, sans mot dire, la surpopulation carcérale, les maisons de retraite déshumanisées, les SDF qui dorment à même le bitume.
À l’instar des héros de La Nuit des temps de Barjavel, nos petits-enfants nous regarderont peut-être avec dégoût au seul fait que nous ayons mangé de la viande.
Oui, les temps changent. Il faut en prendre la mesure. Et garder en tête qu'au-delà des inclinations de son époque, il est toujours utile de déconfiner sa mémoire.
1. D'après un sondage Ipsos réalisé fin 2020 pour l'association Face à l'inceste, un Français sur dix affirme avoir été victime d'inceste, soit 6,7 millions de personnes.
Le Parlement a adopté hier une loi contre les violences sexuelles sur les mineurs, en fixant notamment le seuil de consentement à 15 ans, et 18 ans en cas d’inceste.
« On ne touche pas aux enfants », et avec cette loi « aucun adulte agresseur ne pourra se prévaloir du consentement d’un mineur » en dessous de 15 ans, a souligné le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti. Ce texte constitue « une étape historique », a-t-il ajouté. La proposition de loi émanant à l’origine du Sénat a été adoptée à l’unanimité (94 votes pour, aucun contre) par l’Assemblée nationale lors d’une ultime lecture, en termes identiques à ceux de la chambre haute.
« Un enfant violé toutes les heures »
« En dessous de 15 ans, c’est non. L’inceste, c’est non » ,a résumé la rapporteure du texte au Palais Bourbon, la députée Alexandra Louis (LREM). Dans un climat marqué par des affaires retentissantes et un recul du tabou qui entoure souvent ces actes, parlementaires et gouvernement s’étaient engagés à durcir au plus vite la législation. Des affaires comme celle du politologue Olivier Duhamel, mis en cause pour des agressions sexuelles sur
« Nous sommes heurtés par beaucoup de choses qui n’effarouchaient guère nos grands-parents. »
un beau-fils adolescent (il a reconnu les faits mardi) ont remis ce sujet délicat sur le devant de la scène. Scandales pédophiles à l’école, dans l’Église ou en milieu sportif, incestes, prostitution de mineurs ou pédopornographie sur internet témoignent de l’ampleur du problème.
La socialiste Isabelle Santiago a égrené des chiffres accablants : « 10 % des Français auraient subi l’inceste, un enfant est violé toutes les heures en France, un Français sur cinq aurait subi un acte de pédocriminalité ». Pour l’inceste, c’est tolérance zéro s’il est commis sur un mineur de moins de