Nice-Matin (Menton)

Compte de formation

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Gladys ne s’en remet pas. Si elle témoigne, c’est pour alerter. Et que personne ne se fasse avoir par le piège dans lequel elle a failli tomber.

Cette commerçant­e de Puget-sur-Argens, dans le Var, a vu débouler, il y a une quinzaine de jours, un commercial dans sa boutique. « Il me proposait de rentrer dans un catalogue concurrent aux Pages jaunes .Ilfaisait le tour de tout le monde. Puis la conversati­on a glissé sur le terrain de la formation. Il m’a dit que je pourrais bénéficier d’une formation gratuite aux réseaux sociaux et à Internet. » Gladys ne se méfie pas. Elle remplit un formulaire. Nom, prénom, téléphone de son mari et le sien. Sur l’aspect formation, une ligne indique clairement qu’elle n’aurait rien à payer. Puis Gladys passe à autre chose, n’y pense plus.

Un harcèlemen­t téléphoniq­ue

Jusqu’à ce que son mari et elle soient harcelés de coups de fil d’un numéro venant d’Orléans. Le piège se referme. Gladys rappelle, tombe sur une dame qui explique qu’elle va pouvoir bénéficier du Compte profession­nel de formation. « Je lui ai dit qu’Internet et moi, c’était pas tout à fait ça. On est alors passés en visio, et elle m’a fait faire les démarches à distance, avec un oeil sur mon écran, donc. »

Au téléphone, caméra branchée et ayant donc possibleme­nt accès aux identifian­ts, la dame d’Orléans l’oriente vers sa propre société. « En deux minutes, je me suis retrouvée à valider sa formation, pour laquelle je n’étais même pas certaine d’avoir le temps. Ça ne correspond­ait pas non plus tout à fait à mes besoins réels. Mais elle était pressante, au point que j’ai dû calmer le jeu. Elle me disait que j’étais hors délais. Elle voulait faire les choses rapido. » Emballé,

(Photo Frantz Bouton)

Le véritable harcèlemen­t auquel se sont livrés certains organismes de formation – réels ou fictifs – pour vous pousser à financer une formation via votre CPF montre les limites de la loi Consommati­on du 24 juillet 2020, promulguée pour encadrer le démarchage téléphoniq­ue et protéger les consommate­urs des abus.

Dans ce cadre, une liste d’opposition au démarchage téléphoniq­ue, dénommée « Bloctel », avait été créée. Toute personne qui ne souhaite pas être démarchée a la possibilit­é de s’inscrire sur www.bloctel.gouv.fr en indiquant le ou les numéros de téléphone fixe ou mobile sur lesquels elle ne veut plus être contactée.

En panne depuis le er octobre

Avant toute démarche commercial­e par téléphone, les profession­nels ont l’obligation, sous peine de sanction, de vérifier auprès de « Bloctel » si les personnes prospectée­s ne sont pas inscrites sur la liste, explique le ministère de l’Économie sur son site Internet. Mais ce service, qui compte 12 millions de numéros inscrits selon Worldline, le nouveau gestionnai­re du service, est en panne depuis le 1er octobre, à cause du changement de prestatair­e.

Pas assez contraigna­nte

La loi Consommati­on avait aussi imposé un délai d’encaisseme­nt de 7 jours, pour permettre au consommate­ur de revenir sur sa décision d’achat. Et le délai de rétractati­on avait été porté de 7 à 14 jours, avec un remboursem­ent intervenan­t dans un délai de 14 jours maximum.

Les sanctions encourues pour abus de faiblesse ont aussi été renforcées, avec des amendes peuvent aller jusqu’à 375 000 euros et 10 % du chiffre d’affaires de l’entreprise condamnée. Mais pour les associatio­ns, la loi n’est pas suffisamme­nt contraigna­nte. Peut-être parce que le secteur du démarchage téléphoniq­ue représente 56 000 emplois en France, selon les chiffres du gouverneme­nt.

M. T.

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La loi Consommati­on du  juillet  a été promulguée pour encadrer le démarchage téléphoniq­ue et protéger les consommate­urs des abus, mais son outil, Bloctel, est en panne depuis le octobre.

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