Rapport Sauvé : faut-il en finir avec le célibat des prêtres ?
Le rapport Sauvé traitant de la pédocriminalité dans l’Église catholique française a réveillé le débat sur cet engagement pris par les hommes de foi depuis le Moyen Âge.
S’il n’est pas responsable des violences sexuelles, le célibat des prêtres a contribué au fil des siècles à leur donner l’image d’« hommes à part », favorisant ainsi les abus de pouvoir, expliquent plusieurs chercheurs.
Une semaine après le séisme provoqué par la publication du rapport, qui a jeté une lumière crue sur la pédocriminalité dans l’Église catholique de France depuis 70 ans, les questions se multiplient sur le rôle de l’institution et de ses représentants. L’une porte sur le célibat. La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase), présidée par Jean-Marc Sauvé, l’a assuré d’emblée : «Iln’y a clairement pas de lien de causalité entre le célibat et les abus sexuels ». Elle a notamment démontré qu’un tiers des violences sexuelles commises depuis 1950 l’ont été par des laïcs, donc non soumis au célibat sacerdotal.
« Les pédophiles représentent - % des agresseurs » dans l’Église
En revanche, selon la commission, « l’exigence de célibat contribue à (...) faire des prêtres des hommes à part, voire des surhommes », peut-on lire dans l’une des annexes du rapport. Avec à la clé le « risque d’une survalorisation de la personne du prêtre ». « Les pédophiles vrais, essentiellement attirés par des enfants prépubères, représentent 10-15 % des agresseurs » dans l’Église, relève Marie-Jo Thiel, médecin et professeure d’éthique et de théologie. Dans les autres profils d’agresseurs, de nombreux facteurs entrent en jeu, dont la question, centrale, de la domination, ajoute Marie-Jo Thiel, dont les publications ont aiguillé les travaux de la Ciase. Or, «ilyaun lien historique entre célibat (ecclésiastique, Ndlr) et pouvoir », souligne-t-elle. L’Église catholique commence à imposer le célibat à ses prêtres au Moyen Âge avec la réforme grégorienne afin notamment de « rehausser le statut des prêtres », affirme Josselin Tricou, auteur du livre Des soutanes et des hommes, une enquête sur la masculinité des prêtres catholiques.
L’objectif de l’institution est alors de placer les prêtres « en dehors de la domination masculine » de l’époque, en leur interdisant également le port d’arme, poursuit le chercheur, qui a participé aux travaux de la Ciase.
Dans le regard des fidèles, ils deviennent ainsi « des personnes ressources, en dehors de la domination masculine. Mais dans la réalité, ce sont bien des hommes et ils sont, à ce titre, positionnés comme les autres comme dominants dans les rapports sociaux », dit-il.
Au cours des siècles, leur rôle se renforce. Le prêtre devient avec « son sacrifice » une figure d’autorité