Nice-Matin (Menton)

Lutte contre la maltraitan­ce animale : prônant le bon sens et la responsabi­lité, le Sénat refuse le « interdire et laisser mourir »

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Tribune libre

Le Sénat a remanié et voté à la quasiunani­mité une propositio­n de loi qui contenait des avancées certaines mais menait aussi, au départ, à des aberration­s pour les animaux. Pour lutter efficaceme­nt contre la maltraitan­ce animale, il faut du bon sens et de la responsabi­lité.

Du bon sens pour renforcer les mesures votées par les députés afin de leur donner une pleine efficacité.

Lutter contre les achats d’impulsion : le « certificat d’engagement et de connaissan­ce » pour les acquéreurs d’animaux n’apportait pas assez de garanties contre ce phénomène, l’une des principale­s causes d’abandon. Jugeant que lorsqu’on s’engage pour une vie, on peut bien attendre une semaine, le Sénat a instauré un délai de réflexion de  jours avant d’acheter un animal de compagnie.

Lutter contre les trafics : les sénateurs ont encadré strictemen­t les ventes d’animaux de compagnie en ligne. Ils ont augmenté les peines pour les vols d’animaux alimentant les trafics et ont prévu la fermeture de toute animalerie introduisa­nt illégaleme­nt sur le territoire des chiens et chats d’Europe de l’Est.

De la responsabi­lité pour que les bonnes intentions de la loi ne provoquent pas de catastroph­e pour les animaux actuelleme­nt en captivité. Car, passé l’effet d’annonce médiatique de l’interdicti­on, quel sort leur réservera-t-on ? Interdire dans un délai court la détention d’animaux de cirques, de dauphins et d’orques les condamnera­it à mort, faute de places d’accueil disponible­s.

Au Mexique, un an après l’interdicti­on des animaux sauvages dans les cirques itinérants, ¾ de ces animaux, arrachés à leur environnem­ent habituel, étaient morts.

Les cétacés seraient au mieux vendus à Dubaï pour finir leurs jours dans une piscine privée, sans garantie pour leur bien-être. Au pire, ils risquent l’euthanasie, à l’instar de la femelle Femke dont il a fallu abréger les jours quand le delphinari­um du parc Astérix a fermé. Interdire dans la loi la reproducti­on des dauphins est une chose mais, d’après les scientifiq­ues, la contracept­ion leur cause des tumeurs mortelles.

Pour les sénateurs, sacrifier  dauphins,  orques et  animaux de cirques au dogmatisme animaliste n’est pas une option entendable. Aussi, le Sénat a posé une ligne rouge : pas d’interdicti­on sans solution pour leur avenir.

Mais des solutions de compromis peuvent être trouvées avec les vétérinair­es et les profession­nels. Ainsi, le Sénat propose de maintenir la détention de cétacés dans des centres de recherche ouverts au public. On ne protège bien que ce que l’on connaît bien et la recherche est cruciale pour la conservati­on des  espèces de dauphins actuelleme­nt menacées dans le monde.

Il propose que le ministère de l’Écologie établisse la liste des animaux sauvages pour lesquels l’itinérance pose le plus problème en termes de bienêtre. Leur détention pourrait être interdite, à la condition qu’ils aient une solution de placement plus satisfaisa­nte qu’aujourd’hui.

Du bon sens et de la responsabi­lité : c’est grâce à cette ligne, exigeante et bien sûr plus nuancée que des interdicti­ons de principe médiatique­s mais peu réalistes, qu’aucun groupe politique n’a voté contre le texte du Sénat.

Animés de cet esprit constructi­f, les sénateurs appellent les députés à rendre possible l’adoption de la loi, par voie de compromis, en commission mixte paritaire ce jeudi, pour faire avancer réellement la cause animale.

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