Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

 RI : Récit d’une prise de tranchée

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Les avis de décès de soldats et les nouvelles de Niçois blessés sur le front fleurissen­t dans la presse locale. On fait état des avancées et des reculs, endroit par endroit. La bataille de Flirey fait rage.   azuréens y tomberont, en avril et mai. Nulle part, on ne parle de Flirey. Le nom des lieux où les soldats sont blessés est toujours tenu secret. En revanche, on annonce parfois, dans l’Éclaireur : «Aubois de Mortmare, nous avons enlevé une nouvelle ligne de tranchées et repoussé une contre-attaque... » Fin avril , dans une édition du Petit Niçois, un jeune soldat raconte son premier combat : « lundi  avril, nous sommes partis de notre cantonneme­nt à sept heures du soir, pour aller remplacer l’autre bataillon qui se trouvait depuis quatre jours dans les tranchées ; l’ordre était donné ; coûte que coûte, il fallait prendre la tranchée allemande. Chose pas facile. Mais le e est toujours sur la brèche et toujours à l’honneur, et c’est le e bataillon qui a été désigné. Donc, après avoir parcouru  kilomètres, nous arrivons dans nos tranchées à minuit, en face l’ennemi distant de  m. Nous passons la nuit à la belle étoile par un froid un peu vif. Le capitaine nous fait savoir que l’attaque aura lieu à  heures et il nous dit quelques mots pour nous encourager. L’heure approche. On forme les sections : la re et la e doivent partir en tête, baïonnette au canon. Comme je fais partie de la e section, il faut que je parte des premiers à l’assaut. Vous devez bien comprendre que pour la première fois, c’était un peu dur, très dur même… Nous nous regardons entre nous sans parler en songeant à ce qui va arriver dans quelques instants : mais le sergent Augier, un Niçois, est parmi nous et il nous encourage par ses bonnes paroles ; il nous remonte et notre émotion se dissipe bien vite. Mais voici que  heures sonnent ! Le capitaine, en tête, crie : “En avant, mes enfants !” Et tous en choeur, nous grimpons nos échelles pour nous élancer vers les lignes boches sous une fusillade terrible. Nous parvenons à rentrer dans leur tranchée et à les faire partir. Je me demande comment je n’ai pas été blessé, car mitrailleu­ses, fusils et canons balayaient le terrain ; c’était un bruit formidable. J’ai vu tomber autour et à côté de moi pas mal de morts et de blessés ! Donc nous voilà dans la tranchée boche. Elle est toute démolie par notre  qui fait des merveilles. Il faudrait l’entendre “cracher” : il démolit tout ce qui se présente devant lui, et l’on voit des jambes, des bras voler en l’air ! [...]Le capitaine pleurait de joie de voir que tous nous avons marché comme des anciens et que nous avons eu l’honneur de faire évacuer ces sales boches. » Le souvenir n’a pas de limite dans le temps. Dès hier,  écoliers, collégiens et lycéens de Nice ont honoré la mémoire des soldats tombés pour la France durant la Grande Guerre, en déposant de nombreuses bougies devant le monument aux morts. Cette cérémonie des Flammes de l’espoir, organisée par la Ville et le comité de Nice du Souvenir Français, a duré plus de  heures, empreintes d’émotion et de recueillem­ent. Le Monument aux morts n’a pas désempli. Un Monument déjà envisagé par un conseiller municipal, Louis Martigny un  janvier ... C’était après le scandale du XVe Corps, injustemen­t pointé du doigt comme responsabl­e de la défaite d’une bataille en , pour masquer les lacunes du ministère de la Guerre. Il avait alors émis le voeu de voir élever aux « enfants de Nice morts pour la patrie, un monument digne d’eux et de leur ville natale ». Lire notre édition de demain. (Photo Sébastien Botella) ■ « Arrivée de sept officiers boches prisonnier­s. Un convoi de sept officiers boches prisonnier­s est arrivé, hier soir, par le train de 11h29, venant de Marseille. [...]Vu l’heure tardive, leur passage dans la rue de Falicon est demeuré inaperçu. Les habitants de ce quartier n’ont pas perdu beaucoup au spectacle peu intéressan­t de ces brutes galonnées, à l’aspect plutôt piteux. Ils sont partis ce matin, par le premier train allant à Entrevaux, où ils seront internés au Fort Vauban. La jolie collection qu’ils vont augmenter doit se composer, actuelleme­nt, de 45 officiers, plus 8 soldats boches prisonnier­s... les larbins de ces messieurs. » (Le Petit Niçois, 8 avril 1915).

■ « Un Kodak pour un poilu. On nous demande du front, pour un soldat peu fortuné, un Kodak pliant. Nous faisons appel à la générosité de nos lecteurs dont nous avons reçu déjà tant de preuves. La photograph­ie est devenue la passion de nos poilus. Ils tiennent tous à avoir des souvenirs des heures tragiques qu’ils ont vécues... Quoi de plus naturel ? » (Le Petit Niçois, 11 avril 1915).

■ « Pour un mutilé. Le soldat Martin Vignetta du 311e régiment d’infanterie, a été blessé à X..., au bras et à l’avant-bras.. Les plaies pénétrante­s ont nécessité l’amputation de son bras droit. Il a été cité à l’ordre du jour de son régiment et est proposé pour la retraite. il habite 118 bis, rue de France, avec sa famille, dont les moyens sont très limités. Quelle est la personne charitable qui offrira à ce brave un bras articulé ? » (L’Eclaireur, 3 mai 1915).

■ « Un mort qui se porte bien. Nous apprenons [...] que le soldat Soulet Joseph, de la classe 1914, incorporé au 3e de ligne et que certains informateu­rs trop zélés avaient fait passer pour mort, [...] est bien vivant et se trouve en bonne santé, prisonnier en Allemagne depuis le 21 février. [...] Il est véritablem­ent odieux qu’on se joue ainsi des angoisses d’une mère... » (Le Petit Niçois, avril 1915).

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