Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Le pianiste de la place Masséna encore délogé
Appelée par un riverain se plaignant du bruit, la police municipale a expulsé dimanche Steve Villa-Massone. La Ville, qui le soutient, prépare un arrêté pour mettre fin au vide juridique
Le musicien Steve VillaMassone, qui anime les rues de Nice depuis dix-sept ans, a été une nouvelle fois délogé par la police dimanche, en plein concert, sur la placeMasséna. Tandis que la vidéo de son échange avec les policiers fait le buzz sur internet (plus de 300000 vues en moins de quarante-huit heures), la municipalité lui réitère son soutien et assure préparer un arrêté pour réglementer la pratique. Résumé de cette nouvelle polémique en quatre questions.
Que s’est- il passé?
La scène se déroule place Masséna dimanche. Elle a été filmée et diffusée sur Facebook par un badaud. On y voit des policiers municipaux demander au pianiste Steve Villa-Massone d’interrompre son récital. Une situation qui, par le passé, s’est déjà produite plusieurs fois, selon le pianiste. L’an dernier, unprécédent quasi similaire avait déclenché un tollé. Excédé d’être à nouveau prié de cesser cette activité qui lui sert de gagne-pain, l’artiste s’agace, s’estime « harcelé » . Une ire applaudie par les passants.
Pourquoi la police est- elle intervenue?
D’après nos informations, la police a été alertée par un riverain excédé par la musique. Ce n’est d’ailleurs pas aux fonctionnaires que le musicien s’en prend. « Vous êtes, comme moi, victimes d’un système » , leur ditil sur lemoment. Contacté mardi, il n’avait pas varié: « Ils sont restés très calmes et très courtois. Ils n’y peuvent rien : ils ne font qu’exécuter les ordres. Ce n’est pas contre eux mais contre cette incohérence que je me rebelle. Je ne leur en veux surtout pas, d’autant qu’on sait à quel point leur métier est compliqué. »
Qu’est- ce qu’en pense l’intéressé?
Mardi, Steve Villa-Massone était toujours en colère, mais aussi gêné par l’ampleur que prenait la polémique. « Je joue dans la rue depuis l’âge de 19 ans. J’en ai 36 aujourd’hui, et j’en ai ras la casquette. Il y a un an, la mairie m’a assuré de son soutien. Depuis, j’ai bénéficié d’une incroyable tranquillité. En contrepartie, je joue
moins souvent, moins longtemps, et je change fréquemment d’endroit. Bref, je me fais tout petit… Dimanche, j’ignorais que la scène était filmée. Depuis, j’ai la boule au ventre. Cet emballement me met mal à l’aise. Je voudrais être connu comme le musicien de la place Masséna, pas comme le dissident ou le singe hurleur. » Et de pointer du doigt le flou législatif qui entoure la pratique de la musique sur l’espace public: « Le problème résulte d’un vide juridique. Si la musique de rue était encadrée par une loi, ce serait plus simple pour tout le monde… »
Qu’est- ce qu’en dit la Ville ?
Lors de la précédente polémique, en septembre 2016, la mairie avait contacté le pianiste pour l’assurer de son soutien. « Il ne sera plus embêté » , avait assuré le conseiller municipal Robert Roux, en charge de l’art dans l’espace public. Sollicité par Nice-Matin ce mardi, l’élu a rappelé son « soutien total » au pianiste. Et pointe également le vide juridique: « À l’inverse d’autres villes, nous n’avons pas de législation. Dans 99,9 %, ça se passe bien. Mais de temps en temps, un mauvais coucheur appelle la police, qui fait simplement son boulot… C’est dommage. On a besoin de ces artistes, que les Niçois comme les touristes apprécient… » C’est pourquoi « un arrêté municipal est en préparation pour la fin de l’année, révèlet-il. Il délimitera les lieux, les heures… On a besoin de ce texte, qui permettra aux artistes de s’exprimer sereinement mais aussi à la police d’être beaucoup plus à l’aise car elle pourra s’appuyer sur une réglementation. »