Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Romain Gary à l’écran: Eric Barbier tient promesse

Près de cinquante ans après Jules Dassin, Eric Barbier relève le défi en adaptant le chef-d’oeuvre de Romain Gary, La Promesse de l’aube. Charlotte Gainsbourg et Pierre Niney crèvent l’écran

- FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Un seul regret, très chauvin : Nice apparaît peu dans cette nouvelle adaptation de La Promesse de l’aube. Certes, une scène – majeure – a été tournée dans ce qu’il reste de la cité marchande de la Buffa. Mais on serait bien en peine de reconnaîtr­e la ville. « Elle a beaucoup changé », justifie Eric Barbier qui, pour être souvent venu depuis l’enfance, a vu de ses yeux une évolution fulgurante. Les images de la pension Mermonts ( lire ci-dessous )oudelagare­ont été empruntées à l’Italie. Trêve de chipotage, son film est une réussite, comme a pu le constater le public en avant-première, vendredi au Pathé Masséna. Du vrai cinéma, servi par une photograph­ie de concours et par des comédiens excellents. Pierre Niney, que l’on peut juger très fluet pour camper Romain Gary, ne manque pas d’épaisseur. L’enfant et l’adolescent qui le précèdent dans la chronologi­e du roman sont parfaits. Quant à Charlotte Gainsbourg, elle livre une performanc­e remarquabl­e dans le rôle de Mina, cette supermère qui rêve pour Romain du plus glorieux des destins. « Charlotte est un fil de fer. Une plume. L’inverse de Mina. Voulant absolument faire le film, elle a porté tous les jours une perruque et des prothèses destinées à lui faire prendre du volume. » Le charme opère jusqu’au générique de fin où l’on entend en voix off ces mots fondateurs de Gary-Ajar: « Avec l’amour maternel, la vie vous fait, à l’aube, une promesse qu’elle ne tient jamais. » Auparavant : deux heures douze d’une épopée où l’on passe de la Wilno à Londres, via l’Afrique.

L’amour d’une mère

Cette Promesse est une somme. Quatre ans de travail, quatorze semaines de tournage et près d’un an et demi de postproduc­tion, dont sept mois pour régler

les effets spéciaux afin de donner du relief aux combats aériens. Réalisés, pour l’essentiel, avec d’authentiqu­es bombardier­s. Vingttrois millions d’euros de budget : « Le pari est énorme. Je connais les enjeux. Il faut que ça marche. » « Un projet comme celui-là ne se porte pas seul» , résume Eric Barbier. Lorsque les droits, réservés depuis dix ans, ont été libérés, Gallimard a soumis plusieurs propositio­ns à Diego Gary, le fils de Romain et de Jean Seberg. Qui a tranché entre trois maisons de production et autant de réalisateu­rs : « Je crois que mon scénario lui a paru fidèle », se réjouit Eric Barbier. Un regret : « Tout ce qu’il a été nécessaire de couper. Il y a encore un mois et demi, j’ai retiré sept minutes sur un film fini, mixé, monté, projeté. Il fallait que ce soit épuré. » À l’arrivée : un vrai film d’aventure autour d’un axe fort, celui de l’amour maternel. Avec, en filigrane, l’idée de la vengeance. « La vengeance d’un enfant qui, ayant vu sa mère humiliée socialemen­t et même physiqueme­nt, a décidé de devenir Romain Gary.» Romain Gary, héros de la France libre, diplomate, incarnatio­n romanesque de l’amant et roi de la littératur­e car deux fois lauréat du Goncourt. À Nice, une stature de géant.

La Promesse de l’aube, sur les écrans le 20 décembre.

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(Photo Sébastien Botella) Eric Barbier à Nice vendredi, accompagné de Nemo Schiffman, qui incarne Romain Gary adolescent.

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