Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
La surnormalité ? « Une chance ! »
Aujourd’hui, au CUM, médecins et psychologues se penchent sur le cas de ces enfants au QI supérieur à 130, à dépister pour les sauver de l’ennui scolaire. L’avis d’un spécialiste niçois
Comment fonctionne le cerveau des enfants surdoués? La précocité intellectuelle, une chance ou un handicap? Pour en parler, biophysicien, neuropsychiatre, pédagogue, parents seront réunis autour de Jean-Charles Terrassier, psychologue niçois, spécialiste des enfants intellectuellement précoces, les EIP comme on les appelle, lors d’une conférence au CUM qui se tiendra cet après-midi. Hasard du calendrier, ce colloque
(1) coïncide avec le 46e anniversaire de l’association nationale des parents d’EIP créée à Nice par ce psychologue pour « secouer le cocotier de l’Éducation nationale » autour de ces enfants « surnormaux ». Rencontre.
Les EIP sont-ils aujourd’hui mieux repérés ?
Oui. Grâce à la médiatisation, les parents et les enseignants sont mieux informés. On n’hésite plus à faire tester un enfant très ou trop éveillé, ce qui n’était pas le cas il y a cinquante ans. Pour autant, la partie n’est pas gagnée. Il faut continuer à en parler auprès des parents et des psychologues pas toujours formés à la précocité intellectuelle. Dans l’intérêt de ces enfants.
Pourquoi?
Pour les dépister à temps, afin d’adapter l’enseignement à leur appétit, pour éviter l’ennui et l’échec scolaire. À l’école, il est facile pour ces enfants d’avoir de bonnes notes. Mais dès que le niveau d’étude se complique, exige organisation et persévérance, ces enfants à haut potentiel, n’ayant jamais appris à travailler, perdent pied. Certains le manifestent bruyamment en classe, par des problèmes de comportement. D’autres s’éteignent en silence. À l’inverse, tous les enfants précoces ne présentent pas un mal-être à l’école et s’adaptent. Leur intelligence est à la merci de leur personnalité.
On a l’impression qu’en France, le nombre d’enfants surdoués s’est accru…
Non, on en parle plus et c’est tant mieux. Pour l’Éducation nationale, il y a précocité intellectuelle quand le QI d’un enfant est supérieur ou égal à . Deux enfants sur cent (, %) sont dans ce cas-là et cette proportion ne varie pas. À partir d’un QI à , la précocité est exceptionnelle. Toutefois, cette information reste insuffisante tant la précocité est multiforme. Elle touche le langage, la capacité à l’abstraction, à se repérer dans l’espace, le raisonnement, l’attention, la mémoire… D’où la nécessité d’évaluer ces enfants par des tests d’intelligence qui ont été inventés à la fin du XIXe siècle par un Niçois, Alfred Binet.
Existe-t-il des signes révélateurs ?
Il y a des traits caractéristiques. Ces enfants s’entourent de camarades bien plus âgés qu’eux. Ils aiment converser avec des adultes, savoir le pourquoi de tout, sont très sensibles à l’injustice. Intéressés par l’univers, fascinés dès l’âge de - ans par l’origine de l’Homme, la vie, la mort, ils aiment les jeux stratégiques, ont un sens esthétique très développé sont distraits, peu sportifs… Tous présentent une dyssynchronie, c’est-à-dire un décalage entre leurs capacités intellectuelles et leur développement affectif et psychomoteur qui est normal.
Alors, une chance ou un handicap ?
Une chance évidemment ! Même si avoir un enfant précoce complique l’existence. La sienne, celle de ses parents qui doivent répondre à une foultitude de questions pour nourrir cette soif d’apprendre. Avec eux, on ne s’ennuie pas !