Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Le pari gagné de Larcher
La scène se déroule le avril dernier à l’Assemblée. Furieux que Clémentine Autain ait été coupée lors de son intervention, les députés de La France insoumise, poings vengeurs et théâtraux à souhait comme ils savent l’être, désertent en bloc l’hémicycle. Du grand-guignol. Dans les tribunes, l’ancien sénateur Jean-Léonce Dupont boit du petit-lait. Ce jour-là, il accompagne vingt visiteurs. Ils sont médecin, restaurateur, chirurgien, notaire, avocat, agriculteur, chef d’entreprise, fonctionnaire, étudiante… Tous composent la e promotion de l’Institut du Sénat. Cet Institut est le bébé de Gérard Larcher. Il l’a imaginé, dès son accession à la présidence, comme un moyen de redorer l’image de la haute assemblée. Une session de formation destinée à montrer l’intérêt du bicamérisme. A prouver, par une immersion régulière des participants dans le travail quotidien du Sénat, que ce dernier est tout sauf une maison de retraite. Qu’on y turbine énormément et, surtout, de façon plus apaisée et efficace qu’à l’Assemblée, effets de manche proscrits. Dans son entreprise de revalorisation, Gérard Larcher, outre l’aide involontaire des députés lorsqu’ils se caricaturent, a bénéficié d’un double coup de pouce. Celui d’Emmanuel Macron perçu, à tort ou à raison, comme un Président des villes qui dédaigne la ruralité. Et celui des opposants au gouvernement qui, à force d’être plus transparents les uns que les autres, ont fait du patron du Sénat le premier interlocuteur de l’exécutif, autant que le Zorro chenu de la défense des territoires. Mission quasi accomplie pour Gérard Larcher donc : il ne se trouve plus grand monde pour oser dire que le Sénat est superfétatoire et devrait être rayé de la carte. Le risque est désormais tout autre : celui de se laisser rattraper par les travers nombrilistes qui agitent l’Assemblée nationale. La commission d’enquête sur l’affaire Benalla laisse ainsi percer un sentiment confus de buzz politicien, qui n’est pas dans l’ADN revendiqué par le Palais du Luxembourg.
« Plus grand monde ne dit que le Sénat est superfétatoire. »