DÉCEMBRE 12 CHANTAL CROUSEL & NIKLAS SVENNUNG
LES INVITÉS DU MOIS PORTRAIT PAR JEAN-LUC MOULÈNE
Tu ne veux pas raconter l’histoire de Man Ray et de l’avenue Louise ?
Oui, ça, bien sûr. [Rires.] Avant mon départ pour Paris en 1972, je travaillais à Bruxelles comme secrétaire de direction pour Clark, une société de chariots élévateurs. À l’heure du déjeuner, je me baladais avenue Louise, et j’ai été interpellée par un petit dessin encadré présenté dans la vitrine d’un magasin. Je suis entrée − je ne savais pas que c’était une galerie − et la dame m’a tellement bien expliqué ce dessin que je l’ai acheté. C’était un Man Ray. Je l’ai toujours. J’avais toujours été attirée par l’art, mais cette dame m’a révélé d’autres dimensions. On pouvait non seulement être émerveillé, mais aussi transmettre cet émerveillement.
Vous ouvrez la Galerie Chantal Crousel quelques années plus tard, en 1980. Quelle a été votre première exposition ?
C.C. : Avant, il y a d’abord eu une brève expérience de galerie, ouverte en 1976 avec un compagnon d’études d’histoire de l’art, Jacques Blazy : La Dérive. Les gens se sont moqués du nom. Venu assister au vernissage de l’exposition de Christian Dotremont, Un temps lapon d’écritures, le peintre belge Pierre Alechinsky a dit : “Au moins, avec La Dérive, on sait où on va.” [Rires.] Le dialogue entre l’art primitif que proposait Jacques Blazy et l’art contemporain que je défendais n’a pas pris. La galerie a fermé en 1978. Un an après, en rendant visite à mon ami Jan Hoet, directeur du musée d’art contemporain de Gand, je rencontre Tony Cragg. Jan préparait l’exposition Kunst in Europa na ‘68 [ L’art en Europe après 68], qui allait devenir une référence internationale. Tony lui montrait son travail. Je découvre un nouveau langage en sculpture, créé par l’assemblage THEY SAY SHE’S SHY, BUT GALLERIST CHANTAL CROUSSEL HAS BEEN SHAPING THE PARISIAN SCENE SINCE 1980. SHE’S DEMANDING AND INTELLECTUAL, AND CHEEKY AND REBELLIOUS TOO. WHAT IF ART WERE JUST A GAME OF FORMS, LANGUAGES AND FRIENDSHIPS? WE MET UP WITH HER AND HER SON AND BUSINESS PARTNER, NIKLAS SVENNUNG.
Behind any artistic calling, there’s often a pivotal meeting or moment. What was yours?
Niklas Svennung: Why don’t you tell the story about Man Ray in Avenue Louise? Chantal Crousel: Ah yes that, of course! [Laughs.] Before leaving for Paris in 1972, I worked as an executive secretary in Brussels for Clark, a forklift-truck firm. One lunchtime, I was walking along Avenue Louise, and I was struck by a small framed drawing in a very large shop window. So I went in – I didn’t know it was a gallery – and the woman explained the drawing and its context so well that I ended up buying it. It was a Man Ray. I still have it. I’d always been attracted by art, but this woman opened up new dimensions for me. Not only could one experience wonder, one could also convey it to others.
Before that, there was a brief gallery experience with a space I opened in 1976 with Jacques Blazy, a fellow arthistory student – La Dérive [“Drifting”]. People made fun
C.C: