Numéro Homme

Roger Federer.

“Je ne vais pas revenir pour jouer des seconds tours dans un coin paumé.”

- Par Olivier Joyard, portraits Pierre-Ange Carlotti, réalisatio­n Jim Moore et Jean Michel Clerc

Il est probableme­nt le meilleur tennisman de tous les temps. Avec vingt tournois du Grand Chelem remportés, et une première place au classement ATP trustée plus longtemps que quiconque, Roger Federer bat tous les records depuis vingtdeux ans. Habitué à sillonner le monde au gré des matchs, valise Rimowa à la main, le maestro nous reçoit pour une interview exclusive chez lui, en Suisse. Et évoque son grand retour, à Doha.

Certaines façons de marcher en disent beaucoup sur une manière de vivre. En entrant dans la pièce où il va nous parler via Zoom, Roger Federer ne fait rien de particulie­r. Mais son rapport aérien à la réalité saute aux yeux. Il a beau détenir l’un des plus extraordin­aires palmarès de l’histoire du sport, c’est d’abord ce danseur-né, cet héritier involontai­re de Fred Astaire que l’on voit, même dans la banalité d’un

“hello” souriant prononcé en s’asseyant. L’attraction est immédiate et le menu du jour bien garni. Il se trouve que c’est un moment crucial pour lui parler. Une tension affleure chez les fans de la superstar. Le temps, qu’il sait si bien suspendre sur un court de tennis, est devenu un sérieux adversaire pour Roger Federer. Au moment où nous lui parlons, il n’a plus joué en match officiel depuis un an [défaite en demifinale de l’Open d’Australie face à Novak Djokovic], la plus longue absence de sa carrière. Blessé au genou, le magicien suisse a subi deux opérations et a programmé son retour au tournoi de Doha, au Qatar, du 8 au 13 mars. En août prochain, il fêtera son quarantièm­e anniversai­re, un âge canonique pour tout sportif de haut niveau. Autant dire que nous étions préparés à insister sur la mélancolie d’un crépuscule en ces temps de pandémie.

C’est évidemment l’inverse qui se produit. Le natif de Bâle entame l’entretien avec l’énergie d’un homme pour qui les douze derniers mois auraient pu ressembler à un cauchemar et qui a décidé que ce ne serait pas le cas. Mais

alors, pas du tout. On lui demande s’il va bien, question à plusieurs niveaux de lecture par les

temps qui courent. “Vous avez raison. Avant, on disait ‘salut, ça va ?’, l’autre répondait vite fait et on passait à autre chose. Aujourd’hui, cela a du sens. Tout le monde connaît au moins une personne qui a attrapé le virus, on espère ne pas l’attraper, le monde entier se retrouve dans la même situation. Cela dit, pour être tout à fait honnête, je vais très bien malgré les douze mois un peu fous que je viens de passer : deux opérations du genou et une pandémie. Avec ma femme, cela s’est transformé en année propice au ralentisse­ment.”

Depuis bientôt vingt-trois ans – son premier match en pro date de juillet 1998–, le quotidien de Roger Federer a consisté à répéter jusqu’à la perfection une routine gagnante : entraîneme­nt, grand hôtel, match, récupérati­on, victoire, voyage, entraîneme­nt… Il a mené la vie d’une superstar du jeu, hiver en Australie, printemps et début d’été en Europe, fin d’été aux États-Unis. Palaces, coupes dorées et coupes de champagne. Un rituel sans cesse renouvelé. Comment ne pas comprendre qu’il ait accueilli 2020 avec philosophi­e ? “Parfois, il s’est passé des semaines entières sans événement particulie­r. Nous avons respecté les règles de façon stricte, ici en Suisse. D’ailleurs, c’était sympa de retrouver mon pays où, en général, je ne passe pas plus de trois mois par an. La seule fois où j’ai été ici longtemps, c’était en 2016, déjà à cause de mon genou. Nous avons pu voir nos

“J’ai pris la décision de me faire opérer après mûre réflexion. J’ai peur du scalpel. Si je n’y suis pas complèteme­nt obligé, je ne passe pas sur le billard.”

amis et nos parents dont nous sommes proches, mais plutôt dehors. C’était super étrange au début, maintenant on sait faire avec.”

Comme nous autres mortels, Roger Federer a-t-il passé ses longues soirées confinées accroché à Netflix, pour tromper

l’ennui ? “Non, je n’ai pas ‘bingé’ tant de trucs que ça, ni films ni séries. J’étais occupé à devenir le quarterbac­k de la famille. Pour une fois. Dans ma vie tennistiqu­e, je prends les grosses décisions et des gens gèrent le quotidien à ma place. Là, j’étais vraiment ravi de piloter des détails avec ma femme, de penser à des choses pour les enfants, le jardin, la maison. J’ai fait des rendez-vous vidéo avec l’ATP, j’ai communiqué avec Rafa [Nadal] notamment. Dans ma vie normale, tout s’improvisai­t en fonction des résultats. Je partais souvent à la dernière minute, je sortais mes affaires et je les refaisais dans la foulée. Depuis le confinemen­t, j’ai eu du temps. Bon, je n’exclus pas de commencer à ‘bingewatch­er’ si ça dure trop. [Rires.]”

On perçoit moins d’anxiété dans les yeux de Roger Federer que dans ceux des vingt dernières personnes à qui on a parlé. Dans ce discours tranquille se niche l’une des singularit­és profondes du champion, antithèse des sportifs rock stars et autodestru­cteurs à la Maradona. On ne lui connaît aucun excès, aucune folie en dehors de celle qu’il utilise si bien sur le court. Une vie dédiée à la performanc­e ne s’improvise pas, elle demande une souplesse alliée à une précision que l’on qualifiera de militaire. Alors, un confinemen­t, dans ce contexte, peut ressembler à problème minime, tant que la maladie ne frappe

pas. “J’ai une super maison, un couple solide et quatre enfants qui suivent l’école à domicile. Cela n’a pas changé grand-chose : même quand je voyage, ils viennent souvent avec moi, on mange ensemble. Ce qui a été difficile, c’est par rapport à la génération de mes parents. J’ai été inquiet pour les autres plus que pour moi. Mes opérations se sont bien passées, je suis le dernier à me plaindre. Bon, ça m’arrive d’avoir des jours moins faciles, quand il faut répéter aux petits pour la millième fois ce qu’est le coronaviru­s.

[Rires.] Mais lorsque tout s’est figé, je me suis retrouvé plutôt apaisé, grâce à mes certitudes. Nous sommes depuis longtemps une famille soudée. Je n’ai pas eu besoin de la pandémie pour me réveiller, comme je n’ai pas attendu d'avoir des enfants pour connaître mes priorités.”

Le ton employé n’a rien de péremptoir­e. La voix est douce, chantante, comme si Roger Federer voulait à tout prix éviter de donner des leçons de bonheur. La fluidité qui se dégage de lui semble absolument naturelle. Même quand il évoque ses blessures, c’est en laissant la souffrance hors champ, alors qu’une incertitud­e demeure sur la capacité du génie suisse à revenir sur le court en pleine possession de ses moyens.

“J’ai pris la décision de me faire opérer après mûre réflexion. Une opération angoisse un athlète comme tout être humain. J’ai peur du scalpel. Si je n’y suis pas complèteme­nt obligé,

“Certains repensent pendant des jours et des nuits à ces coups qu’ils ont ratés. Moi, j’ai choisi d’analyser très vite. Ça m’aide à passer à autre chose.”

je ne passe pas sur le billard. À l’âge de 15 ou 16 ans, je n’aurais probableme­nt pas envisagé de revenir après un total de trois opérations au genou. Mais j’ai accepté l’interventi­on pour ma vie en général. J’ai envie de pouvoir aller skier quand je serai à la retraite, de faire des tonnes de choses. Alors oui, je me suis fait opérer dans le but de rejouer au tennis, mais j’ai réfléchi au-delà.” De retour à l’entraîneme­nt depuis le début d’année, Federer a passé un peu plus de trois semaines à Dubaï à goûter de nouveau aux joies de l’échange sur les courts, avant de rentrer en Suisse pour entamer une nouvelle phase de travail physique.

Revenir d’une blessure est difficile à tout âge, mais encore plus au sien. Surtout quand le niveau musculaire des joueurs atteint les sommets actuels. Il y a une quinzaine d’années, on pouvait encore se permettre quelques pas de côté dans une discipline de champion. Le tennis eighties fut rempli de fêtards légendaire­s. C’est moins le cas aujourd’hui, où une forme de sérieux domine. Voilà l’occasion de discuter avec Roger Federer de l’une des beautés mystérieus­es de sa réussite : sa condition d’artiste à l’ère du muscle dominateur – la puissance n’a jamais été sa première qualité. Pour cela, “RF” éclaire son propre parcours et relativise le cliché du devenir cyborg de son sport. “Quand j’ai commencé à jouer avec les pros, l’échauffeme­nt consistait à sauter deux fois sur place, enchaîner avec deux abdos, deux pompes et on y allait ! Maintenant on bosse avec des élastiques, on fait du tapis de course, on attrape des balles, on les relance, on saute, on médite… C’est beaucoup plus balisé. Mais il reste une part d’humanité. Nous ne sommes pas exactement des machines sophistiqu­ées pour qui tout serait prévu. On partage des vestiaires, des aires d’échauffeme­nt, des restaurant­s, on se voit de façon très relax.”

Comme tous les vrais passionnés, Federer est capable de parler des heures de l’évolution de son sport. Ses yeux s’animent quand il remonte quelques décennies en arrière

pour nous offrir un petit cours magistral. “Avant, les joueurs ne se la coulaient pas douce non plus. Dans les années 50, les simples, les doubles et les mixtes se jouaient systématiq­uement en cinq sets. Les mecs n’avaient pas le temps pour les massages, ils passaient directemen­t au bar prendre une bière. Les voyages étaient plus longs. C’était une autre époque. Dans les années 70 et 80, Borg et Vilas ont commencé à s’entraîner six heures par jour. Puis ce fut au tour d’Ivan Lendl, Jim Courier et Martina Navrátilov­á qui ont transformé le tennis avec leurs entraîneme­nts musculaire­s. D’autres sont arrivés, ils les ont plus ou moins copiés et nous voilà dans la période actuelle, où ceux qui jouent le mieux sont certaineme­nt ceux qui bougent le mieux.” Pour conclure sur le sujet qui manifestem­ent lui tient à coeur, Federer tient à préciser l’évidence. “Je travaille très dur, même si j’en parle assez peu. J’espère que les gens comprennen­t à quel point je bosse, sinon je n’aurais pas réussi à ce point pendant toutes ces années, en échappant

“J’espère que les gens comprennen­t à quel point je bosse, sinon je n’aurais pas autant réussi pendant toutes ces années.”

largement aux blessures. Björn Borg a pris sa retraite à 26 ans, moi j’en ai 39. Je pense que la recette pour durer tient à un équilibre : comprendre quels moments nous rendent heureux en tant que joueur pro, estimer la quantité d’entraîneme­nt qu’on est capable d’absorber, et savoir comment rester créatif sur le cours.”

La créativité, on y arrive enfin. Les montagnes de muscles n’ont que rarement été efficaces face aux arabesques pleines de punch de Roger Federer. On conseille aux néophytes de se réserver une soirée pour explorer Internet et visionner les compilatio­ns de ses plus beaux coups, comme ce passing-shot gagnant décoché entre les jambes après avoir été attiré vers le filet par une amortie, puis lobé par Novak Djokovic. Ce qui frappe dans les moments les plus géniaux de Federer ? Ce sentiment d’ultime relâchemen­t au moment de frapper la balle. L’effort, immense, se voit à peine. Une nouvelle géographie du court s’invente sous nos yeux et la beauté semble appeler l’efficacité. Federer répond à nos éloges par une formule toute simple, enfantine. “Pour moi, le tennis est un jeu avant d’être un sport. C’est ce qui le rend aussi beau et c’est la raison pour laquelle je ne serai jamais fatigué d’en regarder, même en tant que fan.”

Quand on lui demande ce qu’est pour lui un coup parfait, comme il existerait une note parfaite pour un musicien, il s’anime encore plus :

“Les coups d’attaque sont plus faciles à contrôler et spectacula­ires. Mais j’aime bien la défense. Si on parvient à rester calme et à lire l’esprit de son adversaire, cela devient comme les échecs : ‘Je sais que tu vas faire ça, moi je vais avancer comme ça.’ Et si cela se déroule exactement comme tu l’as voulu, tu peux réussir ce coup incroyable que tu ratais à l’entraîneme­nt, car le niveau d’anxiété n’était pas le même. Tu entends la foule se soulever. Ça, pour moi, c’est un coup parfait, surtout s’il survient dans un moment important. Au tennis, un point est un point, mais certains sont plus mémorables que d’autres... Même si on peut complèteme­nt perdre un match en ayant remporté plus de points que son adversaire. Ça m’est arrivé souvent. [Rires.]” Souvent, vraiment ? Pas tant que cela a priori. À ce jour, Roger Federer détient, avec Rafael Nadal, le record masculin du nombre de victoires en tournoi du Grand Chelem (20) et il a remporté 103 titres sur le circuit. Cela posé, et même s’il restera dans l’Histoire comme le plus grand joueur de tous les temps, le Suisse a perdu 54 finales. Les défaites le constituen­t aussi, loin de l’idée d’invincibil­ité qui de toute façon gâcherait le plaisir de l’aimer. Il lâche d’ailleurs spontanéme­nt cette phrase : “C’est certaineme­nt de mes défaites que j’ai le plus appris.”

Mais quelle est sa méthode pour

accepter de ne pas être infaillibl­e ? “Le plus important, c’est de ne pas y accorder une importance émotionnel­le trop forte. Ne pas se juger à tout prix. Analyser. Comprendre. On peut le faire seul, ou en parlant avec d’autres pour faire sortir la déception. Certains repensent

“Je vais donner un dernier gros coup de reins sur le circuit pour voir ce qu’il me reste dans le réservoir. J’ai envie de battre les meilleurs joueurs du monde.”

pendant des jours et des nuits à ces coups qu’ils ont ratés. Moi, j’ai choisi d’analyser très vite. Ça m’aide à passer à autre chose.” Après ses rares matchs terminés la tête basse, Federer parvient donc à se raisonner. “Parfois, je comprends que tout n’a pas été nul. L’autre a été meilleur sur la fin, j’aurais dû agir autrement, tant pis. C’est ma faute, je le saurai pour la prochaine fois.” A-t-il un

conseil à donner en cas de lose patentée ? “Il ne faut pas prendre de décisions en panique quand on perd. C’est très important. Sinon, on commence à tout interroger. On regarde son coach, on se demande si c’est encore le bon. Puis on se dit qu’on a perdu parce que notre femme portait un chapeau orange et qu’elle ne doit plus jamais le porter. On peut vraiment aller loin et devenir dingue.” Douter de soi jusqu’à s’épuiser, cela peut arriver à tout le monde. La vision apaisée de Federer sur ces notions universell­es mérite d’être largement partagée. Chez lui, elle vient de loin. “Quand j’étais jeune, je n’étais même pas en colère quand je perdais, mais extrêmemen­t triste. Je ne pouvais pas réfléchir de manière lucide. Maintenant, je n’ai besoin que d’une demi-heure pour me remettre d’une défaite. Une heure peut-être s’il s’agit de la finale de Wimbledon…”

Une chose est donc sûre : Roger Federer se remet plus vite de ses propres défaites que n’y parviennen­t ses fans, par nature sentimenta­ux. La finale de Wimbledon à laquelle fait allusion le joueur est celle de 2019, quand il a perdu au cinquième set après avoir obtenu deux balles de match contre Djokovic. Un crève-coeur.

“Des fans m’ont parlé de cette défaite pendant des semaines sur le Web. Et encore aujourd’hui, ça arrive. Je me dis : ‘Quoi, ils y pensent encore ?’ Mais je comprends.” Federer, lui, a pourtant le regard ailleurs, vers la suite. Quand on lui demande quels sont ses rêves, il évoque spontanéme­nt la fondation d’aide à l’enfance qui porte son nom : “Qui sait, peut-être qu’un jour je serai aussi célèbre pour mon travail philanthro­pique que pour le tennis, j’en rêve en tout cas.” Mais avant qu’il ne soit question de cela, le voir sur un court de tennis reste la priorité absolue. Pour nous comme pour lui. “Je m’entraîne très dur pour être présentabl­e à mon retour. L’inactivité, c’est difficile. Je n’ai jamais arrêté de jouer aussi longtemps. Je n’ai pas de souci depuis ma deuxième opération. Le plaisir de revenir sur un court est immense, je peux vous le dire.” Un objectif se dessine, auquel on a envie de croire. Et subitement, il n’est plus du tout

question de perdre. “Je vais donner un dernier gros coup de reins sur le circuit de tennis profession­nel pour voir ce qu’il me reste dans le réservoir. J’ai envie de gagner de grands tournois et de battre les meilleurs joueurs du monde. Je ne vais pas revenir pour jouer des seconds tours dans un coin paumé. Si je fais tous ces efforts, c’est pour revenir en haut. J’ai l’impression de savoir ce que je dois faire pour y parvenir. Il y a une part de rêve et une part de logique. Disons que c’est un rêve logique.”

 ??  ?? Pull à col roulé en laine, LOUIS VUITTON. Lunettes “Bridge Square”, RIMOWA. Montre chronograp­he, ROLEX.
Pull à col roulé en laine, LOUIS VUITTON. Lunettes “Bridge Square”, RIMOWA. Montre chronograp­he, ROLEX.
 ??  ?? Veste et pantalon de costume en drap de laine, LOUIS VUITTON. Pull à col roulé en mérinos, UNIQLO. Montre chronograp­he, ROLEX. Valises “Original” et “Classic”, RIMOWA.
Veste et pantalon de costume en drap de laine, LOUIS VUITTON. Pull à col roulé en mérinos, UNIQLO. Montre chronograp­he, ROLEX. Valises “Original” et “Classic”, RIMOWA.
 ??  ?? Sous-pull en coton technique, UNIQLO. Sac à dos “Never Still”, RIMOWA.
Sous-pull en coton technique, UNIQLO. Sac à dos “Never Still”, RIMOWA.
 ??  ?? Chemise en popeline de coton,
LOUIS VUITTON.
Chemise en popeline de coton, LOUIS VUITTON.
 ??  ?? Pull en jacquard de coton et laine, LOUIS VUITTON. Sous-pull et pantalon de jogging en coton technique, UNIQLO. Montre chronograp­he, ROLEX. Sac à dos “Never Still”, RIMOWA.
Pull en jacquard de coton et laine, LOUIS VUITTON. Sous-pull et pantalon de jogging en coton technique, UNIQLO. Montre chronograp­he, ROLEX. Sac à dos “Never Still”, RIMOWA.
 ??  ?? Sous-pull et pantalon de jogging en coton technique, UNIQLO. Sac à dos “Never Still”, RIMOWA.
Sous-pull et pantalon de jogging en coton technique, UNIQLO. Sac à dos “Never Still”, RIMOWA.

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