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L’illustrate­ur sonore Michel Gaubert. Propos recueillis par Delphine Roche

- Propos recueillis par Delphine Roche

Il a d’abord été DJ du Palace avant de mettre en musique les défilés des plus grandes maisons. Complice notamment de Karl Lagerfeld, Michel Gaubert est devenu une personnali­té de la mode, à part entière. Pour cette édition dédiée à la musique, l’illustrate­ur sonore nous présente ici trois talents à suivre de près.

NUMÉRO : Comment décririez- vous votre métier à une personne qui ne le connaît pas ? MICHEL GAUBERT : Je suis un illustrate­ur sonore. Mon travail consiste à mettre du son sur un sujet qui m’est donné. Dans le cas d’un défilé de mode, c’est d’abord une marque avec une identité for te et reconnue, mais aussi une collection avec des inspiratio­ns particuliè­res, et tout cela doit encore résonner avec le lieu dans lequel prend place la mise en scène… Je réfléchis aussi en fonction du moment de la journée, de la saison, du genre de mannequins qui défilent… Et je mets tout ça en musique. Je ne suis pas un artiste, mais pas non plus un DJ. C’est un peu comme imaginer la bande originale d’un film. La musique modifie l’émotion qu’on ressent face à des images. C’est la même chose pour un défilé. Depuis quelque temps, j’aime mettre les maisons en relation avec des ar tistes que je connais bien, et dont je considère qu’ils peuvent leur correspond­re. Je suggère aussi des sets live, car ce n’est pas le même ressenti que de la musique enregistré­e, c’est plus éphémère et plus fragile.

Comment fonctionne cette alchimie ?

J’avais proposé au groupe Chromatics de se produire en live sur un défilé de Chanel, c’était très réussi. J’ai aussi enrôlé l’artiste italienne Caterina Barbieri pour le défilé Fendi à Rome, avec le Colisée en toile de fond. C’était assez magique parce que sa musique évoque, je trouve, une sorte de “Renaissanc­e électroniq­ue”.

Elle a un côté historique. Cela fonctionna­it donc très bien avec cette vision des filles sortant du Colisée. Cela m’a fait penser aux Pink Floyd à Pompéi.

Outre Caterina Barbieri, vous avez également souhaité mettre en avant Johnny Jewel et Planningto­rock, pourquoi ces choix ?

J’ai rencontré Johnny Jewel en 2012, il était connu pour la musique du film Drive, et j’étais allé le voir à La Gaî té Lyrique. Je lui ai proposé une collaborat­ion avec Chanel. Il a choisi certains de ses morceaux, créé des liens entre eux, et on a ménagé un suspense pour le final, en travaillan­t main dans la main. Je vois souvent Johnny quand je suis à Los Angeles, Caterina Barbieri quand je suis à Milan ( pendant la Fashion Week, nous sommes sortis ensemble dans un endroit improbable pour son anniversai­re). Planningto­rock, je le vois quand je vais à Berlin. Je lui ai commandé des morceaux pour le dernier défilé Chanel, il était super excité. Je lui avais envoyé des drôles de références, Peau d’âne et Mylène Farmer pour le côté “grande saga très violoneuse”. Les deux morceaux qu’il a faits étaient magnifique­s… Je suis assez fier aussi de pouvoir dire que j’ai organisé le seul concer t de Frank Ocean à Paris, pour l’exposition La Petite Veste Noire. J’ai aussi travaillé avec Janelle Monáe dès ses débuts, avec FKA Twigs pour Valentino… Tous ces artistes sont des personnes très fidèles, avec qui je suis resté en contact.

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