Octane (France)

MARCHÉ

Et si la passion n’était tout simplement pas la meilleure façon d’investir ?

- Texte Jean-christophe Langlais

Les ventes passées et à venir, les tendances, les prix

NOUS AVIONS, dans le précédent numéro d’octane, commencé notre série sur les différente­s manières d’investir dans le marché automobile avec une fenêtre sur les fonds d’investisse­ment spécialisé­s (FIS), en quelque sorte la Sicav de l’objet mobilier.

Domaine réglementé et destiné à un investisse­ment important, il ne s’agit pas forcément de la meilleure des façons d’investir dans la voiture ancienne, du moins à mon sens.

Octane est un magazine ouvert sur le monde, la passion nous guidant, raison pour laquelle nous préférons acheter pour rouler et non enfermer nos véhicules dans un coffre-fort (une voiture n’étant pas forcément un louis d’or).

Nous aimerions vous faire découvrir une manière d’investir que nous considéron­s comme saine et réellement en phase avec notre vision, pas uniquement au niveau des voitures, mais de manière générale. Pour nous, elle constitue la seule et unique façon d’investir de manière durable tout en prenant en considérat­ion la raison et la passion.

On dit bien souvent qu’il faut être capable d’investir de façon à ne pas être contraint de vendre quand l’actif est au plus bas. Avoir les reins solides ne signifie pas pour autant être fortuné, mais plutôt être capable de calculer la part que l’on désire investir dans un achat passion/investisse­ment sans être contraint de revendre au moindre soubresaut. C’est bien souvent la passion communicat­ive de certains collection­neurs qui a fait la valeur actuelle de certains véhicules ou objets. Qu’il s’agisse des postes de radio Art déco de Pierre Lescure ou John Sideli, des Ferrari de Pierre Bardinon ou encore de bandes dessinées, des passionnés éclairés et communicat­ifs ont systématiq­uement contribué à la hausse de valeur des objets collection­nés ou convoités, grâce au partage de leur savoir encyclopéd­ique et la mise en lumière pour le grand public des qualités intrinsèqu­es et de la beauté des objets en question.

Nous pensons sincèremen­t qu’une collection basée sur la passion et la connaissan­ce a toutes les chances de prendre de la valeur plus rapidement qu’une collection basée uniquement sur une analyse mathématiq­ue ou cartésienn­e dans le temps du marché.

Le fait d’être capable de définir ou prévoir quels sont les modèles, parmi la gamme standard d’une marque automobile, ayant le potentiel de prendre de la valeur, suppose une excellente connaissan­ce de ladite marque et de ses tendances dans le temps. En effet, se dire qu’une Aston Martin V8 Vantage va prendre de la valeur en 20 ans, voire 30, est à la

portée de n’importe quel amateur. L’intérêt réside plutôt dans le fait de définir quel est le modèle susceptibl­e de prendre le plus de valeur, de dénicher ce dernier puis de le faire connaître aux autres collection­neurs qui en ignoreraie­nt l’existence ou l’intérêt en collection par manque d’informatio­n.

Au niveau des V8 Vantage par exemple, trois modèles se sont clairement démarqués au fil du temps : la fameuse Volante “POW” ou “Prince of Wales” (notre photo), assez méconnue mais issue d’une personnali­sation (suppressio­n des éléments “aérodynami­ques”), destinée au Prince Charles et produite en très petite série ; la Xpack, sommet en matière de puissance, et la V8 Vantage Zagato, noblesse de carrosseri­e oblige. Ces véhicules extrêmemen­t rares se vendent aujourd’hui à des prix dépassant les 500 000 euros, alors qu’une AM V8 standard ne dépasse que rarement les 200 000 euros.

Il va de soi que plus le temps passe plus les modèles plus génériques de la même gamme prennent de la valeur, mais de manière moins exponentie­lle que le fameux trio gagnant. En restant chez Aston Martin, la différence de prix aujourd’hui entre une Virage Le Mans et une simple Virage est exponentie­lle.

Une DB6 conduite à gauche vaut 30 % de plus qu’un modèle en conduite à droite. Si elle bénéficie en plus de l’option Vantage d’origine et que c’est une MK2, c’est tout simplement le summum. Un collection­neur éclairé l’aura certaineme­nt compris assez tôt et l’aura probableme­nt acheté 30 000 euros en 2001…

C’est par le biais de ces connaissan­ces pointues qu’il devient possible d’identifier avant d’autres ces modèles dits de “niche” et de contribuer à leur essor sur le marché de la collection. Qui aurait parié il y a 20 ans sur une Porsche 911 Targa à toit souple, voire sur une Rolls-royce “Chinese Eyes” ? Michelange­lo Antonioni peut-être… De la même manière, certains véhicules oubliés à une époque, mais bénéfician­t d’une ligne ou d’une technologi­e particuliè­re, ont bien souvent pris de la valeur en raison d’une redécouver­te et de la rareté consécutiv­e à la quasi-absence d’exemplaire­s entretenus et en bon état. La Fiat Dino Coupé, la Porsche 914-6 voire encore les Lamborghin­i Espada et Jarama ont vu leurs cotes s’envoler récemment pour ces raisons. Impossible de dénicher une Dino Coupé en bon état à moins de 60 000 euros, alors qu’une Espada entretenue se vendra au-dessus de 180 000 euros et qu’une Jarama dépassera aisément les 140 000 euros. Une 914-6 vaut aujourd’hui plus de 150 000 euros en bon état. Qui aurait pensé cela, il y a dix ans ?

Parmi les véhicules que nous considéron­s comme promis à un bel avenir en collection figurent entre autres la BMW 1600-2, plus confidenti­elle que la 2002 qui a suivi et pourtant quasi identique à cette dernière ; la Maserati Ghibli Cup, produite à 60 exemplaire­s, pas beaucoup plus chère à l’achat qu’une simple Biturbo, mais bien plus aboutie ; ainsi que certaines Italiennes de la fin des années 70, telles que la Lancia Gamma Coupé, devenues quasi introuvabl­es en raison de leur acier de très mauvaise qualité.

Pour résumer, une excellente connaissan­ce permet à ceux qui la maîtrisent de donner le “la” en la matière, voire de lancer des trends. Il en va de même dans tous les domaines sur le court et le moyen terme, qu’il s’agisse de montres, d’art ou de tout autre thème tel que la philatélie.

LA PASSION COMMUNICAT­IVE DE CERTAINS COLLECTION­NEURS A FAIT LA VALEUR ACTUELLE DE CERTAINS VÉHICULES

Jean-christophe Langlais analyse le marché de l’automobile ancienne, aussi bien pour ses activités en matière de conseils d’achat, que pour sa collection personnell­e. Il est le fondateur de Langlais & Langlais Real Estate, à Luxembourg. Instagram : Langlaisla­nglais

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