Surprise californienne
LA VOITURE S’EST ARRÊTÉE, quelque part du côté de King City, en Californie, sur une bretelle de sortie de la route 101. Mon grand road-trip californien au volant de ma nouvelle Porsche 912 de 1968, de San Francisco jusqu’au dépôt d’une entreprise de transport maritime à Los Angeles, ne se déroulait pas exactement comme prévu.
J’ai vidé le contenu de la voiture sur la chaussée, à la recherche d’une boîte à outils. L’humidité de la route avait trempé mes affaires à travers les trous du plancher, l’habitacle était rendu étouffant par la chaleur du soleil, et il n’y avait pas trace du moindre outil. Quel genre d’idiot part pour un voyage de 650 km dans une voiture de 44 ans, sans la moindre clé de 10 à bord ?
Je suis un photographe qui travaille surtout pour des constructeurs automobiles, prenant des clichés pour les aider à vendre leurs produits, mais ce sont les vieilles voitures qui me passionnent et c’est pour cela que vous voyez parfois mes images dans Octane. J’aime en particulier les vieilles Porsche. Après avoir vendu ma première en 2008 (une 911T de 1972), je me suis mis en chasse d’une remplaçante.
J’aime également les longs voyages à bord de vieilles voitures et j’oublie régulièrement ma boîte à outils… Voilà comment je me suis retrouvé immobilisé à 8 000 km de chez moi, dans une 912 sale et en panne, à moins de 72 heures du réveillon de Noël 2012.
Je n’ai jamais été un grand partisan des 912 avant que, plus tôt cette même année, un ami californien me laisse le volant de la sienne. Je n’avais jusque-là conduit que des 911 et son comportement m’a séduit. Une rencontre fortuite le lendemain m’a mené à une voiture si peu chère que j’en ai oublié ses défauts évidents : un toit cabossé, de la rouille, et un moteur qui s’époumonait comme un chien mourant, entre autres. Je peux maintenant ajouter une commande d’accélérateur cassée à cette liste. Étant donné le manque de ressources, je l’ai réparée en dévissant la commande, en faisant passer le câble à travers le tunnel et en le fixant au sommet de la pédale d’accélérateur avec du scotch. Mes mains graisseuses étaient en sang, mais le bricolage fonctionnait. Un peu plus tard, je me suis arrêté dans une quincaillerie pour améliorer le tout avec quelques colliers Rilsan.
Je suis arrivé à L.A. avec quelques heures de retard et le transporteur avait fermé pour les vacances. Un ami d’ami s’est proposé de garder la voiture et de l’emmener au port après Noël. Sans autres options, avec l’obligation de prendre mon vol du retour, j’ai laissé la piteuse épave dans l’allée de sa belle maison et suis rentré en Europe. La voiture a rejoint le port non sans tomber deux fois en panne sur le chemin. Quand nous avons été réunis de nouveau, quelques mois plus tard, il m’est apparu évident qu’il faudrait beaucoup de travail pour qu’elle obtienne son contrôle technique. Involontairement, je commençais ainsi un nouveau long voyage, et cette fois j’aurai besoin de bien plus qu’une simple boîte à outils.