Octane (France)

VEYRON

Pourquoi les experts pensent qu’elle est sous-estimée

- Texte John Simister

DANS LES PAGES QUI PRÉCÈDENT, notre journalist­e semble avoir eu quelques difficulté­s à trouver ses mots. Avec la Veyron qui a devancé la Chiron, les journalist­es ont été confrontés au même problème, et c’était sans doute encore pire à l’époque car cette dernière entrait sur un territoire jamais exploré jusque-là. Aujourd’hui au moins, nous savons à peu près à quoi nous attendre avec la Chiron, qui est (ni plus ni moins) une Veyron à 110 %. Parfait si vous avez déjà conduit cette dernière, ce qui n’est pas mon cas. D’après mes collègues, pour comprendre cette voiture il faut être capable de la piloter à des vitesses stratosphé­riques. Mais ça c’est l’avis des essayeurs automobile­s et ce n’est pas forcément cela qui a poussé les acheteurs de Veyron à signer un bon de commande en 2005, pas plus qu’aujourd’hui. Aux yeux des collection­neurs de haut vol, ce qui la rend si désirable c’est qu’elle est la voiture la plus complexe, la plus technologi­que et la plus rapide au monde.

Pensez au prestige de posséder une voiture de 1 001 ch, capable de rouler à 400 km/h et coûtant plus d’un million d’euros. Tels étaient l’objectif et les symboles édictés par le grand patron d’un groupe VW en pleine mégalomani­e, Ferdinand Piëch, et sa volonté a été plus forte que les analyses de marchés.

La Veyron a tenu tous ses objectifs et bien plus encore, dont un 0 à 100 km/h en 2’’5. D’après le journalist­e Steve Sutcliffe, elle atteignait les 320 km/h au même moment qu’une Mclaren F1 qui aurait démarré dix secondes plus tôt. Son comporteme­nt était également sans reproche grâce à ses quatre roues motrices et malgré un poids proche des deux tonnes. C’est vrai que pour être capable de l’entretenir, il fallait posséder un compte en banque bien garni, mais c’était le cadet des soucis de ceux qui pouvaient se l’offrir.

Beaucoup l’ont critiquée pour sa gourmandis­e, mais le journalist­e Paul Horrell a indiqué que l’ensemble de la production n’engloutira­it sans doute pas, tout au long de son existence, le volume de carburant consommé par un Boeing 747 le temps d’un vol transatlan­tique. Une affirmatio­n impossible à vérifier, mais qui remet les choses en perspectiv­e.

LA VEYRON EST-ELLE un bon investisse­ment aujourd’hui ou son temps n’est-il pas encore venu ? Estelle seulement une “vraie” Bugatti ? (Et est-ce que cela a seulement une quelconque importance ?) Nous avons demandé à trois experts du marché de la Veyron ce qu’ils en pensent. Mais d’abord, quelques éléments historique­s pour bien comprendre de quoi on parle.

Aux côtés de la 16.4 standard lancée en 2005 (252 exemplaire­s), il existe des versions plus rapides, plus onéreuses et potentiell­ement plus excitantes, comme la Grand Sport (58 exemplaire­s), apparue 4 ans après le modèle d’origine, avec un toit amovible. Un an plus tard, en 2010, fut lancée la Super Sport (48 exemplaire­s), avec 1 200 ch et la possibilit­é de rouler à 431 km/h (si seulement un limiteur n’intervenai­t pas à 415 km/h pour préserver les pneus). Enfin, en 2011, ce moteur ultime a été associé à la carrosseri­e découvrabl­e pour créer la Grand Sport Vitesse (92 exemplaire­s). Le début de sa production a coïncidé avec la fin de celle des 16.4 et Super Sport (les deux coupés) et elle a continué aux côtés des Grand Sport standard jusqu’à la fin de la production de la Veyron, en 2015. Il y a eu de nombreuses éditions spéciales, dont 5 World Record Editions de la Super Sport, avec une carrosseri­e en fibre de carbone nue (à l’exception de sa partie inférieure et des roues peintes en orange) et sans limiteur de vitesse. C’est la plus extrême de toutes les Veyron.

Quelle que soit la Veyron, l’entretien est un poste très onéreux, et les agents Bugatti ne courent pas les rues (l’usine de Molsheim assure également cette tâche). Les tarifs Bugatti annoncent actuelleme­nt un entretien standard à 14 000 euros, un jeu de pneus à 16 000 euros tous les 5 000 à 10 000 km, et une révision complète à 49 000 euros pour recevoir le statut Bugatti Certified. Celle-ci inclut quatre roues neuves (très coûteuses), qui peuvent être nécessaire­s si l’une d’entre elles ne passe pas le test de fissures, obligatoir­e tous les quatre changement­s de pneus. La consommati­on d’essence moyenne d’environ 20 l/100 km peut également venir rapidement à bout de votre carte platinium.

NOTRE PREMIER TÉMOIN est Carl Hartley, marchand indépendan­t de supercars basé en Angleterre, qui roule en Veyron depuis 18 mois. « Je dois avouer que c’est la voiture la plus sous-estimée au monde, indique-t-il, même si les prix ont grimpé de 40 % ces deux dernières années. À un moment le tarif était entre 650 et 750 000 euros, mais aujourd’hui on est à 1,3-1,4 million d’euros. Rappelez-vous qu’une Chiron vaut le double, voir plus quand les premiers modèles changeront de mains, ce qui va encore faire monter la valeur de la Veyron. »

Une Veyron vaut donc aujourd’hui un peu plus que le prix du neuf des premiers exemplaire­s en 2005. « Dans le futur, on les considérer­a de la même façon que les Mclaren F1 aujourd’hui, indique Hartley. C’est un investisse­ment fantastiqu­e, aussi bien à court qu’à long terme et le monde doit la considérer comme une vraie Bugatti. »

Votre argent est donc en sécurité et c’est un investisse­ment que l’on peut également utiliser. « Tant que l’on n’en possède pas et n’en conduit pas une, on ne réalise pas à quel point la Veyron est facile et fiable, particuliè­rement à cause de toute cette technologi­e. Elle n’est pas assez ancienne pour être appréciée à sa juste valeur, mais cela a commencé à changer ces trois dernières années. » Hartley signale un autre problème, celui que les obsédés de voitures classiques tendent à ignorer. « Les voitures classiques ne sont pas aussi fiables que les modernes et les

“Je dois avouer que c’est la voiture la plus sous-estimée au monde, même si les prix ont grimpé de 40 % ces deux dernières années” – Carl Hartley

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