Octane (France)

EB110

Le chaînon manquant ?

- Texte Glen Waddington Photo Paul Harmer

LA PLUS RAPIDE, la plus avancée et la plus chère voiture au monde ? Ça n’a rien de nouveau. Oui, à 2,4 millions d’euros et avec 1 500 ch, elle explose les 1 001 ch de la première Veyron. Mais si l’entreprise qui a développé la Veyron à la demande spéciale de Ferdinand Piëch était, mis à part son nom, toute neuve, elle reprend une histoire bien plus récente que la chute de Automobile­s Ettore Bugatti.

Cette dernière a été fondée en 1909 et a assemblé des légendes telles que la Type 35 de Grand Prix et la Type 41 Royale, mais son sort fut scellé lors du décès d’ettore en 1947, et elle périclita jusqu’à être absorbée en 1963 par Hispano-suiza, intéressé par son activité aéronautiq­ue. Il manque encore un maillon dans la chaîne. Entre 1963 et la relance par le groupe VW en 1998 (la Veyron arrivera cinq ans plus tard), Bugatti Automobili a fait surface en 1987 pour huit brèves (mais intenses) années, sous la direction de Romano Artioli, premier distribute­ur Ferrari en Europe et collection­neur Bugatti.

Sa genèse est digne d’hollywood. Artioli a rencontré Ferruccio Lamborghin­i au Salon de Turin 1986 et ils ont évoqué ensemble la création d’une hypercar digne du blason mythique. Artioli rachète le nom au géant français de l’aéronautiq­ue SNECMA, puis, Lamborghin­i décédé, assemble une usine ultramoder­ne près de Modène et lance le développem­ent de L’EB110. Elle est dévoilée en 1991, exactement cent dix ans après la naissance d’ettore Bugatti. Elle est dessinée par Marcello Gandini, le père de la Miura et de la Countach, et conçue par Nicola Materazzi, un nom qui gagne à être connu : parmi ses réalisatio­ns, on compte la Lancia Stratos et les Ferrari Testarossa, 288 GTO et F40. Sa recette ? Une baignoire en carbone, un V12 à 60 soupapes et QUATRE turbos développan­t 560 ch, ainsi qu’une transmissi­on à 6 rapports et 4 roues motrices. Il n’existait alors rien d’aussi extrême jusqu’à la présentati­on de la Mclaren F1, un an plus tard. En attendant, c’était la voiture la plus rapide au monde, avec une vitesse de 342 km/h. Un moteur central avec beaucoup de cylindres, 4 turbos, du carbone et 4 roues motrices, voilà qui doit sembler familier aux propriétai­res de Veyron et de Chiron.

La EB110 est presque aussi rare que la F1. Alors que l’économie européenne se met au ralenti, seules 102 EB110 GT et 38 Supersport quittent la spectacula­ire usine dessinée par Giampaolo Benedini. Certains ont critiqué le style qui respirait plus Sant’agata que l’alsace (Benedini a même posé ses mains d’architecte sur son design, après qu’artioli s’est fâché avec Gandini, juste avant le lancement), mais en réalité il n’y avait alors juste pas assez de gens fortunés sur la planète pour se l’offrir. Et un an plus tard, 106 d’entre eux avouèrent leur préférence pour la Mclaren, plus légère et plus pure

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