Matthieu Lamoure, Derek Bell & Patrick Le Quément
Le spécialiste
Sortez de vos bureaux, aérez-vous et vivez votre passion de l’automobile à fond ! Évidemment il faut du temps. Entre la famille, les amis, le boulot, les problèmes… À un certain moment de la vie, tout cela devient compliqué à gérer et demande des sacrifices, quelques efforts et de l’insistance. Toujours de l’insistance. Malgré mon job passionnant, je ne fais pas exception à la règle et il est parfois difficile d’être sur tous les fronts, en contentant les uns, les unes (je fais allusion à ma femme et mes filles, vous l’aurez compris), les autres et soi-même. Malgré tout, cette année, devant la proposition alléchante de mon ami Jean-marc, je n’ai pu résister : je participe aux Mille Miglia ! Un rêve de gamin, tout simplement. L’histoire de cette course folle m’a toujours époustouflé. Jusqu’en 1957, il s’agissait de rallier Brescia à Rome et retour à Brescia, soit un peu plus de 1 600 km (1 000 miles) par les petites routes (ouvertes) italiennes, à fond les ballons et sans étape ! Une sorte de Gumball délirant, à une époque où les limitations de vitesse n’existaient pas sur des routes dont la qualité du bitume ne ressemblait en rien à ce que nous connaissons aujourd’hui. De 1927 à 1957, les plus grands pilotes se sont battus pour la victoire, au volant des voitures d’endurance des plus grandes marques. On y a vu le meilleur comme le pire (vous pouvez vous en douter, à de telles vitesses…). L’épreuve de 1955 est remportée par Stirling Moss et le journaliste Denis Jenkinson en copilote, en un temps record, inégalé à ce jour, de 10heures 7 minutes et 48 secondes, à la vitesse moyenne de 160 km/h sur une Mercedes Benz 300 SLR. À l’exception de l’édition de 1931, et de 1940 où des équipages allemands remportent la victoire, il s’agit de la seule année où celle-ci n’a pas été arrachée par un équipage italien. En 1957, cette course mythique est arrêtée, ou du moins utilisera de nouvelles règles jusqu’en 1961, à cause de l’accident mortel d’alfonso de Portago et de son copilote, qui entraîna la mort de neuf spectateurs. Il pilotait la Ferrari 335 S, soeur de celle vendue à un prix record du monde l’année dernière à Rétromobile, arrivée, elle, deuxième à Brescia. Cette course est devenue mythique pour tous les passionnés, les collectionneurs bien entendu, mais surtout pour toute la population italienne, si férue de belles mécaniques. Participez aux Mille Miglia et vous comprendrez que l’italie est la nation de l’automobile ! Son histoire a toujours été adossée au sport mécanique, Alfa Romeo et Ferrari ayant remporté toutes les victoires dans l’épreuve, à l’exception de deux éditions ! On se rend compte de l’engouement populaire dès le départ de Brescia où la foule se retrouve pour assister au spectacle unique des 450 équipages engagés cette année. La voiture franchit le podium et le chrono est déclenché. 1 600 km de route nous attendent au sein de l’habitacle si restreint d’une Aston Martin Ulster 1934 ! Que va-t-il nous arriver ? Va-t-on tomber en panne ? Parviendra-t-on à terminer la course ? Toutes ces questions auxquelles on pense s’évanouissent dès les premiers tours de roues où la concentration se fait, sur la route pour l’un, sur le road-book pour l’autre, tout en essayant de ne pas se brûler le bras sur l’échappement qui court le long de la caisse, à quelques centimètres du copilote !
Voici le programme : premier jour 8 heures de route, le deuxième 15 heures, le troisième de nouveau 15 heures et le dimanche jusqu’au retour à Brescia, 8 heures. Vous revenez lessivé mais heureux, après avoir vécu un déluge à l’arrivée de la majestueuse Rome, des zigzags glissant et gras dans les montagnes, mais surtout de merveilleuses routes aux paysages italiens inimitables. L’encouragement permanent vient de ce public fou de bagnoles, toutes générations confondues, prenant des risques pour attraper un cliché au détour d’un virage, nous acclamant à chaque traversée de village. Évidemment, votre serviteur, porté par la foule, n’a pu s’empêcher de lancer quelques notes d’opéra à chaque étape. De O sole Mio à La donna e mobile, tout mon répertoire italien y est passé. Plus je chantais, plus l’aston performait ! Enfin, c’est ce que j’ai tenté de faire croire à mon pauvre coéquipier, Jean-marc, revenu sourd de cette folle aventure, non pas à cause du bruit du moteur mais à cause du Caruso de pacotille que je suis ! On y retourne l’année prochaine ?
“PARTICIPEZ AUX MILLE MIGLIA ET VOUS COMPRENDREZ QUE L’ITALIE EST LA NATION DE L’AUTOMOBILE !”