Amphion Argon 3S
Directement dérivée du modèle professionnel One18, une enceinte «monitoring» très appréciée chez les pros, la nouvelle enceinte de bibliothèque Amphion Argon 3S reprend le concept d’un haut-parleur passif en lieu et place de l’évent bass-reflex des ancien
La marque finlandaise Amphion est encore discrète et pourtant sa notoriété s’étend de plus en plus dans le milieu professionnel. Que ce soient des studios d’enregistrement, de mixage ou même pour certains compositeurs de musique, les enceintes Amphion séduisent par une restitution très naturelle mais aussi par leur aptitude à être écoutées des heures durant sans fatigue ou lassitude.
Adieu le bass-reflex, vive le radiateur passif
Sur les enceintes Anphion Argon un gros travail a été effectué sur la charge du haut-parleur de médium/grave. Après de nombreux essais et mises au point, l’évent bass-reflex fait place aujourd’hui à un transducteur passif placé à l’arrière de l’enceinte. Comment cela fonctionne-t’il ? Un transducteur passif (ou radiateur passif) est un haut-parleur sans sa partie moteur, il est composé uniquement d’un châssis, d’une membrane et de ses suspensions. Il ne peut donc pas être utilisé seul, puisqu’il est incapable de vibrer seul. Il doit être entrainé par un haut-parleur actif, disposé en face avant dans notre cas. Ce dernier produit donc des pressions et dépressions d’air à l’intérieur de la caisse, elles vont entrainer les mouvements en piston de ce radiateur passif qui jouera exactement le même rôle qu’un évent mais en plus performant. Cette technique présente l’avantage d‘abaisser le taux de distorsions tout en apportant une bande
passante plus large : les effets recherchés par Anssi Hyvönen le concepteur des enceintes Amphion.
Les principes acoustiques Amphion
Ainsi sur les enceintes Argon 3S, nous trouvons à l’arrière un transducteur de 16.5 cm passif à membrane en aluminium, la même qui équipe le haut-parleur actif de devant. En dehors de cette nouvelle technique de charge, les Argon 3S ne diffèrent pas fondamentalement de leurs prédécesseurs. Le coffret est toujours formé par des parois en MDF haute densité de 3 cm d’épaisseur. En les regardant de près, on s’aperçoit qu’il s’agit d’un assemblage de trois plaques d’un centimètre d’épaisseur chacune collées ensemble sous haute pression. La rigidité de l’ensemble est totale. A l’intérieur, nous découvrons une plaque supplémentaire à orifice multi-trous juste derrière le haut-parleur médium/grave. Suivant les informations données par Anssi Hyvönen en personne, son rôle n’est pas seulement de rigidifier le coffret mais de contrôler les flux d’air internes et ce, suite à des calculs menés par la section R&D d’une grande Université située en Suisse. Sur la face avant, nous retrouvons un tweeter avec un dôme en titane d’origine SEAS mais modifié pour Amphion. Ce transducteur est au centre d’un guide d’ondes (ou pavillon) de même diamètre que le haut-parleur de médium/grave, une pièce fabriquée également en MDF. Elle permet une mise en phase verticale avec le centre du haut-parleur de médium/grave comme de pouvoir faire travailler le tweeter à des fréquences très basses. Juste en dessous et parfaitement dans l’axe, nous avons le haut-parleur de médium/grave de 16,5 cm de diamètre à membrane aluminium et suspension souple en demi-rouleau. Son châssis en métal injecté comme la bobine en aluminium de 26 mm de diamètre et son circuit magnétique de très forte capacité sont une promesse à des transitoires extrêmement rapides comme une tenue en puissance sans faille. Ce haut-parleur est également d’origine SEAS, venant de la série Prestige de ce fabricant Norvégien mais adapté spécialement pour les enceintes Amphion.
Une directivité contrôlée
Enfin, nous en arrivons à la technique U.D.D. pour «Uniformly Directive Diffusion», un principe propre à Amphion portant sur l’incidence de la pièce d’écoute et le résultat final dans un salon. Tout d’abord, la fréquence de coupure entre les deux transducteurs actifs est fixée à 1600 Hz, ce qui très bas par rapport à ce qui est fait par d’autres constructeurs (environ 3 khz). Cette zone de recouvrement n’a pas été choisie par hasard. Elle se situe en dessous de celles où l’oreille sera la plus sensible aux problèmes de phase ou de variations de niveau par exemple. Ensuite un gros travail a été fait pour que les deux transducteurs actifs se marient au mieux malgré cette fréquence de coupure très basse. Et c’est là que l’adoption d’un guide d’onde pour le tweeter, un pavillon qui a le même diamètre que le hautparleur de médium/grave, va jouer tout son rôle et permettre une parfaite mise en phase des deux transducteur. Le filtre a été à son tour conçu spécialement pour cette mise en oeuvre. Ses borniers sont d’origine Argento Audio Il ne comprend que des bobines à air et de condensateurs jaunes estampillés Amphion et d’un très haut niveau de qualité. Grâce à ce montage particulier, l’incidence de la pièce d’écoute serait beaucoup moindre qu’avec des enceintes plus traditionnelles.
Les Amphion Argon 3S à l’écoute : une vraie promesse de plaisir tenue
La mise en place des Argons 3S s’est effectuée avec une facilité déconcertante comme nous le supposions avec les principes acoustiques de ces enceintes. Posées sur des pieds, certes lourds et inertes, il n’a pas fallu beaucoup de temps pour obtenir une image stéréo crédible et une qualité de timbre empreinte d’une très belle justesse. En
revanche, le rendement somme toute un peu faible ou moyen (87 db) demande un amplificateur un peu musclé si l’on veut atteindre des niveaux sonores élevés dans une pièce de belles dimensions. A l’écoute, ces Argons 3S se révèlent rapidement comme étant des enceintes «phasées», c’est-àdire avec une excellente linéarité de la bande passante et surtout une totale absence de son typé. Le rendu sonore est extrêmement cohérent et joue avec un naturel qui n’est pas sans nous faire penser par exemple à des Acoustics Energy REF1 ou encore des Grand Cru Essentiel. Cette absence de son de caisse fait rentrer ces Argon 3S dans le camp des transducteurs parfaitement maîtrisés et soucieux du vrai caractère de chaque instrument. Même constatation avec les éléments placés en amont, les Argons 3S en dévoilent les plus subtiles différences, ce qui dénote un caractère transparent et dépourvu de colorations. De plus, elles offrent une scène sonore très réaliste avec un rendu holographique remarquable. Cette vraie transparence s’accompagne donc d’une belle densité sonore : deux qualités qui ensembles offrent une écoute vivante et d’une belle assise. Le haut du spectre est fourni mais empreint d’une douceur et d’une matérialité qui sont les signatures sonores des Amphion. Le son coule de source avec une très belle limpidité et clarté mais sans jamais devenir crispant ou excessif. Le médium, lui aussi, est d’une très belle facture comme nous le prouve l’écoute du SACD des oeuvres de W.A Mozart et M. Haydn jouées par Rachel Podger au violon et Jane Rogers au violon alto. Les timbres de ces deux instruments sont réellement magnifiques : un doux mélange de boisé et de mordant que les Argons 3S s’évertuent à nous restituer avec une exactitude remarquable. La différence de tessiture de ces deux instruments à cordes frottées est formellement reconnaissable même lors de passages complexes. Nous ressentons bien la ligne mélodique différenciée de chacun de ces deux instruments comme le jeu plus ou moins appuyé de chacune de ces deux musiciennes. Comme dit plus haut, l’image stéréophonique est très crédible avec un placement de chaque instrument parfaitement calculé dans un espace sonore bien rempli. Les timbres sont justes avec des attaques de notes bien restituées. Le côté Monitoring des Amphion et leur capacité naturelle de retranscrire les moindres détails est un voyage très personnel dans ces oeuvres. Puis sur l’excellent vinyle «Transformer» de Lou Reed et son fameux morceau «Walk on the Wild Side», la ligne mélodique de la contrebasse d’herbie Flowers doublée d’une basse électrique est parfaitement soutenue par les Amphion Argons 3S. Certes, nous avons affaire ici à des enceintes de format bibliothèque, le niveau dans le bas ne pourra jamais se comparer avec celui de grosses colonnes, mais à défaut de descendre très bas, ces enceintes ont une souplesse et une légèreté dans ce registre qui font rapidement oublier leur limitation naturelle. La voix de Lou Reed est, par exemple, d’une parfaite exactitude. Il émane de ce chanteur pop-rock une rare émotion que soutient le léger jeu du violoniste situé en arrière-plan. Idem pour le saxophone de Ronnie Ross qui semble s’avancer vers le devant de la scène au fur et à mesure que le niveau de son instrument monte. Nous sentons bien tous les contrastes de niveau dans le jeu de ce musicien comme son phrasé. Le son est rapide, rythmé et la batterie, ramenée à l’essentiel dans ce morceau, est parfaitement bien rendue. Nous écoutons ce morceau avec l’aisance que procurent des modèles beaucoup plus onéreux tant la musicalité sonne vraie et laisse place à son âme jazzy.
Conclusion
Qu’ajouter à tout ce qui vient d’être énoncé si ce n’est que ces Amphion Argon 3S sont de petites merveilles sonores tant nous sentons qu’elles ont été conçues dans un esprit de rigueur et de neutralité qui transforme chaque écoute en un pur moment de plaisir. Certes, elles ne sont pas faites pour sonoriser de grands espaces mais, en revanche, elles ont la capacité d’apporter ce réalisme qui nous fait voyager à chaque morceau de musique entendue. Elles sauront toujours dénicher ce petit plus qui rendra les écoutes toujours variées ; une vraie promesse de plaisir.