Elle se laisse marcher sur les pieds
Prendre son tour au toboggan, emprunter un feutre, jouer à côté des autres, pour certains ça paraît très simple. Pas pour Alma. Si on la double dans la file du toboggan, si on lui prend son jouet, elle reste figée, comme sidérée. Pourtant, à la maison, Alma sait s’affirmer ! Mais lorsqu’elle est avec d’autres enfants, vous ne la reconnaissez plus. Et cela vous inquiète.
Question de tempérament
En crèche, les auxiliaires de puériculture observent des réactions d’empathie, des négociations, des contacts entre enfants, dès l’âge de 6 mois. Bien sûr, pour un enfant qui n’a pas été en collectivité jusqu’à présent, aller vers l’autre, c’est nouveau, et moins évident : « A 3 ans, l’enfant n’avance pas en terrain conquis, il a conscience de l’existence d’un autre, ressemblant et différent », explique Nour-Eddine Benzohra, pédiatre et psychiatre*. Pour peu qu’il soit enfant unique, cela complique encore les choses, en renforçant sa peur, son impression d’étrangeté face à l’autre. Mais l’éducation ne fait pas tout : il y a aussi une question de tempérament. Certains jeunes enfants s’affirment haut et fort tandis que d’autres se mettent naturellement en retrait.
Ce n’est pas une conduite à ignorer ou à prendre à la légère en arguant que, vous aussi, vous êtes plutôt timide, et que c’est un trait de caractère familial : votre enfant a besoin d’apprendre à dire non. Il doit savoir qu’il en a le droit. Engagez un jeu de rôle : vous jouez le “gêneur”, et l’encouragez à dire bien haut : « Non ! Je suis en train de jouer ! » ou « Non, je ne suis pas d’accord ! » Au square, faites des travaux pratiques : accompagnez-le récupérer son jouet et laissez-le s’exprimer.
En parler à la maîtresse
« Parfois, l’enfant n’ose pas en parler au parent, il a honte, peur de faire de la peine, observe le psychiatre. D’où l’importance d’être attentif à la mine qu’il a en sortant de l’école. En effet, dès la maternelle, des phénomènes de “tête de turc” peuvent apparaître. Il faut rester vigilant. » Questionnez-le : que s’est-il passé au juste ? La maîtresse l’a-t-elle vu ? Lui en a-t-il parlé ? Qu’est-ce qu’elle a dit ? Prenez le temps de l’écouter posément. Rappelez-lui que si on l’embête, il doit en parler à la maîtresse. Alertez-la vous-même si vous sentez chez votre enfant un malaise récurrent. Tout cela sans dramatiser, et surtout sans culpabiliser, même si vous avez le sentiment de lui avoir transmis le gène de la timidité ! « Si le parent culpabilise, cela aggrave la situation, affirme le Dr Benzohra : l’enfant ressent cette culpabilité, il se retrouve bloqué, impuissant face à un problème qui prend tout à coup une ampleur exagérée. » Pour aider votre enfant, il vous faut d’abord relativiser et dédramatiser
*Auteur de “L’art d’être des parents séparés”, Albin Michel.