0-3 ans On lui offre un bon départ
Au fil des mois, comprendre ce que ressent son enfant pour pouvoir répondre à ses besoins, l’aider à identifier et à exprimer clairement ses émotions, c’est lui offrir un excellent départ dans la vie.
L’émotion, du latin “movere”, c’est ce qui nous met en mouvement. «On considérait les émotions comme gênantes, jusqu’au XXe siècle, remarque Catherine Gueguen, pédiatre. Mais depuis l’essor des neurosciences affectives et sociales, on a compris qu’elles étaient essentielles à notre développement : elles déterminent notre façon de penser, d’agir et d’entreprendre. »
En effet, l’émotion est une réaction biologique qui se manifeste par une sensation physique et génère un comportement: elle est à la base de notre personnalité. Autant dire que les émotions ressenties par le jeune enfant sont déterminantes. Elles imprègnent sa vie future d’une couleur particulière.
Le nourrisson vit un lien fusionnel avec sa mère et s’imprègne de ses émotions. « Au moment de sa naissance, si sa mère a peur, le bébé aura très peur, explique Catherine Gueguen. Mais si elle est bien accompagnée, sereine, il le sera aussi. Il y a des enfants qui sourient à la naissance ! »
Les premiers mois, le nouveau-né commence à se différencier. Lui qui ne se sent exister qu’à travers ses sensations corporelles, est en lien étroit avec ses émotions. Il manifeste son propre ressenti. En étant attentif, on peut parvenir à le comprendre.
Loin de se cantonner aux cinq émotions principales généralement citées (peur, dégoût, joie, tristesse, colère), la palette émotionnelle de l’humain est extrêmement vaste: toute sensation correspond à une émotion. Ainsi, chez le bébé, l’inconfort, la fatigue, la faim même, sont des émotions aussi bien que la peur ou le sentiment de solitude. Pour bébé, chaque sensation a une couleur émotionnelle qu’il manifeste par des pleurs, des cris, des sourires, un mouvement, une posture, mais surtout par l’expression de son visage. Ses yeux sont le reflet de sa vie intérieure.
Tout ce que l’enfant ressent est émotion
Dès que le parent croit identifier ce que ressent son bébé, il lui faut le verbaliser sous forme de question et observer les réactions de l’enfant: « Tu te sens seul ? », « Tu veux qu’on change ta couche ? ». Attention à ne pas “plaquer” sa propre interprétation sur l’enfant, et à bien l’observer pour affiner sa perception. Son visage s’ouvre, se détend? C’est bon signe. Une fois que le parent a repéré ce qui fonctionne, lorsqu’il connaît les expressions des ressentis du tout-petit, il réagit en concordance: l’enfant se sent alors entendu, il est sécurisé. Cela prend du temps, mais c’est essentiel à son développement. En effet, les études sur l’impact des émotions menées dans le cadre des neurosciences affectives et sociales ont permis de montrer qu’un cerveau sous stress – par exemple chez un jeune enfant dont les émotions ne sont pas reconnues ni prises en compte, mais à qui on dit « arrête ces caprices ! » – produit du cortisol, une hormone qui bloque le développement de plusieurs zones du cerveau, notamment le cortex préfrontal, siège de la prise de décision et de l’action, et l’amygdale, centre de traitement des émotions. À l’inverse, une attitude empathique stimule le développement de toute la matière grise, augmente le volume de l’hippocampe, zone essentielle aux apprentissages, et génère chez le tout-petit la production d’ocytocine, hormone qui va l’aider à gérer ses propres émotions et à développer ses compétences sociales en étant connecté aux émotions de ceux qui l’entourent. L’empathie vis-à-vis de l’enfant favorise le développement de son cerveau et lui permet d’acquérir les bases de la connaissance de soi qui fera de lui un adulte équilibré.
«Chez les 0-3 les émotions sont ans, le seul moyen d’exprimer un ressenti corporel, des besoins et des pensées, le fait qu’elles soient aussi présente set d’où envahissantes àcette période de la vie. Des mots apaisants, des bercements dans les bras, un massage abdominal, libèrent facilement ces émotions…» Anne-Laure Benattar
Il apprend à se connaître
En grandissant, l’enfant sera capable d’associer à ses ressentis des pensées et du langage. Si son vécu émotionnel a été pris en compte dès ses premiers jours, s’il a entendu l’adulte mettre des mots sur ce qu’il ressent, il saura le faire à son tour. C’est ainsi que dès 2 ans, le tout-petit peut dire s’il se sent triste, inquiet ou en colère… Un atout considérable pour se faire comprendre ! On a tendance à n’envisager que les émotions “désagréables”. Prenons l’habitude de verbaliser aussi celles qui sont agréables! Ainsi, plus un enfant aura entendu ses parents dire: «Je te trouve joyeux / amusé / satisfait / curieux / content / enthousiaste / espiègle / dynamique / intéressé / etc. » (ne lésinons pas sur le vocabulaire!), plus il sera à même de reproduire plus tard ces couleurs variées sur sa propre palette émotionnelle.
Lorsqu’on tient compte de ce qu’il ressent sans jugement ni agacement, le bébé se sent confiant. Si on l’aide à verbaliser ses émotions, il saura le faire très tôt, ce qui l’aidera à s’épanouir. En revanche, ce n’est pas avant 6-7 ans – ce fameux âge de raison ! – qu’il apprendra à gérer ses émotions (à se calmer ou se rassurer lui-même, par exemple). D’ici là, il a besoin de votre aide pour gérer frustrations et colères…