Le billet de Julien Blanc-Gras Comment le papa… galère à la fête de l’école
TRIBU/Le MA La promesse d’un beau moment, avec des enfants heureux et des parents attendris. J’avais même accepté de tenir le stand du chamboule-tout. Oh, le grand naïf.
La cour de récréation,
d’ordinaire peuplée d’une trentaine de bambins jouant tranquillement, est désormais le théâtre d’une émeute où s’agitent deux cents gamins ivres de joie et d’excitation dans un boucan abominable.
Je ne peux plus reculer
D’autant que je suis seul avec mon fils, sa mère étant en déplacement professionnel ce jour-là. Je ne suis pas venu les mains vides. Comme je suis un papa, je suis passé cinq minutes avant au Franprix pour acheter un paquet de biscuits et une bouteille de jus de pomme. Je me sens penaud face aux mamans qui ont tout calculé depuis une semaine pour concocter des gâteaux de compétition et des salades de fruits en brochettes qui se retrouvent rapidement sous forme de taches indélébiles sur les vêtements des gosses. Je m’installe derrière le stand du chamboule-tout et une vague d’enfants se précipite dans ma direction en poussant des cris à glacer le sang ( j’exagère mais on n’est pas loin d’une scène de bataille de
Distribuer les balles
Ramasser les boîtes de conserve. Faire la police avec les mômes qui se fritent. Non, Arthur c’est pas à toi. Souleymane, tu es trop près de la cible. Attention, Nakoan ! Arthur, faut te le dire combien de fois ? Quoi, mais pourquoi tu me parles de Spiderman ?
Une mère de famille qui connaît la chanson (elle a au moins trois ou quatre fêtes de fin d’année à son actif ) passe en me demandant : ça va, tu tiens le choc ? Moyennement, pour être honnête.
Je suis submergé. Mon fils me tire par la jambe. Il est jaloux parce que je m’occupe des autres enfants. Non, coco, je ne peux pas venir avec toi à la pêche aux canards, il faut que je rampe pour ramasser les balles égarées sous les tables. Mon fils se roule par terre en pleurant. Non Marius, c’est le tour de Lana. Oui Lucas, je sais que Spiderman a un costume rouge et bleu. Mon fils réclame sa mère. J’avoue qu’à ce moment précis, j’ai moi aussi envie d’appeler la mienne.
Un instituteur monte sur l’estrade et s’empare d’un micro:
Et maintenant, nous allons tous ensemble, parents et enfants, faire la ronde des musiciens.
C’est quoi cette embrouille?
Personne ne m’a prévenu. Je tente de m’esquiver en bifurquant vers l’activité course en sac, trop tard, je suis embarqué par la foule dans le happening géant. C’est ainsi que je me retrouve à faire la ronde et à jouer du air-accordéon autour d’un toboggan avec des morceaux de banane écrasés sur ma chemise, ce qui à mon âge constitue clairement une atteinte à la dignité humaine.