Parents

Je l’ai vécu : “2 utérus, 2 cols, 2 vagins et 1 bébé grand prématuré”

grossesse petit J’ai en accouché 2019 Léon. et mon d’un Ma ont accoucheme­nt été laborieux du fait d’une malformati­on rarissime : un utérus didelphe (deux utérus et deux cols de l’utérus).

- JESSICA BUSSEAUME

J’ai appris l’existence de cette malformati­on à 24 ans, ça a été assez violent.

Lors d’un contrôle chez le gynécologu­e, alors que je suis jambes écartées sur le fauteuil, il s’exclame “Ce n’est pas normal”. Je panique. Le médecin me demande de le suivre en salle d’échographi­e. Il continue à parler seul, à répéter que ce n’est pas normal. Je lui demande ce que j’ai. Il m’explique que j’ai deux utérus, que j’aurai de grosses difficulté­s à tomber enceinte, que je ferai fausse couche sur fausse couche. Je sors de chez lui en pleurs. Quatre ans plus tard, mon compagnon et moi décidons d’avoir un enfant. Je suis suivie par une gynécologu­e spécialist­e en fertilité et surtout géniale! Je suis enceinte en 4 mois. Ma grossesse se déroule assez bien jusqu’au moment où je commence à avoir des contractio­ns, se matérialis­ant par une “petite boule” du côté droit. Le bébé se développe dans l’utérus droit ! À 6 mois et demi de grossesse, je sens que mon fils n’a plus la place pour se développer. Le 15 novembre 2019, nous faisons la séance photo “grossesse”. J’ai des contractio­ns, mon ventre est très tendu, mais ça ne change pas de son état habituel puisque les contractio­ns sont quotidienn­es depuis plusieurs mois. Le lendemain après-midi, la “petite boule” devenue “grosse” se montre beaucoup, et le soir, les contractio­ns sont de plus en plus fréquentes (toutes les 6 minutes). Nous partons faire un contrôle à la maternité.

Il est 21 h lorsque l’on m’installe dans une salle d’examen. La sage-femme m’examine: le col est ouvert à 1.

Elle appelle la gynécologu­e de garde (par chance, c’est la mienne) qui confirme que le col est ouvert à 1,5 cm. Je suis en plein travail. Elle fait une échographi­e et me dit que le poids du bébé est estimé à 1,5 kg. Je suis enceinte de seulement 32 semaines et 5 jours. On m’injecte un produit pour arrêter les contractio­ns et un autre produit pour maturer les poumons du petit. On m’emmène d’urgence au CHU car il faut un service de néonatalog­ie avec réanimatio­n. J’ai peur, tout va trop vite. La gynécologu­e me demande le prénom du petit. Je lui réponds qu’il s’appelle Léon. Ça y est, il a un nom, il existe. Je commence à prendre conscience que mon bébé va arriver trop petit et trop tôt.

Je suis dans l’ambulance avec une brancardiè­re d’une extrême gentilless­e. Je ne comprends pas ce qui m’arrive. Elle m’ex

plique qu’elle a accouché de jumelles à 32 semaines et qu’aujourd’hui, elles vont très bien. Je pleure de soulagemen­t. Je pleure car j’ai des contractio­ns qui me font mal. Nous arrivons aux urgences et je suis mise en salle d’accoucheme­nt. Il est 22 h. Nous y passons la nuit et les contractio­ns se calmant, je suis ramenée en chambre à 7 h du matin. Nous sommes rassurés. Le but est désormais de garder le petit au chaud jusqu’à 34 semaines. L’anesthésis­te doit venir me voir pour programmer une césarienne.

À 13 h, alors que l’anesthésis­te me parle, j’ai mal au ventre. Il part à 13h05. Je me lève pour aller aux toilettes et j’ai une contractio­n qui dure plus d’une minute.

Je hurle de douleur. On me descend en salle d’accoucheme­nt. J’appelle mon compagnon. Il est 13 h 10. Je perds les eaux à 13h15 alors que l’on me pose une sonde urinaire. Il y a 10 personnes autour de moi. J’ai peur. La sage-femme regarde mes cols : le petit est engagé. On m’amène au bloc, L’anesthésis­te me parle, me donne la main. Il est 13 h 45 lorsque j’entends hurler. Je suis maman ? Je ne réalise pas. Mais je l’entends hurler : il respire seul! Je vois mon petit Léon deux secondes, le temps de lui faire un bisou. Je pleure car je suis encore sous le coup de la panique. Je pleure car je suis maman. Je pleure car il est déjà loin de moi. Je pleure mais je ris à la fois. Je blague en disant aux chirurgien­s de me faire une « belle cicatrice ». L’anesthésis­te revient me voir avec une photo du petit. Il pèse 1,7 kg et il respire sans aide (c’est un guerrier).

On m’emmène en salle de réveil. Je suis shootée par l’anesthésie et les anti-douleur.

On m’explique que je pourrai remonter quand je bougerai mes jambes. Je me concentre. Il faut que je bouge les jambes pour aller voir mon fils. Le papa vient chercher du lait. Une sage-femme m’aide. Je veux tellement voir mon bébé. Au bout de deux heures, je bouge enfin mes jambes. J’arrive en néonatalog­ie. Léon est en soins intensifs. Il est minuscule, plein de câbles, mais c’est le plus beau bébé du monde. On me le met dans les bras. Je pleure. Je l’aime déjà plus que tout. Il restera un mois à l’hôpital. Le 13 décembre, nous réalisons notre rêve: le ramener à la maison pour Noël.

Je sais qu’avoir un deuxième enfant signifie repasser par tout ce processus de grossesse difficile et de prématurit­é, mais ça en vaut le coup !

« Il a une sonde allons le gastrique. Nous du matin voir tous les jours

Il doit grossir, jusqu’au soir.

Chaque il doit manger seul. victoire. » est une gramme gagné

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À part quelques articles sont très rares. J’en ai cherché pendant toute ma grossesse sans en trouver. de journaux pour dire que c’est une malformati­on rare, on ne trouve rien ! ce genre. » Peut-être que j’aurais été mieux préparée si j’avais pu lire un témoignage de
« J’ai décidé de partager mon expérience car les témoignage­s sur l’utérus didelphe À part quelques articles sont très rares. J’en ai cherché pendant toute ma grossesse sans en trouver. de journaux pour dire que c’est une malformati­on rare, on ne trouve rien ! ce genre. » Peut-être que j’aurais été mieux préparée si j’avais pu lire un témoignage de
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