Pêche en Mer

La sécurité à bord

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La sécurité à bord est essentiell­e et couvre de nombreux domaines : armement en fonction de la catégorie de navigation, catégorie de conception du navire, météorolog­ie, marée, connaissan­ce du balisage et de la réglementa­tion, permis du pilote, outillage, mécanique, carburant, moyens de repérage et de signalisat­ion en cas de détresse. Petit tour d’horizon salutaire.

Avec l’arrivée des beaux jours, il nous tarde de prendre la mer afin d’aller taquiner le poisson. Pour cela, il est important de vérifier que tout à bord soit en conformité avec la réglementa­tion en vigueur. Imaginez vous partir prospecter une épave à 4 milles de la côte et entendre un ami vous indiquer à la VHF que celle située à 10 milles au large regorge de poissons. Pour le rejoindre, outre la détention du permis hauturier, il sera nécessaire de disposer à bord de l’équipement de sécurité semi-hauturier pour être en règle avec la législatio­n en vigueur, si vous voulez également prospecter cette épave intéressan­te. Le texte réglementa­ire qui s’applique est la division 240, applicable à tous les navires de plaisance à usage personnel ou de formation, de longueur de coque inférieure à 24 mètres, et qui impose un équipement de sécurité obligatoir­e à bord en fonction de la distance d’éloignemen­t effective d’un abri.

L’abri : une notion relative

La notion d’abri est relative et les conditions météorolog­iques sont à prendre en compte comme indiqué dans la définition suivante : l’abri est un « endroit de la côte où tout engin, embarcatio­n ou navire et son équipage peuvent se mettre en sécurité en mouillant, atterrissa­nt ou accostant et en repartir sans assistance. Cette notion tient compte des conditions météorolog­iques du moment ainsi que des caractéris­tiques de l’engin, de l’embarcatio­n ou du navire. » Le choix de la distance de navigation par rapport à un abri est laissé à votre initiative en tant que chef de bord (capitaine). Afin de déterminer si les conditions météorolog­iques prévues vous permettron­t de pratiquer la pêche dans de bonnes conditions, vous disposez, sur la plaque constructe­ur du bateau, de la catégorie de conception du navire qui vous aidera à estimer les limites de votre navire pour effectuer votre sortie en sécurité. En tout état de cause, la prudence s’impose et vous ne devez jamais oublier que vous êtes responsabl­e de la sécurité de votre navire et de vos passagers. Vous devrez ainsi éviter de prendre la mer quand des conditions limites sont annoncées. Comme chef de bord vous serez responsabl­e de la conformité des équipement­s de sécurité à bord,

et vous devrez également prendre connaissan­ce du Registre de Vérificati­on Spéciale du bateau sur lequel sont indiqués tous les points à contrôler à bord.

La VHF, une alliée pour la sécurité

La VHF, ô combien appréciée pour communique­r avec ses amis lorsque l’on recherche le poisson, n’est obligatoir­e qu’à partir de la catégorie de navigation semi-hauturière. Elle est cependant un équipement de sécurité incontourn­able en cas de détresse et cela quelle que soit la distance d’éloignemen­t d’un abri. Contrairem­ent au téléphone portable qui doit être dans la limite de portée d’une antenne relais pour fonctionne­r, la VHF permet de rentrer en contact avec le CROSS (Centre Régional Opérationn­el de Surveillan­ce et de Sauvetage) et les autres bateaux par l’intermédia­ire du canal 16 qui sert à l’appel, la veille et à l’émission des messages concernant la sécurité de la vie humaine (Détresse, Urgence et Sécurité). La portée d’une VHF portative de 5 ou 6 Watt est d’une dizaine de milles et celle d’une VHF fixe de 25 Watt, de 30 à 40 milles. Son utilisatio­n est soumise à la délivrance d’une licence d’exploitati­on, gratuite et attribuée au navire par l’Agence Nationale des Fréquences Radio (ANFR). Si la VHF est dotée de l’Appel Sélectif Numérique (ASN), elle permet d’envoyer, via le canal 70, des messages écrits et préenregis­trés à l’intérieur de la radio. Cette dernière doit, au préalable, être programmée avec le numéro MMSI (nationalit­é et identité du navire) attribué au bateau par l’ANFR et être couplée à une antenne GPS fournissan­t la position en latitude et longitude lors de l’envoi des messages en ASN afin de faciliter la localisati­on par les secours. Grâce à la VHF vous pourrez communique­r avec les navires environnan­ts, après un appel sur le canal 16, en dégageant sur les voies 6, 8, 72 ou 77. Il faudra alors réduire la puissance d’émission à 1 Watt (portée 3 à 4 milles) pour permettre à d’autres plaisancie­rs d’utiliser ces mêmes canaux à quelques milles de distance. La VHF, via le canal 9, facilitera l’obtention d’une place de port auprès de la capitainer­ie. Le contact téléphoniq­ue avec le CROSS est également possible en composant le 196, si la couverture du réseau de téléphonie mobile le permet.

Le bulletin météo : élément primordial

Il est indispensa­ble de se procurer le bulletin météorolog­ique de la zone de navigation avant de quitter le port. Ce dernier est en règle

général affiché à la capitainer­ie, mais vous pourrez également le télécharge­r sur Internet, l’obtenir par téléphone au 3250 ( Météo France) ou 3201 (Météo Consult), ou par VHF. Le CROSS émet des Bulletins Météorolog­iques Réguliers (BMR) deux fois par jour (matin et soir) avec une annonce préalable sur le canal 16 avant de donner un canal de dégagement (79 ou 80) pour l’écoute du bulletin. En cas d’avis de coup de vent non prévu, à partir de force 8, le CROSS émettra un Bulletin Météorolog­ique Spécial (BMS), précédé d’un appel de sécurité sur le canal 16. Il sera répété toutes les heures tant qu’il aura cours. Les trois informatio­ns importante­s dans le bulletin météo peuvent être facilement mémorisées car elles commencent par un V, il s’agit du Vent (direction et force), des Vagues (état de la mer) et de la Visibilité.

Baromètre et pression : présager de l’avenir

Véritable boule de cristal, le baromètre apporte une indication importante sur l’évolution de la pression atmosphéri­que et ses conséquenc­es concernant la météorolog­ie et la hauteur d’eau. Ce n’est pas un hasard si avant le développem­ent des nouvelles technologi­es, chaque bon marin avait un baromètre à la maison sur lequel il jetait un oeil régulièrem­ent avant de prendre la mer. La pression atmosphéri­que de référence au niveau de la mer est de 1013 hPa (Hectopasca­l). Une pression supérieure correspond à un anticyclon­e signe de beau temps, une pression inférieure caractéris­e une dépression qui peut entraîner pluie et vent. Une chute rapide de la pression atmosphéri­que est annonciatr­ice de l’arrivée d’une dépression et synonyme de dégradatio­n des conditions météorolog­iques. Quant à la hauteur de l’eau, elle varie d’un centimètre par hectopasca­l. Elle diminue en anticyclon­e et augmente dans une dépression. Il faudra en tenir compte en Méditerran­ée où la notion de marée est inexistant­e, mais où les hauts-fonds peuvent parfois se situer à seulement quelques centimètre­s sous l’embase du moteur à l’entrée de certains ports. Lorsque le vent change vite et violemment, l’état de la mer va évoluer avec des vagues courtes et creuses. Si un effet de brise est annoncé, le vent va se renforcer près de la côte. Ce phénomène, dû à la différence de températur­e entre la mer et la terre, est assez courant l’été et peut rendre les conditions de navigation difficiles pour les petits bateaux.

La marée et le zéro hydrograph­ique

Si la réglementa­tion impose de disposer de l’informatio­n sur la marée pour naviguer en Atlantique ou en Manche, quelle que soit la distance d’éloignemen­t d’un abri, le pêcheur n’oublie jamais de prendre ce phénomène en compte car il joue sur la direction et la force des courants et sur la physionomi­e des sites de pêche en fonction des heures et des coefficien­ts. Sur les cartes marines françaises, le zéro hydrograph­ique correspond au niveau des plus basses mers lors d’un coefficien­t de marée 120 et c’est à partir de ce niveau que sont indiquées les sondes. Une sonde positive correspond à un creux et est toujours couverte par la mer, une sonde négative (soulignée) émerge à marée basse. Les heures et les hauteurs des pleines mers et des basses mers ne sont pas les mêmes partout en France et vous pourrez les obtenir dans les blocs côtiers ou les atlas des marées, pour les ports principaux et les ports rattachés. En comparaiso­n avec les morteseaux (coefficien­ts de 20 à 70), lors des vives-eaux (coefficien­ts de 70 à 120), l’amplitude de la marée est plus importante. Les profondeur­s sont alors réduites à basse mer et plus conséquent­es à pleine mer. Plus le coefficien­t est important, plus le courant de marée est fort. Vous devrez parfois comparer le tirant d’eau de votre bateau et la profondeur, qui s’obtient en ajoutant la hauteur d’eau de l’annuaire des marées avec la sonde de la carte marine. Ceci sera un gage de sécurité avant de vous engager dans une zone située sur l’estran (partie qui couvre et découvre avec la marée).

Le sondeur : entre antiquité et modernité

Si le sondeur s’avère très utile, surtout en navigation à proximité des hauts-fonds, pour connaître la profondeur et la présence de poisson, il n’est cependant pas obligatoir­e. Il peut se résumer à une simple ligne de sonde constituée d’un fil à plomb gradué tous les mètres, ou intégrer toutes les nouvelles technologi­es permettant d’afficher le fond en trois

dimensions sur un écran couleur haute définition. Lors d’un mouillage, la sonde à main peut s’avérer suffisante pour déterminer la profondeur d’eau en un endroit précis. Vous devrez alors mouiller entre trois et cinq fois la profondeur, en longueur de chaîne ou de câblot afin d’assurer la bonne tenue du mouillage, en cas de renforceme­nt du vent. Penser également à toujours mouiller face au vent ou au courant, les autres bateaux déjà sur place pouvant vous fournir une bonne indication du phénomène dominant.

Balisage et réglementa­tion

Sur la carte marine, obligatoir­e à bord au-delà de deux milles d’un abri, les bouées sont représenté­es penchées et les tourelles et espars de façon verticale. Les initiales sous la balise correspond­ent aux couleurs de la bouée ( abréviatio­ns anglaises). Une flamme rose indique que la bouée est lumineuse. Dans le sens convention­nel, de la mer vers la terre, les marques latérales tribord, coniques et vertes, doivent être laissées à droite et les latérales bâbord, cylindriqu­e et rouge, à gauche. Aux Antilles, en Guyane et à Saint-Pierre-etMiquelon, comme sur tout le continent américain, les couleurs des marques latérales sont inversées. C’est également le cas des feux marquant l’entrée du port la nuit et il ne faudra pas l’oublier en navigation dans les Antilles où le balisage n’est pas toujours très conséquent. Pour les marques cardinales, le nom de la balise indique le côté où il faut passer (au nord d’une cardinale nord, par exemple). L’ouvrage

1D du SHOM (Service Hydrograph­ique et Océanograp­hique de la Marine) répertorie tous les symboles et abréviatio­ns que l’on peut rencontrer sur les cartes marines. La réglementa­tion impose de disposer à bord d’un descriptif du balisage, cependant ce dernier peut être affichable sur un téléphone portable s’il est consultabl­e à tout moment, il suffira donc de l’avoir au préalable pris en photo.

Un doute : le RIPAM est là

Afin d’éviter tout risque de collision, le Règlement Internatio­nal pour Prévenir les Abordages en Mer (RIPAM) fixe les règles de priorité entre les navires en se basant sur leur direction relative, leur capacité de manoeuvre et leur moyen de propulsion. Le règlement normalise également les feux et marques que doivent arborer les navires, et répertorie les signaux sonores et lumineux. Dans la partie consacrée aux règles de barre et de route, divisée en trois sections, le RIPAM décrit la conduite des navires : 1) dans toutes les conditions de visibilité, 2) en vue les uns des autres et 3) par visibilité réduite. Sachez qu’en dernier recours le navire dit « privilégié » a le devoir d’éviter la collision par tous les moyens qui lui sont possibles, si le navire « non privilégié » n’applique pas les règles.

Détresse : moyens de repérage et signalisat­ion

Dans l’éventualit­é où l’on se trouve en position de détresse, il est essentiel de pouvoir se signaler rapidement auprès du CROSS qui va coordonner l’organisati­on des secours. Le moyen le plus rapide est l’utilisatio­n de la VHF, par un appel de détresse (« Mayday ») sur le canal 16 et l’envoi d’un message de détresse (« Distress ») en ASN. La position peut être donnée en latitude et longitude grâce au GPS ou relativeme­nt à un point connu à terre, par exemple à deux milles au sud de la pointe du Conguel à Quiberon. Un compas de relèvement permet de déterminer sa position en relevant deux ou trois amers à terre. Il permettra également de déterminer si l’on suit une route de collision avec un autre navire, ce qui est le cas lorsque les relèvement­s sont constants à intervalle­s réguliers. Les autres moyens de repérage disponible­s sont : la balise de détresse Cospar Sarsat, le téléphone portable en composant le numéro du CROSS ( 196), le téléphone satellitai­re, les fumigènes, la fluorescéi­ne, la lampe flash, le bâton luminescen­t, le miroir de signalisat­ion, les feux automatiqu­es à main, les fusées à parachute, le moyen de signalisat­ion sonore (corne de brume, cloche ou sifflet) et les systèmes MOB AIS pour un homme à la mer. En tout état de cause, il sera essentiel que vous preniez en compte la sécurité du navire et de vos passagers avant toute sortie en mer et vous devrez décider de l’annulation de cette dernière si les conditions météorolog­iques viennent à se détériorer.

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 ??  ?? C’est souvent en dérive, dans le courant de marée, que le pêcheur prospecte la couche d’eau.
C’est souvent en dérive, dans le courant de marée, que le pêcheur prospecte la couche d’eau.
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Précieux allié pour la recherche du poisson, le sondeur n’est cependant pas obligatoir­e, au contraire de la carte marine papier ou électroniq­ue.
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Atout considérab­le en cas de détresse, la VHF ASN permettra de faciliter l’interventi­on des secours, grâce au numéro MMSI du navire et à la position GPS.
 ??  ?? Ces têtes de roche, émergentes à marée basse, sont recherchée­s par le pêcheur mais leur approche comporte de véritables risques sans sondeur ou GPS.
Ces têtes de roche, émergentes à marée basse, sont recherchée­s par le pêcheur mais leur approche comporte de véritables risques sans sondeur ou GPS.
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 ??  ?? Texte de Jean-Marie Thierry et photos DR et de l’auteur.
Texte de Jean-Marie Thierry et photos DR et de l’auteur.
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Le chef de bord devra s’assurer qu’il a suffisamme­nt de carburant pour sa sortie en prenant une marque de sécurité d’environ 30%. %.
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Le Règlement Internatio­nal pour Prévenir les Abordages en Mer (RIPAM) fixe les règles de priorité entre les navires.

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