Une histoire mouvementée
L’originalité écologique de la Méditerranée tient beaucoup à son histoire. C’est un reste de l’ancienne mer Théthys, en fait l’ouverture océanique qui s’est formée à l’est de la Pangée, lorsque ce supercontinent s’est disloqué il y a 200 millions d’années, après avoir réuni l’ensemble des terres. Les dérives des sous-continents, en particulier le pivotement et la remontée de l’Afrique vers l’Eurasie ont coincé et fermé une partie de la Théthys. Initialement vaste, cette mer s’est notamment étirée il y a une cinquantaine de millions d’années. La Corse et la Sardaigne, se sont ensuite séparées du sud de la France en pivotant d’un angle droit jusqu’à leur actuelle situation. Il y a cinq à six millions d’années est survenue la « crise Messinienne ». Le détroit de Gibraltar s’est alors refermé sous la poussée de l’Afrique. Les pluies sur la mer et les apports des fleuves ne suffisant pas à compenser l’évaporation, le niveau a alors baissé de 1000 à 2000 mètres, voire plus. Cet assèchement intense l’a d’ailleurs fractionnée en plusieurs lacs salés, à l’image de la mer d’Aral ou même de la mer Morte. Il en reste de grands gisements salins sous les fonds actuels. C’est à cette époque que les fleuves de son pourtour ont taillé des gorges et canyons profonds de plusieurs centaines de mètres. Actuellement, une partie d’entre eux se trouve immergée face aux embouchures fluviales. Coup de théâtre, le « bouchon » de Gibraltar a sauté il y a environ 5,3 millions d’années. Une énorme cascade s’est ruée, remplissant brutalement les cuvettes méditerranéennes. A-t-elle duré une centaine d’années ? Ou seulement quelques mois, selon une étude espagnole de 2016 basée sur les dimensions du canal sous-marin observé près du détroit ? Le repeuplement en espèces marines est donc récent et il s’est effectué à partir de l’Atlantique pour la quasi totalité. C’est seulement à l’époque moderne que de nouvelles espèces sont venues de l’océan Indien par le canal de Suez – et désormais par des transports maritimes variés. Quant aux posidonies, elles étaient présentes dans la Théthys, on connaît des fossiles de 120 millions d’années. Leur biodiversité a baissé durant la crise Messinienne. L’actuelle posidonie méditerranéenne a pu survivre grâce à sa bonne résistance à la salinité – actuellement, on trouve des herbiers dans des zones pouvant atteindre 46-48 g/l. Elle a bénéficié ensuite de la faible concurrence dans un milieu neuf. Au total, la faune et la flore reconnues sont évaluées à 315 000 espèces, dont près de 20 % sont endémiques, uniquement présentes en Méditerranée – un pourcentage élevé dû à l’isolement passé.