Pêche en Mer

Mirna Cieniewicz, directrice de la communicat­ion du groupe Bénéteau, livre son analyse.

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PEM : Comment analysez- vous les conséquenc­es des taxes Trump sur le marché de la plaisance en France et plus généraleme­nt en Europe ?

MirnaCieni­ewicz: Avec les mesures de rétorsion de l’Union européenne et le fait d’imposer 25% de droits de douane sur l’importatio­n de produits américains, on s’est retrouvé en dommage collatéral de cette mésentente commercial­e. Là où Trump a décidé de taxer spécifique­ment les importatio­ns d’acier et d’aluminium, l’Union européenne lui a répondu en faisant une liste de produits pour un volume d’affaires équivalent en mesure de rétorsion. Cette liste inclut le code produit des bateaux de plaisance, mais nous n’étions pas un secteur spécifique­ment visé. Donc au 22 juin, mécaniquem­ent, nos quatre marques américaine­s que sont Wellcraft, Four Winns, Glastron et Scarab, ont pris 25% de droits de douane concernant leurs bateaux, en sachant que c’était déjà des bateaux importés des ÉtatsUnis ( avec des droits de douane de 1,7% ou 2,7% selon le poids ou le type de motorisati­on, NDLR). La réaction a été assez drastique de la part des concession­naires puisque que cela s’est traduit par des annulation­s de commandes. Donc des ventes qui ne seront pas réalisées sur l’exercice en cours qui termine le 31 août. On a chiffré ce manque à gagner, qui ne concerne pas que l’Europe, parce que le Canada a pris des mesures similaires en imposant 10% de droits de douane, entre 4 et 5 millions d’euros de chiffre d’affaires qu’on ne pense pas réaliser d’ici à fin août. PEM : Bénéteau a annoncé un ralentisse­ment de la croissance de son chiffre d’affaires pour le troisième trimestre 2018 ce qui a entraîné une baisse de la valeur de son titre boursier, qu’en est- il réellement ? MC : Il y a eu une double sanction en bourse pour le titre. Le fait qu’on a annoncé des résultats à neuf mois sur le troisième trimestre qui étaient inférieurs aux attentes du marché financier entraîne presque systématiq­uement une sanction en bourse. Ayant quantifié ce chiffre d’affaires qu’on ne pourra pas réaliser, on a été obligé de revoir à la baisse la perspectiv­e pour l’année entière et donc diminuer aussi bien l’objectif de chiffre d’affaires que l’objectif de résultat opérationn­el courant, ce qui n’est pas passé sur les marchés. La situation continue a affoler le marché puisqu’on a vu d’autres valeurs de boîtes européenne­s, bien implantées aux États- Unis, être chahutées parce que les investisse­urs anticipent une possible escalade de guerre commercial­e et le fait que ces entreprise­s se trouvent en difficulté dans les mois à venir dans leur commerce. Nous faisons 30% de notre chiffre d’affaires en Amérique du Nord (Canada, États-Unis, Mexique) la part principale étant réalisée aux États-Unis, avec un mix de bateaux fabriqués aux USA et de bateaux européens importés aux États-Unis, donc les investisse­urs peuvent se dire que cette entreprise est vulnérable parce que 30% de son chiffre est réalisé là-bas, on est donc exposé. En même temps, à l’inverse, et c’est le discours qu’on a tenu aux investisse­urs, on est le seul chantier européen a avoir aussi bien de la capacité de production en Europe qu’aux États- Unis. Donc c’est sûr qu’à court terme il y aura un impact, s’il devait y avoir une escalade, néanmoins, à moyen terme, on est en capacité de produire localement pour répondre aux besoins du marché local, ce que nos concurrent­s ne peuvent pas faire. PEM : Comment votre entreprise va- t- elle pallier cette tension économique étant donné que vous produisez beaucoup de bateaux avec vos marques américaine­s sur le sol américain ? MC : Les quatre marques américaine­s font la très grande partie de leur chiffre d’affaires sur le territoire américain. Cette situation vient pénaliser leur développem­ent commercial à l’ internatio­nal qui avait été relancé, il y a à peu prêt deux ans. S’il s’agit d’une mesure de court terme qui peut être abandonnée d’ici à la fin de l’année, on n’a pas d’interêt à envisager des transferts de production des marques américaine­s en Europe, comme on pourrait le faire puisque techniquem­ent, car on en a la capacité. Néanmoins, il y a une saison commercial­e qui commence en septembre et nos réseaux européens sont en attente de propositio­ns.

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