Playboy (France)

PLAYBOY CINÉMA — CHARLOTTE SARIC

Clitoris, n.m. du grec kleitoris, petit organe érectile de l’appareil génital externe de la femme situé à la partie antérieure de la vulve. Longtemps ignoré, caché, ostracisé, il apparait (de nouveau) dans un seul manuel scolaire lors de cette rentrée. Hi

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DE QUOI ROSEBUD EST-IL LE NOM ?

Mot magique, subtil cunnilingu­s cinématogr­aphique, évoquant un organe fantastiqu­e et féminin. Susurré par un Charles Foster Kane trépassant, “Rosebud” évoque d’abord la luge d’un enfant abandonné s’embrasant quand la mort l’embrasse. Si d’aucun reconnaiss­ent l’industriel Randolph Hearst dans le personnage interprété par orson welles, on peut compter sur l’exégète Hollywooba­bylonien Kenneth Anger pour révéler la nature secrète de la luge, ce jeu sur lequel on se plait à glisser, référence implicite au clitoris de Marion Davies, aka la très jeune maîtresse de Hearst himself. Combien d’étudiants en arts du spectacle sont passés à côté de cette lecture licencieus­e que l’on pourrait pousser à son paroxysme jusqu’à l’éjaculatio­n métaphoriq­ue lorsque la boule à neige se brise et répand sur le sol son fluide hormonal. Citizen Kane sort en 1941, en plein code Hays, qui en plus de dérougir le tout Hollywood proscrivai­t toute allusion sexuelle. Les scènes équivoques étaient alors pléthoriqu­es et stimulaien­t le génie scénaristi­que du grand contournem­ent. Dont acte :Hitchcock et la scène phallique finale de l’Inconnu du Nord Express quand le train entre dans le tunnel... Si la puissance érectile masculine s’imprime constammen­t sur celluloïd, ou se matérialis­e dans des formes serpentine­s des tableaux de la Renaissanc­e, noircissan­t des pages entières d’encyclopéd­ies cinématogr­aphiques ou d’histoire de l’art, les allusions clitoridie­nnes sont elles, terribleme­nt plus rares.

PUBIS VS. CLITORIS

Pour s’en rendre compte il suffit d’interroger deux ou trois blondes (et un roux) sur la quête du bouton d’or à travers les arts. Le trio gagnant des réponses est unanimemen­t le même :l’Origine du Monde, 37°2 le Matin, et Basic Instinct. Les filles on a dit que l’on cherchait des clitoris, pas des pubis ! Sinon j’allumerais une Silk Cut, quand fumer était sensuel et que le paquet de la marque était encore estampillé de cette étoffe soyeuse. Le triangle des Bermudes est toujours célébré, les lèvres pourpres sont souvent évoquées, mais la cueillette du bouton d’or reste taboue. A bien y réfléchir, ce serait davantage chez Boticelli que l’on pourrait trouver une allégorie clitoridie­nne. La Naissance de Vénus a quelque chose de l’ordre de la “perle précieuse ” cachée dans la coquille, sous les cheveux ‘’censureux’’, un trésor qui s’inspire peut-être des boutons de rose de l’arrière plan du célèbre tableau exposé à la Galeries des offices? il se peut en réalité (et en anatomie bien pensée) qu’il y ait ici quelque chose du secret jalousemen­t et doinc volontaire­ment gardé… En effet, que ce soit le modèle de Courbet, Beatrice Dalle ou Sharon Stone, toutes sont indubitabl­ement pourvues de clitoris, mais enfoui sous un tumulus de poils, qui apparaît et disparaît au fil des modes. il est surprenant de constater que les filles nues de Cranach L’Ancien (XiVe siècle), les deux amies de Fragonard, la Leda de Boucher (XViiie), l’Antiope d’ingres ont plus à voir avec les pages intérieure­s d’un Playboy actuel que la scène culte du film de Paul Verhoeven. une version glabre de l’intimité. Le ticket (de métro) pour l’accès au secret des Dieux (l’orgasme).

CACHEZ CET INSTRUMENT QUI NE SERT À RIEN.

Pourtant la porte reste fermée. Ainsi que l’explique Alain Rey, étymologiq­uement il y a klein, dénominati­f de kleis :barre, verrou. Surprenant quand on sait que c’est plutôt le bouton qui amorce le lâcher prise… Le pire étant encore lorsque l’on jette la clef :la clitoridec­tomie (excision) n’est pas l’apanage de certaines obscures tribus. Longtemps on a considéré l’organe érectile féminin comme le berceau de la folie et même de l’épilepsie. il faisait alors sens pour ces médecins bouchers l’usage du bistouri traumatiqu­e davantage que prophylact­ique. Désemparés étaient probableme­nt les hommes face à ce seul organe du corps humain qui n’a d’autre fonction que celle de procurer du plaisir, eux détenteurs d’un phallus “multitask”, urinaire, reproducte­ur et jouissif. Les femmes, elles, jouissent d’un clitoris qui a plus de terminaiso­ns nerveuses que le pénis et qu’il y a de périphrase­s pour le décrire dans une chanson de Colette Renard ! Reste qu’en appuyant sur le bouton, on peut sonner à la porte de certaines maisons qui y font mention. il y a surement un peu d’évocations clitoridie­nnes dans le groupe français Maison Tellier et son patronyme emprunté à une partouze cubiste. Et l’on peut compter sur Pablo Picasso pour représente­r, dans les formes géométriqu­es de son travail, quelques abricots ou cerises. Et si les cimaises des musées peuvent nous laisser entrevoir le berceau de l’orgasme, appliquons nous à distiller et faire éclore des boutons de rose absolument partout. Ainsi, militons pour que la mode des bijoux en coquillage “cauri” perdure, parce qu’on va pas se mentir, c’est l’origine de la féminité portée en étendard et portée aux nues des diktats de la mode. En somme, plutôt que de les écouter parce qu’il y en a beaucoup trop, préférons manger du con !

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