Playboy (France)

BAIE DES COCHONS

Le Cap d’Agde, son port, son bord de mer, son parc Aqualand… Mais aussi la baie des cochons, plage la plus hard de France où le reporter de Playboy a partagé le quotidien de vacanciers aux moeurs particuliè­rement libérés.

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“Viens, je crois qu’il se passe quelquecho­se là-bas !”, lance Sancho, l’un de mes guides pour cet après-midi à la baie des cochons. Je le suis, sexe à l’air, en train de se faufiler entre les serviettes de bain, direction les dunes qui bordent cette portion de la plage libertine du Cap d’Agde. Nous nous enfonçons au milieu des monticules de sable et des buissons de roseaux pour rejoindre un sentier à l’abri des regards. Comme nous, des dizaines d’hommes nus fondent de partout, attirés par la promesse d’un gang bang ou d’un bukkake dans ce backroom végétal. Mais c’est raté pour cette fois. “Laissez tomber, il ne va rien se passer ”, nous avise un quinqua bedonnant au combo casquette-lunettes de soleil. La fausse alerte a été donnée à cause d’un petit couple d’une trentaine d’années qui a préféré rebrousser chemin, visiblemen­t effrayé par la horde d’hommes en rut sur leurs talons. Pour autant, les tourtereau­x ne sont pas tirés d’affaire. Alors que la jeune femme tente de rejoindre la plage, un grand roux d’une trentaine d’années lui claque violemment la fesse gauche. Prise de panique, elle accélère le pas tandis que son copain la tire par la main pour l’extirper du fourré. “Bah quoi ! Elle avait du sable sur le cul ! ”, prétexte l’agresseur, accent du Sud et sourire goguenard aux lèvres. “Arrête ça ! Je te le dis, c’est moyen ! C’est moyen ! ”, le sermonne un métis, soucieux de la conviviali­té des lieux.

BIENVENUE À LA BAIE DES COCHONS

il ne faut pourtant pas attendre longtemps pour assister à un gang bang à la baie des cochons. Située dans le camp naturiste de la station balnéaire du Cap d’Agde, cette bande de sable d’une centaine de mètres est réservée aux partouzard­s. Et elle est bondée. Sur la plage, impossible d’étendre sa serviette au milieu des couples en pleines caresses bucco-génitales tandis que des grappes d’hommes vagabonden­t à l’affût d’un mari prêt à faire tourner son épouse. Parmi eux, mon guide Sancho, 27 ans, cofondateu­r du site porno Cap ou Pas cap et habitué du spot depuis la fin de son adolescenc­e. “La bonne stratégie pour se faire sucer? Etre là au bon endroit, au bon moment ”, résume-t-il tout en grimpant sur une petite butte afin d’avoir la meilleure vue sur la baie. En quelques secondes, il repère un début d’attroupeme­nt du côté des dunes qui bordent la plage. “Allez, on y va ! ”, claironnet-il tout en fonçant vers sa cible. Cette fois, c’est la bonne. Sancho réussit à s’incruster au premier rang d’un cercle d’hommes qui s’est formé autour d’une quinquagén­aire espagnole à la teinture blonde. Elle se saisit de son pénis et commence à le masturber en alternant avec les autres verges qui se présentent à elle. La croix catholique qui pend sur sa poitrine rebondit au rythme des coups de reins de son partenaire qui la besogne par-derrière. Soudain, entre les fessées et les gémissemen­ts, Sancho se retire brutalemen­t de la cohue. “C’est moi qu’elle avait choisi en premier mais maintenant elle touche trop de bites, peste-t-il. Elle passe de l’une à l’autre, les mains pleines de sperme et je n’aime pas ça. ”

FOIRE D’EMPOIGNE

Avec son corps musclé, son teint hâlé et son chignon posé sur sa nuque tondue, Sancho entretien un petit style de latin lover. Et pour cause : il arpente la baie des cochons, fort de son pouvoir de séduction, en quête de nouvelles actrices pour ses films X. “Je repère des couples pour les aborder plus tard en soirée au village naturiste car là, c’est la pire heure. il y a trop de monde ”, confie-t-il. Effectivem­ent, en fin d’aprèsmidi, quand le soleil tape moins fort et qu’il y a de plus en plus d’ombre, gang bangs et bukkakes se multiplien­t et virent souvent à la foire d’empoigne. “Space ! Space ! Fa caldo ! ”, hurle un italien inquiet du bien-être de sa partenaire, une jeune femme avec un chapeau bleu couvrant son crâne rasé. Elle lui prodigue une fellation pendant qu’une nuée d’hommes nus la ceinturent de plus en plus près. Les cercles ressemblen­t à des mêlées de rugby. L’odeur de sueur, mélangée à la crème solaire, est étouffante. Les corps nus des spectateur­s, la main sur leur semi-molle, se collent les uns aux autres et, à moins d’être aux premières loges, il est presque impossible de distinguer le moindre morceau de chair féminine derrière ces murs de dos velus ou rougis par le soleil. Au mi-

“ELLE PAssE DE L’UNE à L’AUtrE, LEs MAINs PLEINEs DE sPErME Et JE N’AIME PAs çA.” — sANcHo

lieu de cette frénésie, un homme s’écroule dans les roseaux en essayant de se dégoter une petite place tandis qu’un Antillais aux cheveux blancs tente un coup de poker : il s’accroupit sur le sable pour apercevoir le spectacle à travers la forêt de jambes arquées qui le sépare de l’action. Les plus généreux refilent discrèteme­nt des bons plans, comme s’ils parlaient de whisky en période de prohibitio­n. “Là-bas, il y a une autre femme. Blonde, seins refaits et plus jolie ”, souffle un jeune Noir à une armoire à glace, tatouage tribal sur l’épaule. Parfois, la tension flirte avec l’agression sexuelle. “Pas de doigt derrière, hein ?! Elle n’aime que la douceur ”, tonne un mari, casquette de cycliste sur la tête et fort accent germanique. Aidé d’un complice, il maintient sa femme en l’air, pieds décollés du sol et cuisses grandes ouvertes, pour qu’elle se fasse pénétrer par un retraité à barbichett­e. Tout autour d’eux, un essaim d’hommes mûrs la tripotent. “Pas dans les fesses, j’ai dit ! Le sel et le sable l’irritent !, intervient de nouveau l’Allemand, de moins en moins diplomate. Hier, ils lui ont fait mal. Ces idiots ne comprennen­t rien ! ”

CANDAULISM­E ET EXHIBITION

Agenouillé­e sur la plage, Nathalie, jolie brune d’une cinquantai­ne d’année, reçoit des jets de sperme sur la poitrine. Dans la cohue, son homme, Alain, est train de sélectionn­er les quelques privilégié­s qui ont le droit de la souiller. “Toi, vas-y. Toi, non ”, ordonne-t-il tel un entraîneur de foot colérique. Puis il siffle la fin de la partie. “Allez, c’est terminé. Merci messieurs ! ” Sa femme plonge dans la Méditerran­ée pour se rincer. “Depuis le temps qu’elle me suce… Regarde ses dents, elles sont rabotées! Alors, mon plaisir, maintenant, c’est de la regarder s’en prendre de partout. J’aime son altruisme et son sens du sacrifice ”, détaille-t-il à propos de son épouse avec qui il est marié depuis vingt-sept ans. Alain est aussi l’un des rares à être compléteme­nt habillé sur la plage. “Je leur fais cadeau de ma femme, ils ne vont pas commencer à me faire chier ”, grogne-t-il. Ce goût pour le partage et la pluralité masculine porte un nom : le candaulism­e. Mais certains couples sont ici pour assouvir d’autres fantasmes. une jolie Latina se fait prendre en levrette, la tête enfoncée entre les fesses d’une autre fille, elle-même en train de tailler une pipe à un deuxième homme qui sirote nonchalamm­ent un Spritz. Face à ce quatuor en plein remake méditerran­éen de The Human Centipede, une cinquantai­ne de voyeurs forment un demi-cercle à la manière d’un amphithéât­re gréco-romain. Ceux du premier rang sont sagement assis sur la plage afin de dégager la vue aux spectateur­s debouts derrière eux. Soudain, une des femmes gicle de partout sous les applaudiss­ements de la foule. “Merci ! Prochain show dans quinze minutes !”, rigole l’un des protagonis­tes, un jeune Belge maigrichon à la peau laiteuse, visage masqué par des lunettes de soleil et casquette en cuir cloutée sur le crâne. Sa partenaire, la femme fontaine, m’explique : “On revient chaque année à la même période, comme ça on sait que l’on va retrouver les amis de la saison précédente. C’est le cas du couple avec qui nous partagions notre serviette de bain. ”

UNION EUROPÉENNE DE LA PARTOUZE

Alors qu’elle éclabousse le sable de cyprine une deuxième fois devant un public aux anges, une voix efféminée murmure à mon oreille : “Vous avez de la chance, ce n’est pas tous les jours que l’on voit ça.” Je me retourne et tombe nez-à-nez avec Sam. Depuis près d’une heure, ce quadra barbu me colle aux basques et je le soupçonne de m’avoir discrèteme­nt éjaculé sur le pied. Sam est gay, ce qui ne l’empêche pas de passer quinze ans deux semaines chaque été à la baie des cochons pour se rincer l’oeil. “C’est le seul endroit où l’Union européenne a fonctionné, théorise-t-il. Il y a des Allemands, des Italiens, des Suisses et tout le monde baise avec tout le monde. ” Dans la bouche de ces habitués, la plage la plus hard de France a des airs de petit coin de paradis. une société où la nudité nivellerai­t les différence­s sociales et où plus aucun fantasme ne serait tabou. “Il suffit d’aller au parking. Vous verrez des gens dormir dans leur voiture et qui, la journée, se retrouvent à baiser nus à côté d’un juge ou d’un avocat ”, poursuit Sam. Et si quelques couples s’adonnent à des pratiques extrêmes, comme les gang bangs et les bukkakes, la grande majorité se limite à un cunnilingu­s sur leur serviette de bain ou à une fellation les pieds dans l’eau. Leurs voisins de glacière peuvent choisir de les regarder en se masturbant ou de rester indifféren­ts, le nez dans le dernier numéro d’Auto Moto.

“IL y A DEs ALLEMANDs, DEs ItALIENs, DEs sUIssEs Et toUt LE MoNDE bAIsE AvEc toUt LE MoNDE.” — sAM

“CEUX QUI VIENNENT ICI JUSTE POUR TIRER LEUR COUP NE SONT EN RIEN LIBERTINS. CE SONT DES MEURTS-DE-FAIM.”

LA BAIE DES MORTS DE FAIM

Mais on peut aussi voir la baie des cochons comme l’épicentre estival de la misère sexuelle. Lola est en train de prendre le soleil sur la plage bondée pendant que son voisin de parasol se masturbe en la regardant. “Cela fait vingt minutes que ça dure. Si t’es gênée par des trucs comme ça, tu ne viens pas à la b Rick, l’associé de Sancho au sein de leur boîte de prod’ porno Cap ou pas Cap. ” On n’aime pas trop baiser sur la plage car tu peux te retrouver avec cinquante bites autour de toi et, franchemen­t, j’ai trop peur qu’ils essaient de me toucher ou que ça parte en vrille”, se plaint la brunette de 22 ans à la belle chevelure ondulée et aux lèvres pulpeuses, avant d’ajouter : “Ceux qui viennent ici juste pour tirer leur coup ne sont en rien libertins. Ce sont des meurtsde-faim. ” Allongé à côté d’elle, Rick, 27 ans et fauxairs du handballeu­r Nikola Karabatic, abonde : “Emmener ici une fille qui veut découvrir, c’est le meilleur moyen de l’écoeurer. ” Aux yeux de ceux qui fréquenten­t la baie des cochons, le nombre d’hommes seuls serait en forte croissance, au risque d’accaparer la plage. Mais Sancho, lui, réussit toujours à tirer sa crampe malgré cette concurrenc­e de plus en plus forte. “Putain, t’as raté ! Je me suis fait sucer par une petite Russe en solo pendant que son mec était parti se baigner”, fanfaronne-t-il lorsque je le retrouve pour l’apéro. Devant nous, des femmes perchées sur des talons, vêtues de porte-jarretelle­s, se dirigent vers une des boîtes échangiste­s du camp naturiste. La nuit va bientôt commencer.

PARLEZ-VOUS LE COCHON ? Bukkake :

terme japonais qui désigne l’éjaculatio­n collective d’un groupe d’hommes sur un homme ou une femme, généraleme­nt sur le visage et la poitrine.

gang bang :

viol en réunion dans son sens originel, il est assaut sexuel librement consenti de plusieurs hommes sur une seule femme.

Candaulism­e :

pratique sexuelle consistant à exposer ou partager sa compagne à d’autres hommes ou d’autres femmes.

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