WE NEED THEM !
Ras le bol des supers ? Les studios font le plein avec des plans décennaux et une frénésie complètement folle : ciné, télé, streaming… les héros en armure et collants sont partout. Mais, et c’est la nouveauté, depuis quelque temps ils mutent. Les temps changent et les supers avec. De sexe d’abord (Wonder Woman – notre couverture – ou Captain Marvel viennent à la rescousse des hommes d’acier…), de couleurs ensuite (Black Panther, Faucon…), d’ambition enfin. Longtemps armes de propagande massive ou instruments de soft power, les superhéros d’aujourd’hui sont surtout les miroirs d’angoisses et de failles, intimes et collectives. Et c’est sans doute pour cela que l’on a besoin d’eux. Alors que la Maison Blanche abrite un supervilain nouvelle génération, au moment où l’Europe semble à deux doigts de vaciller, on devrait se réjouir de les voir revenir dans l’inconscient collectif. C’est la vieille leçon de l’historien Edward Gibbon qui étudiait le déclin de l’Empire romain. Quand la culture abandonne l’idéal héroïque, quand elle ne manifeste plus qu’indifférence philosophique et s’enlise dans un hédonisme inconséquent, alors la civilisation est en danger. Mais quand la culture est à son zénith, elle invente et recrée les personnages dont elle a besoin – Virgile et Énée, Sophocle et Ajax ou Siegel et Superman. Soixantequinze ans après sa naissance sur papier, on peut le crier haut et fort : Wonder Woman, le monde a encore (plus) besoin de toi !