BATMAN DE PIED EN CAPE
Il y a un peu plus de deux ans, pour célébrer les 75 ans de Batman et un coffret Blu-ray regroupant les 120 épisodes de la série sixties, Première avait rencontré le vétéran Adam West qui évoquait pour nous le bon vieux temps et l’éternel pouvoir de fascination du Caped Crusader. BAM! WIZZ! POW! Interview collector.
PREMIÈRE : Êtes-vous toujours partant pour évoquer Batman après toutes ces années ?
ADAM WEST : Je ne parle que de choses très personnelles, voire intimes. Non, je plaisante. Je vous connais, je sais ce qui intéresse les journalistes. Mais vous ne saurez rien sur moi, je ne lâcherai rien ! Je suis Batman !
En 1966, votre Batman était une série pour enfants. Quelques décennies plus tard, un public adulte friand de son extravagance se l’est réapproprié. N’est-ce pas un peu bizarre ?
À l’époque, on avait sciemment fait de cette série une comédie satirique pleine d’autodérision pour qu’elle plaise aux adultes. Batman n’est pas réel vous savez... Mais aujourd’hui, tout doit être sérieux et, Batman, comme tout le reste, a été contaminé par cet état d’esprit.
Ma génération a grandi avec votre série. On l’adorait, même si on se sentait floué au moment des scènes de baston avec les onomatopées géantes...
Ce n’était pas une question de budget, c’était délibéré : on ne voulait pas de sang, pas d’armes, pas d’explosions dévastatrices. On avait choisi de laisser ça à d’autres incarnations du héros. Les leçons d’éthique et de morale prodiguées par Batman et Robin étaient destinées aux enfants, mais elles étaient perçues avec beaucoup d’ironie par les parents.
Vous aviez la plus belle et la plus stylée des Batmobile.
Je croise des milliers de gens qui, comme vous, adorent notre vieux modèle et le préfèrent aux versions plus récentes. Notre Batmobile était fun et funky! Et elle renvoyait l’amour qu’on lui portait. Elle miaulait quand on la caressait.
Vous avez conservé beaucoup de souvenirs des tournages ? Vous cherchez une vieille cape ?
Si vous la portiez dans la série, pourquoi pas...
C’est une mauvaise idée, croyez-moi. Vous ne pourriez l’utiliser que dans l’intimité, j’en ai peur, et il vous faudrait des tonnes de désodorisant. Mais oui, j’ai conservé quelques trucs. J’ai les scripts originaux des 120 épisodes avec mes annotations, et une petite collection d’accessoires que j’ai entreposés chez moi, dans mon bureau. J’en parle d’ailleurs dans la nouvelle édition Blu-ray. Ce coffret est hallucinant. Il est vraiment sublime. Du coup, peut-être que la Chine va enfin arrêter de faire circuler des versions HD pirates du show.
De nombreux acteurs sont prisonniers d’un rôle dont ils ne parviennent pas à se détacher. C’est votre cas. Vous l’évoquez dans votre autobiographie, vous faites des apparitions fréquentes en tant qu’Adam West, acteur « has been »... C’est un destin que vous avez embrassé ?
(Silence.) Quand j’ai arrêté Batman en 1968, j’ai passé cinq ans à essayer de décrocher un autre rôle, en vain. J’ai fait beaucoup de théâtre amateur et d’animations, tout ce que je pouvais pour rester présent dans l’industrie et nourrir ma famille. C’est une terrible malédiction, et nous, acteurs, devons vivre avec. Quand vous créez un rôle aussi indélébile que celui-là, un rôle si bien reçu par des publics aussi différents, il devient très difficile d’en sortir. Ces dernières années, j’ai appris à l’accepter et à assumer mon destin d’acteur « has been », comme vous dites. Et vous savez pourquoi ? Parce que les gens m’aiment comme ça. Ils aiment Batman, alors moi aussi je l’aime... PARCE QUE ÇA REND LES GENS HEU-REUX !