Première - Hors-série

CLAIREMENT GRANDE

Elle a décroché l’Emmy de la meilleure actrice pour The Crown et brillé dans trois films coup sur coup : Claire Foy a mis 2018 dans sa poche. Et nous avec.

- PAR CAROLINE VEUNAC

17 septembre, Los Angeles : Claire Foy reçoit un Emmy Award pour le rôle d’Elizabeth II dans la série de Netflix, The Crown. Éliminées Keri Russell et consorts, c’est une Anglaise à l’accent à couper au couteau qui est élue reine de Hollywood 2018. Pourtant, l’heure du sacre est aussi celle de la passation de pouvoir : Olivia Colman (Broadchurc­h) lui succédera dans la saison 3 pour incarner une souveraine d’âge plus mûr. Une statuette en guise de cadeau de départ… Reste que si les Américains adorent distinguer les acteurs anglais dans des rôles on ne peut plus british, le star-system exige que les transfuges se plient ensuite à des mythologie­s plus locales. Claire Foy l’a bien compris, en jouant fissa une employée de bureau traquée dans un thriller de Soderbergh (Paranoïa, sorti en juillet) et la femme du héros national Neil Armstrong dans l’épopée lunaire de Damien Chazelle (First Man, sorti en octobre). Une manière d’occuper le terrain sans se dédire d’un bon goût pour le cinéma d’auteur. Mais pour s’affranchir des relents naphtaliné­s des jodhpurs de la cheffe du Commonweal­th, il fallait changer de look plus radicaleme­nt. C’est le troisième coup de dés de Claire Foy en 2018 : endosser le cuir et les tatouages de l’iconique Lisbeth Salander dans le nouveau Millenium, ce qui ne me tue pas (sorti en novembre). Ou comment se « rock’n’rolliser » tout en épousant vaillammen­t les valeurs de l’ère #MeToo. En mars, sommée de s’offusquer d’être moins bien payée que son partenaire de The Crown, Matt Smith, Claire Foy avait botté en touche. Neuf mois plus tard, elle campe une vigilante féministe qui met minables les prédateurs en tous genres. Et de se réappropri­er, sur un mode plus sobre et plus mature, le personnage immortalis­é avec une fougue adolescent­e par Noomi Rapace et Rooney Mara. Bien joué, Claire. Dans tous les sens du terme. Parce qu’en plus de faire grimper sa cote, cet habile plan de carrière a permis à l’actrice de 34 ans de démontrer en l’espace de six mois toute l’étendue d’un talent déjà manifeste dans The Crown. Réputée pour son art de faire parler les silences d’un frémisseme­nt de lèvre, d’un tremblemen­t de paupière ou d’un écarquille­ment de ses immenses yeux bleus, cette fille nous plaît surtout pour la colère rentrée qui arc-boute son corps frêle mais nerveux. Circulant d’une reine inflexible à une fille d’à côté borderline, d’une mère de famille endeuillée à une hackeuse vengeresse, cette rage souterrain­e fait de son apparence de bonne élève une façade aussi trompeuse que fascinante à regarder.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France