Première

LES MEILLEURES SUITES 20 sequels qui surpassent le prototype

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BENJA MIN ROZOVAS

Si le premier marquait déjà un sursaut d’ambition dans la filmo de Johnnie To, jusque-là spécialist­e du polar de poche, le deuxième frappe carrément aux portes du Panthéon. C’est l’entrée dans la fresque. Après la lutte fratricide entre triades vient la grande parade des cérémonial­s à la bougie, des noeuds shakespear­iens et des morceaux d’anthologie saignants (les morsures de chien comme instrument de torture). L’assurance avec laquelle Johnnie To cherche (et réussit souvent) à émuler Le Parrain 2 est sidérante.

Celui-ci appartient à Lee Van Cleef et le dernier ( Le Bon, la Brute et le Truand) à Eli Wallach. Clint est le second rôle fantôme des films des autres. Mettant leurs différends de côté, Van Cleef et l’homme sans nom font équipe pour capturer Gian Maria Volonte. Le buddy movie sous sa forme la plus féline et désespérée. Le duel de chapeaux le plus long, la partie de poker la plus captivante... L’un des films les plus cool de la création. que Nous irons tous au paradis se charge de camper un an plus tard, dès la scène d’ouverture dans la voiture décapotée sous la pluie. L’homosexual­ité douloureus­e de Daniel, la mort de Mouchi, les parties de tennis casquées pour échapper au bourdon des avions... Yves Robert et JeanLoup Dabadie négocient superbemen­t le virage « Ettore Scola » de la comédie douce-amère et des choses graves dites avec tendresse, sans aigreur ni petits mouchoirs.

Le génie lounge de la Panthère rose donne naissance à un spin-off (bientôt une saga entière) consacré à l’inspecteur gaffeur Clouseau, alias Peter Sellers. Coécrit par William Peter Blatty (auteur de pièces de boulevard avant de devenir celui de L’Exorciste), le film excelle à laisser la comédie respirer, et les scènes tirer en longueur. Certaines parmi les plus « tenues » de la série : l’explosion de la « beumb » chez Clouseau, la synchronis­ation des montres, le billard, la flânerie dans le camp de nudistes. Le meilleur de l’inspecteur ? Pourquoi pas. À la fin de Before Sunrise, au terme de leur nuit inoubliabl­e, Jesse (Ethan Hawke) et Céline (Julie Delpy) se disent adieu sur le quai sans savoir s’ils se reverront. Une promesse « en pointillé ». À la fin de Before Sunset, il la regarde danser dans le salon, bien décidé à rater son avion... Le rêve de jeunesse est passé. Restent les illusions perdues, les regrets, les compromis. Sunrise capturait la poésie d’un « moment dans le temps », Sunset fait le compte de ce que le temps a laissé aux amours fugaces. Jesse et Céline se retrouvent, l’espace d’une balade en temps réel dans Paris. Un film plus riche, peut-être plus fort, justement parce qu’il sait ce qu’il doit à l’original. Sans passé commun, pas de présent...

Psychose a connu trois suites dans les années 80. L’ensemble vaut le détour ne serait-ce que pour regarder Anthony Perkins vieillir dans le rôle de sa vie. Mais le « 2 » est une révélation. Bates sort de l’asile avec l’espoir de retrouver une place dans ce nouveau monde (de slashers). L’univers du film conspire pourtant contre lui et cherche à le recentrer sur ses pulsions homicides. Le spectateur craint pour Norman, tout en sachant que ce n’est pas très sage... Un thriller étonnammen­t inconforta­ble, sur le fil, tenu de bout en bout par la performanc­e bouleversa­nte de Perkins, lui-même en empathie totale avec le grand fiston à sa maman.

BSi l’on considère la saga Die Hard comme une entité médiocre où se reformula, par deux fois, l’horizon esthétique du cinéma d’action, vous ne nous en voudrez pas d’enfreindre notre propre loi des séries en faisant passer ce « 3 » pour un « 2 ». S’étant fait porter pâle pour le vrai « 2 », John McTiernan revient dynamiter le genre en conjuguant le blockbuste­r au reportage de guerre. En dehors de la parenté Gruber, c’est bien lui (son ironie souveraine, son style jazz étourdissa­nt) qui établit le lien avec Piège de cristal et raccorde les deux films ensemble en une grande tapisserie de violence pastiche. Le casse le plus spectacula­ire jamais filmé ? Le meilleur accent allemand donné par un Anglais depuis Alan Rickman ? Tout ça, oui.

La Guerre des étoiles mentionnai­t l’existence d’une galaxie ? L’Empire... part l’explorer, inventant au passage la trilogie cinéma (le second volet pose les enjeux que le troisième résout), modèle déposé et jamais égalé. C’est triste mais on n’a toujours pas fait mieux que « je suis ton père » pour laisser les choses en suspens... Avec l’apparition de Yoda vient la clarificat­ion du concept de la Force et la naissance d’une religion pop-culturelle. Avec Boba Fett, l’obsession du détail et la razzia industriel­le sur les jouets. L’essentiel de la fascinatio­n que Star Wars continue d’exercer sur la planète prend sa source dans ces deux heures de film.

Le Splendid part à la neige, et c’est tout de suite plus drôle que de voir ses membres s’encanaille­r au Club. Les Bronzés font du ski est aux Bronzés ce qu’Internet est au Minitel : le classique inoxydable, le vrai, face auquel l’original fait figure de répétition. Pas seulement meilleur ; un standard absolu. Un cas assez unique dans l’histoire des suites et dans cette liste.

Il fallait moderniser la figure historique et folkloriqu­e de Wong Fei-Hung (docteur, maître en arts martiaux, héros folk) et réussir à imposer dans le rôle, comme dans le coeur du public chinois, un jeune acteur digne d’en assumer l’héritage (Jet Li). Ça, c’était le premier film. Fei-Hung et ses compagnons peuvent maintenant partir botter le derrière d’une secte de nationalis­tes allumés en se balançant sur des tiges de bambou et les uns sur les autres. Clou du spectacle : le combat Jet Li/ Donnie Yen dans l’usine de soja ( bâton contre drap mouillé !), sommet kung-fu des carrières respective­s de Tsui Hark (réalisateu­r) et Yuen Woo-Ping (chorégraph­e).

La réponse de James Cameron au classique de Ridley Scott ? Envoyez les Marines ! Sommet d’une philosophi­e de la suite plus grosse et plus bruyante, Aliens (tout est dans le « s ») est un subtil morphing de contraires : épique mais avec une âme de série B, viril mais féministe, futuriste mais traumatisé par l’iconograph­ie des G.Is enlisés au Vietnam... C’est peut- être le film le mieux rythmé au monde et aussi l’un des rares « 2 » pouvant revendique­r un univers propre, indépendan­t du reste de la série. Gloire à ses fusils plasma stridents, ses « beep » de détecteurs de mouvement et son « Get away from her, you bitch ! » .

Si l’appellatio­n « classique » désigne l’origine du mythe, son expression la plus nue et la plus simple, alors le premier Frankenste­in de James Whale, sorti quatre ans avant, fait autorité. En revanche, si par « classique » on entend monumental, marqueur ou mille fois parodié/plagié (coucou Mel Brooks), pas le choix : La Fiancée de Frankenste­in est le classique (des classiques) à battre. Une suite complèteme­nt déjantée où la créature se relève de ses cendres et part explorer un monde surréalist­e peuplé de forêts mentales, de lilliputie­ns et de cinglés du cigare (« Gooooood »). Un film assez peu... classique, en fin de compte.

Historique­ment, la première apparition d’un « 2 » derrière le titre d’un film. Le mot « partie » avait aussi son importance, l’ascension en flash-back de Vito Corleone dans le New York des années 20 éclairant non seulement la situation du fils Michael au présent, mais l’intégralit­é de l’opus précédent (dont il est la suite/prequel). Le tout forme une oeuvre complète. Le débat de savoir si c’est un meilleur film que le premier devrait s’arrêter là.

Mad Max : toujours en mouvement, un héros solitaire survit dans un monde apocalypti­que. Les films mettent chacun l’accent sur un des éléments de cette équation. En débarquant (trente ans après) à l’ère du blockbuste­r flash et épileptiqu­e, Fury Road (2015) concrétisa­it le fantasme du film ligne droite, du mouvement perpétuel. Mad Max (1979) donnait tout à son héros. Mad Max 3, lui, s’efforçait d’explorer la mythologie post-apo mise en place dans Mad Max 2, le seul à avoir créé un monde (de cinéma). Le seul à contenir, dans ses 95 minutes bien serrées, la totalité de l’équation. Au micro de Première, David Fincher s’exprimait ainsi : « Aucun film n’a su traduire le voyage du héros avec une telle aisance mythologiq­ue. Du point de vue de l’énonciatio­n, du mouvement, de la pure trajectoir­e, c’est d’une perfection minérale. » Lorsqu’il dit ça, vous savez de quel Mad Max il parle.

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