Première

Hilary Swank

Hilary Swank s’envole pour la planète Mars avec Away. Une série spatiale signée Netflix, qui ramène l’actrice aux deux Oscars sur le petit écran, là où elle a fait ses débuts il y a trente ans. Une carrière stellaire, ou l’antithèse d’une étoile filante.

- PAR CHARLES MARTIN

PREMIÈRE : Vous avez débuté à la télévision il y a près de trente ans dans‡ Quoi de neuf docteur ? et vous y revenez aujourd’hui, pourquoi ?

HILARY SWANK : À l’époque, la télévision était le seul endroit où l’on pouvait faire ses premiers pas d’acteur ou d’actrice. Les films étaient réservés aux stars. Mais une fois que j’ai pu commencer à faire du cinéma, j’ai trouvé ça fabuleux. J’ai adoré pouvoir incarner tant de personnage­s différents, raconter toutes ces histoires. Les films m’ont offert cette possibilit­é. Mais je dois avouer qu’aujourd’hui, si l’on veut explorer un personnage en profondeur, il faut jouer dans une série. C’est là où se trouve la richesse, la diversité, et sans aucun doute la plus grande représenta­tivité des rôles. Cela dit, je n’ai pas envie d’être enfermée dans un même personnage, saison après saison.

Je me souviens vous avoir vue dans des épisodes de Beverly Hills quand j’étais ado. Votre chance, finalement, c’est que les auteurs ont rapidement supprimé votre personnage ?

Sans aucun doute ! Si j’étais restée dans cette série, je n’aurais pas été choisie pour Boys don’t cry de Kimberly Peirce, et ça m’a plutôt réussi. (Rires.)

Qu’avez-vous gardé de l’expérience ?

Beverly Hills

C’était ce que c’était… Ce n’était pas tellement enrichissa­nt à vrai dire. Mais j’étais contente de pouvoir travailler, en tant que jeune actrice, de pouvoir gagner ma vie. Ce n’était pas ce qui me motivait pour faire ce métier, mais ça a payé mes factures.

Du coup, vous n’avez sûrement pas regardé la nouvelle série Beverly Hills l’année dernière ?

Je ne savais même pas qu’ils avaient fait une nouvelle série. Personne ne m’a rien dit.

Parlons de Boys don’t cry, sorti il y a vingt ans, qui a été un tournant dans votre carrière, avec un premier Oscar à la clé. Cela a changé la façon dont vous avez choisi vos rôles par la suite ?

J’ai toujours recherché des rôles en adéquation avec la manière dont je vois le monde. Boys don’t cry était, de ce point de vue, un parfait moyen de rappeler aux gens qu’il faut laisser chacun vivre sa vie comme bon lui semble. C’était un débat qui devait être posé sur la table. Et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je suis devenue actrice. Je voulais donner une voix aux outsiders, à ceux qui vivent leur vie différemme­nt. Boys don’t cry est un film qui m’a profondéme­nt marquée et qui a fait de moi la personne que je suis aujourd’hui. C’est sûr que depuis, je continue de chercher des rôles dans la même veine que celui de Teena Brandon.

Le film demeure toujours aussi pertinent en 2020, mais ironiqueme­nt, on a le sentiment que vous ne pourriez plus jouer dedans. Que le rôle serait obligatoir­ement incarné par une actrice transgenre…

Oui, je suis d’accord. Et je trouve ça formidable que les acteurs transgenre­s puissent désormais jouer, mais aussi raconter leurs propres histoires. C’est une période cruciale pour eux. Il y a beaucoup de contenus qui leur sont proposés maintenant, et je suis ravie qu’ils puissent occuper cet espace.

Away est votre premier projet pour Netflix. Pourquoi avez-vous accepté ?

Pour plein de raisons ! Mais la principale est que j’ai toujours rêvé de devenir astronaute. J’ai eu très envie de pouvoir goûter un peu à cette expérience spatiale, à travers une fiction. Et puis j’ai adoré ce personnage qui doit quitter son mari et sa fille pour partir sur Mars. C’est une vraie cheffe, avec une part de vulnérabil­ité.

DANS L’ESPACE, IL N’Y A PAS DE FRONTIÈRES. C’EST QUELQUE CHOSE QUI FERAIT DU BIEN SUR TERRE AUJOURD’HUI ET QUI NOUS FAIT TOUS ENVIE.

La particular­ité d’Away, c’est que la série traite de la conquête spatiale à travers un prisme féminin, presque féministe même…

C’est vrai qu’une femme dirige la mission, mais en même temps, elle fait une place égale aux hommes. Après, j’espère que le personnage inspirera plein de jeunes filles. Qu’elles comprendro­nt à travers la série que si elles bossent dur, elles auront la possibilit­é d’embarquer dans ce genre d’aventure en étant aux commandes.

Pourquoi est-ce que les cinéastes, et l’humanité pour ainsi dire, sont tellement attirés par la conquête des étoiles et les planètes lointaines ?

Je crois qu’il y a cette idée d’un truc qui nous dépasse tous. C’est fascinant. C’est pour ça que je rêvais de devenir astronaute. Il y a une sorte de respect immense pour ceux qui s’aventurent aussi loin. Et puis, je pense qu’il y a aussi cette idée que dans l’espace, il n’y a pas de frontières. C’est quelque chose qui ferait du bien sur Terre aujourd’hui et qui nous fait tous envie.

C’est la première fois que vous avez un rôle dans l’espace, non ?

Oui, c’est vrai. Et c’était génial, parce qu’on est allé à Houston, pour discuter avec des astronaute­s, des gens de la station spatiale internatio­nale, passer du temps dans le quartier général de la Nasa. On a pu apprendre plein de choses sur la pression de ce job, les entraîneme­nts à subir, la peur dans l’espace… C’était dingue.

On avait coutume de dire que les femmes peinent à trouver de bons rôles à Hollywood après 40‡ans. Est-ce toujours vrai aujourd’hui ?

Non, je crois que ce n’est plus tout à fait le cas. Maintenant que le mâle blanc n’est plus au centre de tout… Les histoires étaient habituelle­ment racontées à partir de ce point de vue-là, mais le monde du cinéma est en train de s’ouvrir. C’est vrai pour les femmes, mais aussi pour les genres, les races, etc. C’est excitant que le paradigme change, à la fois en tant qu’actrice, mais aussi pour tout le monde, parce que les gens, dans toute leur diversité, sont bien mieux représenté­s à l’écran.

Vous êtes l’une des rares comédienne­s à avoir remporté deux Oscars de la meilleure actrice (pour Boys don’t cry et Million Dollar Baby). Dans quelle mesure cela a-t-il bouleversé votre carrière ?

Franchemen­t, ça a tout changé pour le mieux. J’ai eu beaucoup plus d’opportunit­és, on m’a proposé des personnage­s plus intéressan­ts, complexes… Je ne suis pas devenue actrice pour gagner un prix, mais c’est fabuleux d’avoir été honorée pour quelque chose que j’ai adoré faire. Cela dit, je ne veux surtout pas commencer à choisir mes rôles en ayant ça en tête. Parce que là, c’est dangereux ! Ce métier, c’est un peu la loterie. On ne sait jamais vraiment comment un film va être reçu.

Vous avez travaillé avec les plus grands cinéastes, de Christophe­r Nolan à Clint Eastwood en passant par Brian De Palma. Pour qui auriezvous envie de tourner demain ?

Derek Cianfrance ! Dès que j’ai vu son premier film, Blue Valentine, j’ai été fascinée par sa mise en scène. Il a une façon de filmer tellement naturelle, on se croirait presque dans un documentai­re ! J’aimerais aussi beaucoup tourner pour Chloé Zhao, la réalisatri­ce sino-américaine de The Rider. J’ai été bluffée par les nuances de sa direction d’acteurs.

Et ailleurs ? Vous n’avez encore jamais fait de film européen. Vous aimeriez être dirigée un jour par un réalisateu­r français par exemple ?

En fait, j’ai fait un film qui s’appelait L’Affaire du collier [Charles Shyer, 2001], que l’on a tourné à Versailles notamment. C’était un film américain, mais j’ai adoré être en France. J’ai fait pas mal de tournages, d’ailleurs, à travers l’Europe. Mais c’est vrai que j’aimerais bien faire un vrai film européen un jour. C’est un cinéma beaucoup plus nuancé que le nôtre. J’adorerais travailler avec Michel Gondry par exemple. C’est un cinéaste vraiment à part.

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Hilary Swank dans Away
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