Première

LEAVE NO TRACE

La réalisatri­ce de Winter’s Bone plonge à nouveau au coeur de l’Amérique profonde et en revient avec ce film faussement simple, vraiment troublant.

- PQ

Debra Granik filme la marge comme personne. Cet entre-deux sur lequel on peut projeter ce que l’on souhaite. Ce lieu interlope où se développen­t autant la plus précieuse des fleurs que le pire chiendent. La réalisatri­ce la peint avec délicatess­e et une simplicité qui n’est que de surface. Elle l’avait déjà explorée à travers les yeux de la Jennifer Lawrence en pleine éclosion de Winter’s Bone. Cette fois, c’est par le biais de la future sensation Thomasin McKenzie que la cinéaste observe l’espace entre l’âpreté de la vie sauvage et la violence de la vie civile : la douceur du bas-côté. Adaptant le roman de Peter Rock, L'Abandon, Debra Granik s’intéresse à Tom, jeune adolescent­e qui n’a connu comme foyer que la forêt jouxtant Portland. Avec son père (Ben Foster, bouleversa­nt), ancien soldat traumatisé qui a préféré fuir le genre humain, elle vit une existence simple et secrète. Jusqu’au jour où ils sont débusqués et renvoyés de force vers une existence « normale ». Si la réalisatri­ce reprend ici une figure qu’elle avait déjà exploitée dans son documentai­re Stray Dog, à savoir celle du vétéran sujet au stress post-traumatiqu­e, Leave No Trace est avant tout le portrait d’une jeune femme en devenir. D’une adolescent­e découvrant soudaineme­nt sa personnali­té, ses goûts et ses désirs. Naturalist­e et économe en mots, le film joue sur les textures, particuliè­rement au niveau du son, véritable baromètre de la pression ressentie par le duo. Sobre, mais profond et pénétrant.

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Ben Foster et Thomasin McKenzie

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