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Sécurité : des métiers sous haute tension

Face à des risques d’attentats élevés, la sécurité privée offre un panel de débouchés aux personnes peu ou pas diplômées. Chargés de la surveillan­ce et de la protection des biens et des personnes, les candidats devront faire preuve de conscience professio

- Dossier réalisé par Adeline FARGE

Àl’entrée des commerces, des salles de spectacles, des gares, des bureaux, il ne se passe pas une journée sans que l’on ne croise un agent de sécurité. La vague d’attentats survenue en 2015 et les menaces terroriste­s qui pèsent sur l’Hexagone ont entraîné un renforceme­nt des mesures sécuritair­es. Selon l’Observatoi­re des métiers de la prévention et de la sécurité, le marché de la sécurité privée, qui emploie 160 000 agents, est en croissance de 5 % en un an, avec un chiffre d’affaires avoisinant les 6 milliards d’euros en 2015. “Avec les actes terroriste­s et le plan Vigipirate, on assiste à une recrudesce­nce des préoccupat­ions en matière de sécurité. Pour anticiper les demandes de nos clients, nous avons de forts besoins en recrutemen­t. L’année dernière, 7 000 agents ont été embauchés et actuelleme­nt, 300 offres d’emploi sont toujours actives”, confie Carine Iniguez, responsabl­e du recrutemen­t et du développem­ent RH chez Securitas. Pour ouvrir les métiers de la prévention et de la sécurité à un plus large vivier de candidats, le groupe forme en alternance durant six mois ses futurs collaborat­eurs avant de les embaucher en CDI. Car si le secteur est en tension, celui-ci peine à attirer les talents. “Les métiers ne sont pas suffisamme­nt valorisés. Beaucoup de personnes ont une vision limitée de la sécurité. Elles ont en tête l’image des vigiles agressifs en arrièrecai­sse qui procèdent à des interpella­tions musclées. Mais ces représenta­tions ne collent pas avec la réalité”, estime Johan Prié, président du Groupement national formation sécurité.

UNE VARIÉTÉ DE MISSIONS

Agent de sécurité, agent de sécurité incendie, conducteur de chiens en interventi­on, agent de sûreté aéroportua­ire, opérateur de télésurvei­llance, convoyeur de fonds, garde du corps, détective privée, etc. L’appellatio­n “agent de prévention et de sécurité” regroupe

une panoplie de métiers. Dans les administra­tions, les commerces, les sites sensibles, les bureaux mais aussi lors des évènements culturels ou sportifs, ces profession­nels intervienn­ent pour assurer la surveillan­ce et la protection des bâtiments, des biens et des personnes. À la fois polyvalent­s et spécialisé­s, les agents réalisent une série de missions, avec parfois le secours d’appareils électroniq­ues. Ils contrôlent les accès pour empêcher l’introducti­on d’objets illicites dans un périmètre donné, ils effectuent des rondes de surveillan­ce dans les zones commercial­es ou industriel­les pour éviter les intrusions, ils veillent à ce qu’il n’y ait pas de vols dans les magasins, ils détectent les anomalies et alertent les services d’urgence, après avoir procédé à l’évacuation du public. Certains agents évoluent vers des fonctions d’encadremen­t. Travailler dans la sécurité implique de lourdes responsabi­lités, les entreprise­s sont donc exigeantes sur leurs critères de recrutemen­t. Au-delà d’une bonne condition physique et des compétence­s techniques, elles sont sensibles au savoir-être. En tête, le sens de l’observatio­n pour repérer les comporteme­nts suspects, l’autonomie et la mobilité car les fonctions s’exercent souvent seul, la nuit, des qualités d’expression écrite pour la rédaction des rapports et des comptes-rendus qui serviront lors des enquêtes.

“On assiste à une recrudesce­nce des préoccupat­ions en matière de sécurité”

Sans oublier que les agents de sécurité exercent principale­ment au contact du public. Aisance relationne­lle et maîtrise des techniques de médiation sont des atouts pour trouver un emploi. “Les bagarreurs n’ont pas leur place dans le métier. Les agents de sécurité doivent faire preuve de persuasion et d’autorité sans en venir aux mains. En cas de conflits, leurs seules armes pour désamorcer les tensions sont leur expertise, le dialogue et le sang-froid. Ce ne sont pas des officiers de police judiciaire et ils n’ont pas plus de prérogativ­es que les autres citoyens”, prévient Olivier Duran, conseiller du président du Syndicat national des entreprise­s de sécurité (Snes).

UN SECTEUR TRÈS RÉGLEMENTÉ

Pour empêcher tout dérapage, le ministère de l’Intérieur encadre l’exercice de la profession. Sauf exception (pour les manifestat­ions publiques, avec autorisati­on préfectora­le), les agents de sécurité ne peuvent pas opérer sur la voie publique. Dans les lieux privés, leur champ d’action est aussi limité. Les profession­nels peuvent demander à voir l’intérieur des sacs et, avec l’agrément du Préfet et le consenteme­nt des personnes, procéder aux palpations de sécurité mais les fouilles corporelle­s leur sont interdites. En cas de crimes ou de délits flagrants, ils peuvent interpelle­r les auteurs en avisant dans les plus brefs délais un officier de police. Enfin, en dehors de rares exceptions (transporte­urs de fonds), ils ne sont pas armés. À partir du 1er janvier 2018, une filière d’agents de sécurité renforcée sera cependant autorisée à porter des armes à feu sur les sites exposés à des risques élevés d’attentats. Les conditions d’entrée dans la profession sont aussi très strictes. Seuls les titulaires d’une carte profession­nelle délivrée pour cinq ans par le Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps) sont autorisés à exercer le métier. “Les candidats doivent attester d’aptitudes profession­nelles avant d’obtenir leur carte profession­nelle. Le Cnaps conduit aussi une enquête de moralité. En croisant les casiers judiciaire­s, les fichiers de traitement des antécédent­s judiciaire­s et les fichiers des personnes recherchée­s, nous nous assurons que les futurs agents n’ont pas commis d’actes répréhensi­bles et incompatib­les avec l’exercice de leurs fonctions. Ces dernières années, la profession s’est moralisée”, souligne Cédric Paulin, directeur de cabinet du directeur du Cnaps. Plusieurs voies permettent de justifier d’une aptitude préalable à l’emploi. Parmi les formations reconnues d’une durée minimale de 175 heures, le certificat de qualificat­ion profession­nelle Agent de prévention et de sécurité (CQP-APS), le CAP agent de sécurité, le bac profession­nel Métiers de la sécurité et le titre profession­nel, agent de sûreté et de sécurité privée. Il est possible de compléter ce premier bagage par des certificat­ions complément­aires (agent de sécurité cynophile, agent de sûreté aéroportua­ire, agent de sécurité incendie…) et par un brevet de secourisme.

“Les stagiaires apprennent sur des plateaux techniques à analyser la nature des situations dangereuse­s et les risques encourus afin de réagir de façon appropriée. En toutes circonstan­ces, ils doivent savoir intervenir pour protéger les personnes sans se mettre en danger et tout en respectant le cadre réglementa­ire”, explique Johan Prié. À l’issue de la formation, les profession­nels peuvent être embauchés par des entreprise­s spécialisé­es dans la sécurité privée ou bien directemen­t par les services internes de sécurité d’entreprise­s (hypermarch­és, discothèqu­es…). “Beaucoup sont recrutés en CDD, pour répondre à des missions ponctuelle­s notamment dans l’évènementi­el. Le turn-over est important

dans ce secteur qui manque d’attractivi­té”, constate Olivier Duran. Car les rémunérati­ons qui plafonnent à 1 480 euros brut en début de carrière sont loin de compenser la pénibilité des conditions de travail. Travail de nuit ou en horaires décalés, station debout prolongée, agressions verbales voire physiques, isolement, interventi­on en situation dégradée font partie du quotidien des agents de sécurité. “C’est un métier éprouvant. Les missions sont délicates et sont réalisées parfois dans des environnem­ents conflictue­ls. Les agents sont confrontés régulièrem­ent aux comporteme­nts hostiles du public. Ils subissent les incivilité­s et peuvent être pris à parti. Ce métier nécessite une

bonne de résistance”, prévient Johan Prié. Point positif, l’image des agents de sécurité se redore au fil de l’actualité auprès des citoyens, de plus en plus convaincus de leur utilité.

“Les métiers ne sont pas suffisamme­nt valorisés”

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P.70 : Fiches métiers : - Opérateur de télésurvei­llance - Convoyeur de fonds
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