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À VOS CÔTÉS

Les Cafés Joyeux conjuguent insertion profession­nelle et handicap

- Camille Boulate

En apparence, les cafés Joyeux sont des établissem­ents comme les autres où sont proposés cafés, sandwiches et pâtisserie­s. De plus près, ils ont une particular­ité : le personnel est majoritair­ement composé de personnes en situation de handicap cognitif ou mental. “Notre ambition est simple : dépoussiér­er la vision du handicap”, confie Camille Lorthiois, manager-gérante du point de vente situé au coeur de Paris, ouvert en mars dernier. Ici plus qu’ailleurs, la différence est mise en avant, valorisée et se voit même symbolisée dans les tenues des salariés qui arborent à leurs pieds une chaussure grise et orange. “C’est une façon de dire que la différence est une chance. Car si mon pied droit est différent de mon pied gauche, l’un a besoin de l’autre pour avancer !”, explique Camille Lorthiois. Ce mercredi midi, la dizaine de tables est prise d’assaut et les salariés enchaînent les commandes derrière le comptoir. “Nous avons une vraie clientèle de quartier”, assure la manager.

“Nous voulons dépoussiér­er la vision du handicap”

HORAIRES AMÉNAGÉS

Pour le lancement, une vingtaine de personnes ont été recrutées en stage. “L’idée était de leur permettre de découvrir le métier, sans le stress d’un contrat derrière, mais aussi de confirmer que la structure leur convenait”, insiste Camille Lorthiois. Trois mois après l’ouverture, une quinzaine de personnes travaillen­t en CDI, supervi

sées par trois managers. Chez Joyeux, tout a été adapté pour faciliter les conditions de travail. Dès qu’un client passe commande, par exemple, il se voit remettre une brique de Lego. Une autre, de la même couleur, est posée sur le plateau permettant aux salariés en salle de reconnaîtr­e immédiatem­ent qui attend sa commande. En cuisine, les recettes sont écrites de telle manière qu’elles sont faciles à lire et à comprendre, agrémentée­s bien souvent d’images explicativ­es. “Ce sont des choses simples mais qui fonctionne­nt, souligne Camille Lorthiois. Les horaires ont également été aménagés en fonction de la fatigabili­té du personnel.” Ainsi, les équipiers Joyeux travaillen­t entre 15 et 25 heures par semaine et se relaient sur trois créneaux distincts de 8h30 à 19h30.

PATIENCE ET BIENVEILLA­NCE

Le rush du midi touche à sa fin vers 14 heures. Le temps pour les équipes en salle de faire le point sur les produits en vitrine, de débarrasse­r les plateaux et nettoyer les tables. En cuisine non plus on ne faiblit pas. Antoine et Abou sont toujours à pied d’oeuvre et découpent les légumes pour les plats du lendemain. “Ils préparent une ratatouill­e, m’explique Garance, chef de cuisine, pendant qu’elle dresse les fonds de tarte. J’ai fait le choix de travailler avec des produits frais et à 80 % issus de l’agricultur­e biologique. Cela me donne une palette de tâches plus larges à leur apprendre.” À plusieurs reprises, la jeune femme prendra le temps de leur montrer comment bien tailler des oignons, des poivrons et des aubergines. À chaque étape, elle rassurera les deux cuisiniers sur leurs capacités. “C’est une remise en question permanente, car s’ils n’ont pas compris c’est que j’ai mal expliqué, insiste-t-elle. J’essaie de leur montrer des gestes simples. Car en fonction de leur handicap, il y a des choses qu’ils ne peuvent pas faire comme couper un concombre sur toute la longueur. C’est donc à moi de m’adapter et de trouver des solutions.” Pour les chefs d’équipe, travailler avec des personnes en situation de handicap ne change rien à leur façon de manager, au contraire. “Nous nous devons d’être vigilants et leur parler le plus simplement tout en ayant une juste autorité, explique toutefois Camille Lorthiois. C’est une vraie école de la patience.” De son côté, Garance l’assure : “Ce n’est pas leur handicap qui les définit ! Comme pour tout salarié, c’est d’abord le caractère que nous devons apprivoise­r et gérer.”

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 ??  ?? L’heure du déjeuner est une période chargée pour les salariés qui enchaînent les commandes.
L’heure du déjeuner est une période chargée pour les salariés qui enchaînent les commandes.
 ??  ?? Les recettes sont affichées un peu partout dans la cuisine.
Les recettes sont affichées un peu partout dans la cuisine.
 ??  ?? Garance montre à Antoine et Abou comment bien découper des poivrons.
Garance montre à Antoine et Abou comment bien découper des poivrons.
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Pendant les périodes plus calmes, les salariés nettoient la salle.

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