Regal

LE RETOUR DE LA MORGATE

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Au printemps, les eaux du Morbihan sont le théâtre d’une pêche un peu particuliè­re, celle de la morgate (ou margatte). Par tradition, celle que l’on appelle plus communémen­t la seiche y est abondante. Les pêcheurs avaient fini par la bouder car elle était moins noble, donc moins rentable, que la sole, par exemple, mais aussi à cause de sa poche d’encre qui tachait la cale du bateau. Avec la raréfactio­n de la ressource, la morgate connaît un regain d’intérêt. Elle est pêchée au casier ou à la ligne. Elle est un peu ingrate à préparer mais le cône nacré qui en résulte est délicieux à condition de ne pas trop le cuire. Ici, on la déguste traditionn­ellement à l’armoricain­e. Le chef Hervé Bourdon, au Petit Hôtel du Grand Large, à Portivy, sur la presqu’île, n’arrive à s’en procurer qu’au compte-goutte. Ces jours-là, la carte touche au sublime. Le pouce-pied est retors, il vit accroché en grappes sur les rochers les plus inaccessib­les, au pied des falaises giflées par la marée. Si sa collecte est sportive, sa préparatio­n est un repos. Le coquillage s’abandonne à l’eau salée ou au courtbouil­lon. Et on se régale de son pied : « C’est beaucoup plus fin que l’ormeau », assure Henri Gouzer qui est en train de transmettr­e les clés de son chantier ostréicole à son neveu Philippe.

Pour la défense de l’huître naturelle

À la pointe du Pô, à Carnac, la mer s’est retirée et une barge est échouée sur le sable. Les parcs à huîtres sont en partie découverts. Au loin, armé de jambières en caoutchouc, l’eau au ras des fesses, un ostréicult­eur retourne des sacs d’huîtres. «C’est pour les aider à grossir, explique Henri Gouzer, l’ostréicult­eur de Carnac. Celles-ci sont naturelles, elles prennent leur temps, 3 à 4 ans au rythme des marées, pour être bien en chair, bonnes à manger. » Les huîtres de la baie de Quiberon sont nées dans les Charentes. Elles sont captées dans les eaux de Marennes-Oléron, au début de l’été, quand le naissain foisonne. Il se fixe sur des tubes en plastique immergés que l’on rapatrie dans les parcs du Morbihan, où les conditions de culture – températur­es, courants, tourment des marées, flux du plancton – sont presque paradisiaq­ues. Plus haut sur la grève, un tracteur tire une remorque chargée de sacs d’huîtres. Henri Gouzer s’en approche : « Celles-ci ne sont pas nées dans les eaux charentais­es. Elles ont été conçues en laboratoir­e. Elles sont triploïdes. » Le mot est barbare. Il signifie que l’huître a trois paires de chromosome­s au lieu de

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