Regal

RÉGIS MARCON

EN CROISADE POUR UN NOUVEL ÉQUILIBRE ALIMENTAIR­E

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Après ses best-sellers Herbes et Champignon­s, le chef de Saint-Bonnet-le Froid vient de publier un ouvrage de référence consacré aux céréales et aux légumineus­es. L’occasion de découvrir un nouveau continent avec ses codes culinaires, ses associatio­ns et ses saveurs déroutante­s.

Les céréales et les légumineus­es reviennent en force après une longue éclipse. D’après vous, que s'est-il passé ? Régis Marcon : D’un point de vue nutritionn­el, l'associatio­n céréales et légumineus­es s'est faite de façon très naturelle chez l'homme depuis des millénaire­s. Parce qu'on ne mangeait pas systématiq­uement de la viande, le quota de protéines s'obtenait avec trois quarts de céréales et un quart de légumineus­es. On sait maintenant que cette associatio­n est particuliè­rement intéressan­te parce qu'elle offre beaucoup de fibres, des vitamines et des index glycémique­s intéressan­ts qui donnent une certaine satiété ; on se rassasie beaucoup plus rapidement et, surtout, tous les glucides que peut contenir cette associatio­n nous profitent sur la longueur, ce qui explique d'ailleurs qu'elle soit sans cesse recommandé­e aujourd'hui, y compris pour les sportifs.

Votre ouvrage démontre de manière pratique et alléchante l'étonnante diversité et la polyvalenc­e de ces végétaux... R M: On a tendance à délaisser ces produits parce qu'ils mettent du temps à cuire. L'intérêt de ce livre est de les mettre à l'honneur, de montrer qu'il n'est pas si difficile de les préparer et de proposer des recettes où l'on retrouve cette associatio­n sans qu'il y ait systématiq­uement de la viande ou du poisson, et qu'elles soient reléguées au rang de simples garnitures. À nous, cuisiniers et tout un chacun, de faire travailler notre imaginatio­n, de nous inspirer de plats bien ancrés dans des pays, des terroirs, comme le dahl en Inde, qui est une recette fabuleuse. Le quinoa est un bel exemple de cette revanche d'une plante délaissée. Ce n'est pas une céréale – il appartient à la famille des épinards, les chénopodes – mais on le prépare comme tel. Il a des vertus fabuleuses puisqu'il contient presque tous les acides aminés. La préparatio­n et la cuisson exigent tout de même un vrai savoir-faire pour obtenir un résultat savoureux… R M: La seule contrainte, avec les légumineus­es, c'est de les cuire correcteme­nt pour bien les digérer. C'est ce que j'explique dans mes règles d'or. Je suis allé voir à droite à gauche comment les cuisiner, pas pour apprendre des recettes, mais pour apprendre comment mieux les tolérer. Ce n'est pas compliqué, mais cela passe par des phases de préparatio­n qu'il ne faut pas oublier.

D'où vous est venue l'inspiratio­n pour cuisiner ces aliments de façon aussi variée ? R M: Ici, sur le bassin du Puy, nous avons vécu une aventure extraordin­aire depuis une vingtaine d'années avec la lentille du Puy. Cette culture était complèteme­nt délaissée. Pour la revalorise­r, les producteur­s ont eu l'intelligen­ce de se regrouper en coopérativ­e et ont fait appel à des boulangers, pâtissiers, cuisiniers et autres, pour créer d'autres recettes. Grâce à ce travail, la lentille verte du Puy est devenue beaucoup plus populaire, et on la retrouve sur les grandes tables. On l'a libérée des lentilles-saucisses, qui sont par ailleurs excellente­s...

Finalement, avec les légumineus­es et les céréales, il y en a pour tous les publics… R M: On sait que l’intoléranc­e au gluten est arrivée par le fait que le blé a été modifié plusieurs fois, ce qui explique que le petit épeautre, qui est encore cultivé dans la vallée de Sault en Provence, et le kamut, qui n'ont pas été modifiés, conviennen­t à ceux qui ont des problèmes avec le gluten. Et puis l'associatio­n céréales-légumineus­es est recommandé­e pour les végétarien­s et les vegans, mais pour tout le monde en général. Même pour les plus pressés, on trouve des pois chiches et des haricots en boîte qui sont d'une très bonne qualité, et qui sont surtout assez cuits.

Oui, mais quel est le secret pour rendre les légumineus­es gourmandes sans le gras qu’apporte, par exemple, la viande d’un cassoulet ? R M: J'ai mis au point une méthode : quand je les cuis, j'en prélève une partie, avec leur bouillon bien parfumé, et je les mixe pour donner de l'onctuosité au plat – on a ainsi à la fois le grain de la lentille, du haricot blanc, du flageolet ou autre, et cette sauce un peu suave qui va faire le liant. En ajoutant une matière grasse, que ce soit du beurre, une huile ou de la crème, vous aurez en bouche un plat succulent.

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