DEUX CAUTIONS CONTRAINTES PAR LEUR ENGAGEMENT
Invoquer la disproportion de son cautionnement pour tenter d’y échapper n’est pas toujours aisé.
Le cautionnement consenti par une personne physique au pro t d’un créancier professionnel ne doit pas être manifestement disproportionné à ses biens et revenus. Auquel cas, la caution peut être libérée de son engagement, sauf si lorsqu’elle est appelée en paiement son patrimoine lui permet de rembourser la dette.
Cet argument est régulièrement invoqué par les cautions assignées en remboursement par le banquier lorsque la société béné ciaire du prêt garanti est mise en liquidation judiciaire et ne peut plus rembourser elle-même.
En pratique, c’est aux juges saisis d’apprécier souverainement les éléments du dossier qui leur est soumis. De leur décision dépendra le sort de la caution.
On sait déjà que pour apprécier le caractère disproportionné de l’engagement, il faut se placer à la date de sa conclusion et tenir compte des engagements déjà consentis (même si ces derniers s’avèrent ine caces ensuite). En revanche, ni les revenus escomptés de l’opération ni les cautionnements postérieurs ne doivent être pris en considération. Deux a aires récentes fournissent de nouvelles précisions utiles sur les éléments pris en considération par les juges.
CAUTION ET OSÉO
Une société obtient un prêt bancaire grâce à la caution de son gérant donnée à hauteur de 92000 € et à une garantie complémentaire de l’organisme Oséo. Puis la société périclite et la banque assigne le gérant en exécution de son engagement. Le gérant se défend en reprochant à la banque de lui avoir fait signer un engagement de caution disproportionné par rapport à ses revenus.
Les juges constatent que la banque s’est basée sur le revenu mensuel du gérant, qui était de 3 000 €, et sur la valeur de sa résidence principale. Ils considèrent que son engagement à hauteur de 92000 € n’était donc pas disproportionné. Le gérant fait alors valoir que, selon les conditions générales d’oséo, sa résidence principale ne peut pas être saisie par la banque. Selon lui, elle n’aurait donc pas dû être prise en compte par la banque. Cet argument est rejeté : les conditions de garantie d’oséo interdisent, certes, la saisie du logement mais n’empêchent pas que la valeur de ce bien soit pris en compte par la banque pour évaluer le patrimoine de la caution et, par la même, le caractère proportionné de son engagement. En conséquence, la caution devra tenir son obligation (cass. com. 18 janvier 2017, n° 15-12723).
CONSENTEMENT DU CONJOINT
IUne banque consent un prêt à une société garanti par une personne mariée sous le régime de la communauté, avec le consentement exprès de son épouse. La société est mise en liquidation judiciaire et la banque demande à la caution de rembourser le prêt. La caution conteste. Elle prétend que son engagement était disproportionné à ses biens et revenus. Argument rejeté par les juges : le consentement exprès donné par le conjoint a pour e et d’étendre l’assiette du gage des créanciers aux biens communs. La proportionnalité de l’engagement contracté par la caution seule s’apprécie donc tant au regard de ses biens et revenus propres que ceux de la communauté, incluant les salaires de son épouse (cass. com. 22 février 2017, n° 15-14915).
Sources. C. consom. art. L. 332-1 ; c. civ. art. 1415