ENTREPRISE VICTIME D’UNE ESCROQUERIE : LE FISC A-T-IL SON MOT À DIRE ?
Le sc est en droit de remettre en cause les résultats scaux d’une entreprise, et d’opérer un redressement, dès lors qu’il peut prouver l’existence d’un « acte anormal de gestion » de la part des dirigeants c’est-à-dire que leur décision n’a pas été prise dans l’intérêt propre de l’entreprise. Pour ce faire, le sc ne peut cependant s’ingérer dans la gestion de l’entreprise. Il ne doit pas non plus se prononcer sur l’ampleur des risques pris par l’entreprise pour améliorer ses résultats, sauf en cas de détournements de fonds rendus possibles par le comportement délibéré ou la carence manifeste des dirigeants (voir Rfconseil 290, p. 7). Nouvelle illustration sur la marge de manoeuvre du sc à travers deux arrêts récents.
UN DIRIGEANT DÉDOUANÉ
Une société comptabilise une perte importante à raison d’une commande auprès d’un nouveau fournisseur étranger réglée mais jamais livrée. Le sc refuse la déduction de cette perte. Il considère que le gérant a commis un acte anormal de gestion car il a fait courir un risque manifestement exagéré à son entreprise et il a rendu possible l’escroquerie par son comportement. Les juges donnent tort au sc : c’est au regard du seul intérêt propre de l’entreprise qu’il convient d’apprécier s’il s’agit d’un acte de gestion normale ou pas. En l’occurrence, bien que le dirigeant ait fait courir des risques à son entreprise en ne déployant pas les diligences nécessaires pour éviter cet incident (paiement total avant la livraison, contrôle insu sant du bon de commande et des documents douaniers qui se sont révélés être des faux), il n’y a pas eu d’acte anormal de gestion, dès lors que l’opération réalisée entre bien dans l’objet social de l’entreprise et que le sc n’a pas apporté la preuve que le gérant aurait été complice de cette escroquerie (CAA Versailles 7 février 2017, n° 15VE03890).
Le fisc peut-il reprocher au dirigeant d’être responsable de la situation ? Seulement si le comportement du dirigeant peut e ectivement être qualifié « d’acte anormal de gestion ».
PASSIVITÉ INEXPLICABLE DU DIRIGEANT
IUn supermarché comportant un distributeur de billets a été victime à plusieurs reprises de vols de billets lors de son rechargement. Il a déduit les pertes subies au cours de plusieurs exercices, déduction rejetée par le sc estimant que les carences dans l’organisation de la société et l’absence de dispositifs de contrôle étaient, directement ou indirectement, à l’origine de ces vols.
Les juges considèrent que le sc était dans son bon droit : le gérant n’avait pas agi dans l’intérêt de l’entreprise en rendant possible ces détournements par son attitude manifestement laxiste. En l’espèce, après avoir décelé ces vols, la société avait attendu 11 mois avant de les signaler formellement au transporteur de fonds et 18 mois pour di user des consignes écrites à l’attention des salariés concernés. Elle n’avait en outre déposé plainte que 3 ans après (CAA Marseille 23 février 2017, n° 15MA03323).