HEURES SUPP’ : DEUX ERREURS À ÉVITER
En matière d’heures supplémentaires, la réglementation est stricte et les pièges fréquents. Certains employeurs en ont fait l’expérience.
NE PAS SUPPRIMER LES HEURES SUPP’ PRÉVUES AU CONTRAT
DES HEURES SUPP’ CONTRACTUALISÉES. Depuis son embauche le 16 novembre 2007, une salariée avait toujours perçu un salaire correspondant à 186,33 heures mensuelles composé, selon son contrat de travail, de la manière suivante : 151,67 heures + 17,33 heures supplémentaires majorées de 25 % correspondant à l’horaire contractuel, ce qui faisait 169 heures auxquelles s’ajoutaient encore 17,33 heures supplémentaires majorées de 25 %.
À compter d’août 2011 et sans raison apparente, le versement des 17,33 heures supplémentaires majorées de 25 % s’était interrompu. La salariée licenciée le 14 novembre 2011 réclamait des rappels de salaire.
NE PAS Y TOUCHER SANS L’ACCORD DU SALARIÉ. L’employeur ne peut pas modi er unilatéralement le montant ou la structure de la rémunération d’un salarié. Il lui faut l’accord préalable du salarié, que la modi cation soit minime ou importante En toute logique, les juges ont donc estimé que les heures supplémentaires constituant un élément de la rémunération prévue au contrat de travail, l’employeur ne pouvait pas modi er unilatéralement le contrat et supprimer leur paiement (cass. soc. 7 mars 2018, n° 17-10870).
En pratique. Si le salarié refuse une proposition de modi cation de sa rémunération, l’alternative est : soit de renoncer et maintenir la rémunération en l’état ; soit de licencier le salarié, mais à condition d’avoir un motif réel et sérieux sans lien avec le refus de la modi cation du salaire (ex. : motif économique). Dans certains cas, un tel désaccord peut inciter à négocier une rupture conventionnelle.
NE PAS COMPENSER LES HEURES SUPP’ AVEC D’AUTRES SOMMES
IUN SALARIÉ QUI ABUSE DU TÉLÉPHONE. Une salariée, coi euse depuis 15 ans, a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif que son employeur ne lui a pas payé plusieurs heures supplémentaires. L’employeur reconnaissait devoir 56,5 heures supp’ réalisées sur 3 ans, pour un montant de 826,27 €, mais refusait de les payer car selon lui, la salariée aurait abusivement utilisé le téléphone de l’entreprise et lui serait redevable à ce titre de 2 296,18 €. Il avait ainsi sanctionné la salariée et compensé cette « dette » avec la rémunération des heures supp’.
UNE SANCTION ILLÉGALE. En procédant de la sorte, l’employeur a e ectué une compensation illicite, violant l’interdiction des sanctions pécuniaires posée par le code du travail. De plus, les juges ont pointé l’impossibilité d’imputer les appels téléphoniques incriminés à la salariée. Ils ont donc prononcé la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur.
Au nal, l’addition s’est avérée salée pour l’employeur puisqu’il a été condamné à verser 9 984 € de dommages et intérêts à la salariée, en plus de l’indemnité de licenciement (4 143,36 €) et de l’indemnité compensatrice de préavis (3 328 € + congés payés), sans oublier le remboursement de 6 mois d’allocations chômage à Pôle Emploi (cass. soc. 31 janvier 2018, n° 1614619).
En pratique. Face à ce type d’abus, lorsqu’il est avéré, vous pouvez user de votre pouvoir disciplinaire à l’encontre du salarié. La sanction prise doit être proportionnée à la faute commise. En revanche, gardez-vous de procéder à toute retenue ou compensation avec le salaire, qui sera jugée comme une sanction pécuniaire illicite.