Tiken Jah Fakoly
BARCLAY/UNIVERSAL En quelques albums, le chanteur issu de Côte d’Ivoire s’est imposé comme l’un des nouveaux maîtres du reggae et son nouvel album bilingue, enregistré entre Bamako et Paris, en constitue la preuve irréfutable avec sa richesse instrumentale qui est l’oeuvre d’un big band impressionnant (guitares acoustiques et électriques, cuivres, choeurs, instruments traditionnels et percussions diverses). Fela était le maître de l’afro-jazz, Tiken Jah Fakoly est celui de l’afro-reggae, et il partage avec son illustre aîné le goût des mélopées obsessionnelles et une véritable passion pour la cause africaine, comme en atteste “Le Prix Du Paradis” et son refrain envoûtant. Dès l’ouverture panafricaine, on est happé par son aisance à conjuguer les rythmes jamaïcains sur le mode africain, en les confrontant à d’autres influences musicales de son continent, à des rythmes tribaux et à des instruments mandingues. La conjonction donne toute sa saveur à ses hymnes militants francophones, portés par une urgence moelleuse et la force de ses refrains mélodieux : “Dernier Appel”, “Quand L’Afrique Va Se Réveiller”. Mais le métissage revendiqué saute allègrement les frontières et affirme sa dimension universelle à l’occasion d’un medley unissant harmonieusement, avec la participation de Patrice, un classique du jamaïcain Max Romeo (“War Ina Babylon”) et le manifeste pacifiste de John Lennon (“Give Peace A Chance”). Et le chanteur engagé n’hésite pas à s’offrir une parenthèse soul (“Too Much Confusion”), ou à s’aventurer du côté de la complainte amoureuse (“Tata”) ou mortuaire (“Saya”), en jouant la carte de la simplicité et du dépouillement pour titiller l’émotion. H.M.