Jerry Lee Lewis
La section rythmique Buckler/ Foxton a toujours été un atout grandiose pour le groupe, et ce que Weller fait à la guitare est beaucoup plus subtil que ce que pratiquaient alors la plupart de ses confrères de la scène punk anglaise. Le problème est plutôt ailleurs : survitaminé sur scène et armé d’une seule guitare, Weller a tendance à chanter dans un registre ultra viril parfois un peu bourrin, incapable de reproduire les subtilités vocales que lui autorise le studio. Mais le parcours établi montre des progrès d’écriture bondissants, assez schizophréniques d’ailleurs : les compositions du groupe évoluent dans une pop blanche très ouvragée sous influence Who/ Kinks, mais les reprises montrent un attachement indécrottable pour la musique noire, bien que changeant sensiblement à travers les âges : en 1977 c’est “Heat Wave” de Martha & The Vandellas, en 1982 c’est “Move On Up” de Curtis Mayfield, au titre prémonitoire : Weller allait bien bouger pour débuter sa période Style Council.
Bear Family Ok, Ok, ce n’est pas tous les jours qu’on reçoit, sans rien avoir demandé, et sans avoir dépensé un rouble, un coffret Bear Family de 18 CD consacré au Killer, le grand, l’immense, sa seigneurie Jerry Lee Lewis, chez Sun. Après un bref évanouissement, pourtant, la raison revient et un rapide calcul est effectué. Il doit y avoir erreur : Jerry Lee n’est resté que quelques années à foutre le feu chez Sam Phillips après son arrivée en 1956 sur le label de Memphis. Déjà, le coffret Jerry Lee de la maison allemande de 1989 proposait neuf CD, ce qui était beaucoup trop. Nous arrivons aujourd’hui au double... Qu’y a-t-il dans cette boîte de Pandore au vilain dessin manifestement réalisé par un recalé des beaux arts ? Tout. Tout ? Oui, tout : c’est-à-dire toutes les prises, tous les faux départs, etc. Six cent vingt-trois morceaux, tout en mono, tout en stéréo, cent prises inédites ! Dans l’ordre chronologique des séances ! Pour faire bref : c’est tout simplement impossible à écouter. Reste, comme toujours avec les coffrets de la maison allemande, un livre somptueux. Mais à 300 le bout, inutile d’être bon en maths pour comprendre que l’achat d’un bon double CD Sun réunissant les prises master et du livre “Hellfire” (Nick Tosches) sera nettement plus rentable.