Pur moment de cinéma The Revenant
Toujours en manque de concepts originaux et de scénars dingos,
Hollywood s’en va fouiner dans les succès d’antan et les petits chefs-d’oeuvre oubliés en à tout va. Parfois pour le pire (voir “Poltergeist”, “Carrie” ou “The Fog” pour prendre quelques redites foireuses de films fantastiques cultes des années 70-80), mais également pour le meilleur. Flash-back... Au tout début des années 70, Richard C Sarafian, cinéaste américain au look d’ogre qui adorait
selon son biographe, réalise un road-movie contestataire/ post-“Easy Rider” où un ex-vétéran du Vietnam se fait courser dans le désert par des patrouilles de flics. Devenu culte avec les années, “Point Limite Zéro” (qui ressort en salles fin mars) est également une ode à la liberté, à l’air pur et aux bienfaits de la nature.
(selon “Le Dictionnaire Des Films Américains” de Tavernier et Coursodon) que l’on retrouve dans le film suivant de Sarafian, “Le Convoi Sauvage” (disponible en DVD chez Wild Side), grand western atypique où un trappeur laissé pour mort par ses compagnons de voyage survit dans la nature avant de régler ses comptes sous la neige et le vent. Un authentique survival, probablement plus proche des grands romans d’aventures à la Herman Melville que des purs westerns à la John Ford ou Anthony Mann. Impossible donc d’en faire un remake en s’enlisant dans de faux décors numériques. Comment alors réactualiser le film avec élégance ? En contrebalançant les images finalement assez posées du film de Sarafian par une mise en scène ultra énergisante flirtant (quelque part) dans son exploit technique avec “Mad Max : Fury Road”, film de 2015. Et pour ça, le Mexicain Alejandro González Iñárritu sait y faire. Réputé pour ses films choraux proche de Robert Altman et de Claude Lelouch (“21 Grammes” et surtout “Babel”) aux mouvements de caméra fluides qui talonnent au plus près la psychologie de personnages aux destinées tragiques, le réalisateur remporte quatre oscars (film, réalisateur, scénario, photo) en 2014 avec “Birdman”. Une tragi-comédie surréaliste sur la fin de parcours brinquebalante d’un acteur de renom que la caméra d’Iñárritu colle sans cesse aux basques pour mieux suivre sa déchéance mentale. Notamment dans plusieurs plans séquences tortueux qui font également la force immersive de “The Revenant”. Dans ce re-“Convoi Sauvage”, des trappeurs ayant survécu à une attaque d’Indiens furibards s’échappent en bateau. L’un d’eux, Glass (Leonardo DiCaprio), férocement attaqué par un ours, est laissé pour mort par un de ses compagnons douteux (Tom Hardy). Le corps en lambeaux, Glass se met en tête de rejoindre le groupe pour se venger de celui qui l’a laissé pour mort... Iñárritu ne la joue donc plus Lelouch/ Altman, mais plutôt Ruggero Deodato et Robert Zemeckis ! Comme Ivan Rassimov dans “Le Dernier Monde Cannibale” ou Tom Hanks dans “Seul Au Monde”, Leonardo se retrouve seul une grande partie du film face à la faim, au froid et à la nature déchaînée. Constamment plaqué à moins de cinquante centimètres de l’objectif d’Iñárritu qui fait corps avec sa peau abîmée et son âme bafouée, il survit comme il peut sur 300 kilomètres d’environnement hostile. Ce qui donne droit aux deux grands et incroyables moments glaçants du film : un plongeon avec un cheval dans une rivière (en plan séquence !) et un corps-à-corps féroce avec un grizzly dont le réalisme et la sauvagerie ont fait le buzz sur les réseaux sociaux. Nommé aux oscars pour sa prestation très (il a tourné par – 20°C et a bouffé tout cru un authentique foie de bison), se donne à fond dans ce spectaculaire western aventureux et terreux qui — malgré son filmage limite frime — reste au moins un pur et vrai moment de cinéma