Go Pokemon, go !
On y est ! La réalité n’existe plus, la virtualité n’existe plus, les deux ont fusionné pour dessiner un nouveau monde étrange, paradoxal. “POKEMON GO”, chez Nintendo, disponible en téléchargement gratuit sur iPhone et Android, débarque enfin en France, après un retard qui avait affolé la toile. Il s’agit de se promener simplement armé de son téléphone et de capturer les Pokemon qui se cachent dans son quartier. La chose paraît saugrenue et elle est pourtant bien tangible. Partout sur la planète, des millions d’adeptes scrutent, avancent, épient, imaginent et débusquent. C’est plutôt hallucinant. Déjà plus de 20 millions de tweets dans le monde ! Des enfants fans comme des adultes récemment convertis ou ravis de retrouver leurs sensations prépubères explorent leur environnement avec une fébrilité extraordinaire. Cette quête postmoderne peut également s’accomplir en groupe, il est possible de se prendre en photo avec le Pokemon pris au piège, de le customiser à son image. De l’autre côté de l’Atlantique, le phénomène a pris une ampleur historique : les plus grands talk shows ne parlent plus que de ça. Certains citoyens au-dessus de tout soupçon sont devenus littéralement dingues, une adolescente, pensant avoir touché le Graal, est même tombée sur un cadavre, au bord d’une rivière, un champion de MMA a, en direct, soumis son adversaire avant de le capturer façon Pokemon, l’action Pokemon a gagné 25 %... En Syrie, des enfants et des rebelles ont même détourné le jeu pour alerter l’humanité sur leurs conditions de vie atroces... Bref, les petites créatures japonaises, au départ créées par Satoshi Tajiri dans les années 90, sont sur le point de conquérir la Terre. Drôle d’époque tout de même. Pikachu président ? Cela est désormais tout à fait envisageable. Pas besoin d’être devin. Non. Depuis quelques années, la pratique est devenue systématique. Dès que Hollywood sort un blockbuster, celui-ci est accompagné d’un alter ego virtuel sur consoles. Autrefois, ce genre de pratique existait déjà, bien sûr, mais cela relevait plus de l’évènement, et le plus souvent de la catastrophe marketing et commerciale. On ne compte plus les adaptations pixellisées foireuses, bâclées, atroces. L’histoire célèbre et hallucinante d’Atari contraint dans les années 80 d’enterrer dans le désert les milliers d’invendus du jeu consacré à l’extraterrestre hydrocéphale de Spielberg reste un exemple savoureux. Un exemple qui avait su calmer les studios les plus ambitieux quelque temps... Ce nouveau millénaire, lui, se moque bien de tout ça et ne conçoit pas qu’un film se suffise à lui-même. Le libéralisme ne craint qu’une chose : le vide. Les fans hardcore avaient déjà grimacé en apprenant que le film culte d’Ivan Reitman allait subir un lifting féministe en 2016, avec Paul Feig derrière la caméra et évidemment sans le grand Harold Ramis alias Professeur Egon Spengler, mort deux ans plus tôt. Alors, un jeu... “GHOSTBUSTERS”, chez Activision, pour PS4, XboxOne et PC, va devoir faire ses preuves rapidement pour ne pas envahir les bacs à soldes (les déserts d’aujourd’hui). Le propos : l’action se déroule après le film, troisième du nom. On intègre une brigade SOS Fantômes et on part à la chasse aux ectoplasmes de toutes sortes, dans un Manhattan hanté comme jamais. Le joueur pourra choisir entre quatre personnages, devra améliorer ses compétences et s’emploiera à nettoyer la Grosse Pomme de tous ses esprits farceurs, voire vicelards. Les adeptes les plus motivés pourront même s’offrir un pack collector, le Ghostbusters Bundle, comprenant, outre le jeu, un DLC (contenu téléchargeable) avec quatre tenues classiques, un piège en bonus et un tableau de bord spécial inspiré par le jeu. Après quelques heures d’immersion, l’impression globale reste très positive. On craignait une répétition des actions : une alerte, un fantôme à capturer, des flux qui se croisent et basta. Les créateurs ont eu la bonne idée de diversifier les missions et le fait de pouvoir partager cette aventure à plusieurs rend cette nouvelle déclinaison finalement très ludique. Et puis, de retrouver le mythique Bouffe-Tout (Slimer en version originale), le glouton vert, inspiré à l’époque par le regretté John Belushi, est une madeleine de Proust franchement appréciable. En attendant un nouvel album de Ray Parker Jr... Les allumés auront tout de même intérêt à préférer, aux fantômes yankees reboot, un titre monstrueux, vertigineux, à l’originalité incontestable : “DEUX EX : MANKIND DIVIDED”, chez Square Enix, pour PS4, XboxOne et PC. Au royaume des gamers, il y a d’un côté le divertissement pur, formidable quand il s’en donne les moyens et de l’autre, les jeux exigeants, difficiles, qui dessinent des mondes inconnus, où l’impossible ne se conjugue plus au conditionnel. Mais bel et bien au présent. 2029. L’humanité a évolué. Dévolué ? Des humains augmentés, mi-homme mi-cyborg, se voient rejetés, deviennent des parias. Ce que la bande-annonce hallucinante, digne d’un John Carpenter, à voir absolument, appelle l’Apartheid Mécanique. Adam Jensen, agent secret bien connu des gamers sérieux, est donc de retour, plus ostracisé et menacé que jamais ! Et il va devoir lutter comme un chien pour faire éclater la vérité et déjouer un complot terrifiant. Au début des années 2000, “Deus Ex” avait déjà bouleversé la donne, sorte de FPS à la fois burné et sensible, pas comme les autres, fier et droit dans ses bottes de sept lieues. Là, même chose mais avec les innovations technologiques des consoles nouvelle génération, on découvre un univers époustouflant, tangible, presque organique. C’est une course-poursuite haletante, violente, belle et impitoyable, sombre et irradiée. On ose l’écrire, on est ici en présence d’un vrai chef-d’oeuvre. “HITMAN”, toujours chez Square Enix, pour PS4, XboxOne et PC, marque également le retour d’une franchise valable. Ce jeu d’infiltration a décidé de s’offrir au public en mode feuilleton. Nouvelle façon de faire pour exciter les curiosités, cultiver le manque. Le pari était risqué mais la réussite est au rendez-vous. Avec déjà trois épisodes au compteur, Paris, Sapienza et Marrakech, et quatre autres à venir, dont la Thaïlande, les Etats-Unis et le Japon (même si les joueurs les plus impatients peuvent désormais acheter l’intégralité de cette odyssée urbaine pour la somme de 59,99 Hitman dévoile des qualités indéniables et ce retour vers le passé, vers les origines du tueur à gages rasé et tatoué, l’agent 47, devrait enthousiasmer les aficionados comme les béotiens.