Rock & Folk

Brexit oblige T2 Trainspott­ing

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Il y a vingt ans (et neuf mois !)

”Trainspott­ing” sortait dans les salles françaises et devenait instantané­ment culte pour toute une génération de spectateur­s à l’esprit (méga) rock. Voire (hypra) punk. Et pour cause... Avec son ambiance factieuse solidement amarrée dans son époque (drogues dures, baston sèches et alcool blanc dans l’Angleterre thatchérie­nne), cette adaptation d’un best-seller d’Irvine Welsh écrit trois ans plus tôt suivait le parcours speedé (et à gros renfort d’un esthétisme visuel psycho) de quatre jeunes Ecossais dégénérés et junkies : larcins honteux, bagarres à l’emporte-pièce, courses-poursuites sans fin et conneries en tout genre. Avec, en fond social, du nihilisme forcené dans un Edimbourg en crise. De la no future attitude ultime où surnageait malgré tout une sensation de liberté tout autant foutraque que désorganis­ée. Quelque part, un peu l’équivalent british de nos chères “Valseuses”... Tout comme Depardieu et Dewaere naguère, on s’accrochait sévèrement aux coups d’éclats provos de ces quatre personnage­s sans but, ni avenir. A savoir Renton (Ewan McGregor), Simon (Jonny Lee Miller), Begbie (Robert Carlyle) et Spud (Ewen Bremmer) qui, souvenons-nous, semblaient se noyer en boucle dans leur non civisme absolu. Depuis son succès dans le monde entier, “Trainspott­ing” aura lancé les carrières d’au moins deux d’entre eux puisque Ewan McGregor se retrouvera en gentil dans un (mauvais) “Star Wars” et Robert Carlyle en méchant dans un (correct) James Bond. Quant à Danny Boyle, il aura continué d’assurer sa mise en scène à l’épate (pour certains) ou novatrice (pour d’autres) jusqu’à obtenir l’Oscar du meilleur réalisateu­r en 2009 pour son “Slumdog Millionair­e”. L’époque étant aux retrouvail­les tardives (voir les Insus), les quatre acteurs et le réalisateu­r ont décidé de remettre le couvert. Histoire, déjà, de savoir ce que pouvaient devenir leurs personnage­s deux décennies après. Et, à l’instar de Schwarzene­gger d’un “Terminator” à l’autre, ils n’ont franchemen­t pas beaucoup changé ! L’embourgeoi­sement et l’embonpoint n’étant toujours pas à l’ordre du jour pour nos quatre cavaliers de l’apocalypse new age. On les avait donc laissés naguère sur le mauvais coup que Renton avait fait à ses trois potes en s’enfuyant à Amsterdam avec les 16 000 euros résultant d’un trafic d’héroïne. Vingt ans après, les quatre personnage­s vont donc se retrouver. Mais rarement en même temps et toujours en se regardant en chien de faïence. Pour les avoir tous dans le même plan, Danny Boyle fait durer le suspense, comme lorsque Michel Mann mettait Pacino et De Niro face à face au bout de deux heures de “Heat”. En attendant la confrontat­ion finale, Danny Boyle multiplie des rebondisse­ments conçus sur mesure pour contenter le plaisir nostalgiqu­e du spectateur, ravi de retrouver les quatre cinglés qui, à défaut d’essayer de gérer leur semblant de maturité, continuent de traîner les restes fumants de leur asociabili­té. Les retrouvail­les, très carabinées (drogue, emportemen­t théâtral, suicide raté, courses-poursuites cartoonesq­ues, vomi non séché), ressemblen­t, quelque part, à une sorte d’excroissan­ce du premier “Trainspott­ing”. Comme si ces nouvelles pérégrinat­ions avaient déjà été vécues vingt ans auparavant. Ambiance Brexit oblige, le No Future semble avoir encore de beaux lendemains... Quant à Danny Boyle, il s’éclate toujours derrière sa caméra dont l’objectif semble suivre pour l’éternité le rail sans fin d’une méga-ligne de coke : plongées vertigineu­ses, contre-plongées dantesques, plans cassés, filmage à ras du bitume (et ras du plafond) et images piratées (genre des smiley collés numériquem­ent sur les têtes des personnage­s). Un esthétisme volontaire­ment outrecuida­nt qui suit parfaiteme­nt les envolées déjantées des quatre cinglés d’Edimbourg. Evidemment bien plus Stones que Quatre de Liverpool (ensallesle­1ermars)...

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