Rock & Folk

Corridor

- “Supermerca­do”

MICHELRECO­RDS/REQUIEMPOU­RUNTWISTER Montréal. Un exotisme cauchemard­esque. La post-humanité américaine en plus sympathiqu­e, son anglo-saxonisme francisé, son horizon post-historique. Du Québec, des groupes nous envoient leurs messages. Hier : Godspeed You! Black Emperor, Arcade Fire, Wolf Parade. Aujourd’hui : Chocolat, Ought, puis Corridor. Comme Memphis, Liverpool, San Francisco ou Manchester en leur temps, le son de Montréal colle à l’époque. “Supermerca­do”, deuxième LP de Corridor, colle le spleen, comme l’époque. Son élégance est froide, ses lignes fines, sa production une rumeur lointaine, tout comme ses voix articulant des mots médiévaux depuis le cosmos. Un jour, quelqu’un définit le post, nous y plonge la tête : post-punk, post-rock, post-modernisme, post-humain... Corridor est un groupe post qui lutte contre lui-même, donc contre nous tous. Il lutte quand le piquant des guitares part s’harmoniser avec la rondeur distante des basses. Ils luttent alors que, tout, dans sa musique, semble si maigrelet, d’une telle fragilité, que la beauté n’a pu y naître qu’ a cc id en tellement. Où d’ autre pouvait-elle naître ? L’accident étant combattu, repoussé de nos vies, quotidienn­ement, pour que plus jamais nous ne souffrions. Donc que nous connaissio­ns le bonheur. Tout comme la mauvaise herbe fend le béton, la nature humaine s’est frayé un chemin dans Corridor. Et l’équilibre de cet album est si subtil que chacun des mots écrits ici risquerait, en tapant à côté, de faire tomber l’édifice. Taisons-nous et laissons, une dernière fois, tourner ce disque, avant que le silence ne se fasse total. ✪✪✪✪ THOMAS E. FLORIN

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