Le Fleetwood Mac du rock indé
Rééditions, nouveautés et 45 tours : le point sur les meilleures galettes microsillon du moment.
Rééditions Tages “Studio” Bear Family
C’était le groupe pop le plus doué de Suède, et cet album est son chefd’oeuvre. Inspirés par les Beatles, les cinq membres de Tages se sont isolés en studio en 1967 pour concevoir ce LP freakbeat et psychédélique qui évoque des groupes anglais tels que les Blossom Toes ou The End, mais avec des arrangements très ambitieux (cordes, guitares inversées...). On pense aux Pretty Things de “Parachute”, au versant McCartney des Beatles sur “Like A Woman” ou “What’s The Time”. Bien qu’il ne soit pas le classique absolu que le label aimerait nous vendre, ce double album contient quelques merveilles telles que “People Without Faces” ou “She Is A Man”. Cette superbe réédition contient le DVD du film promotionnel d’époque “Dalamania”, ainsi qu’un épais livret biographique.
Dr John “The Sun Moon & Herbs” Music On Vinyl
Si l’on devait choisir, dans la longue discographie de Dr John, le disque le plus représentatif du style de sa première période, “The Sun Moon & Herbs” pourrait être celui-ci. Quatrième album du NightTripper, l’album voit Dr John pousser jusqu’à la limite son style unique mêlant jazz façon New Orleans, rythmes moites et délires vaudou (“Zu Zu Manou”). La musique qu’il tire de cette concoction transcende l’essence de morceaux cajun folkloriques tels que “Black John The Conqueror” pour en faire des monstres de groove saupoudrés de magie noire.
Elliott Smith “Roman Candle”, “Elliott Smith”, “Either/ Or”, “XO”, “Figure 8”, “New Moon” Universal
On le sait, les années 90 furent une période de vaches maigres pour le vinyle, si bien que de nombreux albums ne sont pas sortis sous ce format, ou alors en tirages restreints. Ce fut le cas pour certains albums du regretté Elliott Smith, qui n’ont jamais eu la chance d’être réédités proprement sur grosse galette. Malheureusement, la campagne de ressortie orchestrée par Universal n’est pas forcément convaincante, surtout si on la compare au pressage qui vient de sortir chez Kill Rock Star aux USA pour les 20 ans d’“Either/ Or”. A titre de comparaison, le pressage américain est fait sur vinyle coloré, avec remasterisation, disque bonus, notes biographiques détaillées, quand l’édition Universal européenne se contente du minimum syndical, manifestement tirée de fichiers numériques.
Jerry Lee Lewis “Jerry Lee Lewis And His Pumping Piano” Bear Family
Dernier des survivants de l’ère Sun Records, Jerry Lee Lewis a droit à une belle réédition ce mois-ci grâce à l’excellent label allemand Bear Family. Ce qu’il y a d’intéressant avec ce disque, dont on connaît tous les morceaux par coeur car ils sont des classiques absolus (“Great Balls Of Fire”, “Whole Lotta Shakin’ Going On”, “Mean Woman Blues”...), c’est qu’il s’agit de la réédition d’un album rarissime publié en 25 cm en Afrique du Sud en 1959. D’où ce visuel d’époque qui orne cette collection de tubes joliment packagée.
Forest “The Full Circle” Music On Vinyl
Comme l’indique la pochette dessinée de “The Full Circle”, Forest était un groupe de rock progressif anglais aux forts accents folk. Publié à l’origine sur Harvest, le label dédié au rock progressif (Kevin Ayers, Pink Floyd...) chez EMI dans les années 70, le groupe faisait partie de ce mouvement de groupes intéressés par les racines de la musique britannique. D’où un aspect médiéval — marqué par une mandoline omniprésente et un chant scandé — qui fait sonner Forest comme un Fairport Convention qui jouerait sans percussions (“Gypsy Girl And Rambleaway”). A redécouvrir.
Angelo Badalamenti “Music From Twin Peaks” Warner Bros
Alors que la série de David Lynch fait actuellement un retour très remarqué, et a accueilli des musiciens de renom ( nospoiler) pour une des scènes clef de sa nouvelle saison qui arrive trente ans après la précédente, la BO mythique d’Angelo Badalamenti, avec ses synthétiseurs glaçants revient en vinyle (tout comme celle du film qui l’a suivie, “Fire Walk With Me”). On retrouve sur ce disque ces magnifiques thèmes électroniques hantés (“Laura Palmer’s Theme”), et évidemment le tube éthéré “Falling” chanté par Julee Cruise.
Little Bob And The Lollipops “Nobody But You” Mississipi
Attention on ne parle pas ici du rocker havrais Little Bob, mais de Camille Bob, chanteur R&B et soul, actif en Louisiane depuis le milieu des années 50. Paru en 1966, son premier album “Nobody But You” compile les quelques singles qu’il avait enregistrés les années précédentes, tels que “I Got Loaded”, “My Heart’s On Fire” ou “Nobody But You”. Comme toujours, c’est l’excellent label Mississipi qui exhume ce joyau de la musique noire américaine.
Nouveautés Terry “Remember Terry” Upset The Rhythm
Surnommé le Fleetwood Mac du rock indé, parce qu’il est composé de deux couples, le quatuor australien Terry sort aujourd’hui son deuxième album sur le recommandable label anglais Upset The Rhythm. Formé à partir de membres de Total Control, UV Race et Constant Mongrel, ce groupe de cow-boys des Antipodes joue une musique étrange et indéfinissable. Est-ce du post-punk ? Du glam ? Du garage ? Chaque morceau redistribue les cartes, et à chaque fois le groupe fait mouche.
Holy Gray “Batten Down The Hatches” Third Coming
Tremblez Blind Faith, Traveling Wilburys et Them Crooked Vultures, un nouveau supergroupe arrive sur la place. Assemblage de membres de Quetzal Snakes, Yussuf Jerusalem et La Secte Du Futur (trois groupes bien plus recommandables que ceux cités plus haut), Holy Gray est une formation punk à l’esthétique sombre mais aux idées lumineuses. Les guitares serpentent, un violon s’invite, le groupe maîtrise l’art de la rupture (“Lores Were Fading Away”) et séduit sur ce premier album.
45 tours Stereoscope Jerk Explosion “Indian Tonik” Bengali Corporation
Depuis plusieurs années, Stereoscope Jerk Explosion enchante les amateurs d’instrumentaux dopés à la fuzz et au Farfisa avec ses 45 tours aux pochettes chatoyantes. “Indian Tonik”, tous sitars dehors, marque le retour du groupe après un long break. Avec son vinyle rouge et ses goodies divers — dont une paire de lunettes 3D à l’ancienne qui permettent de regarder le clip du groupe — cet excellent single s’avère un objet remarquable.
Les Beberts “Les Beberts EP” Ave The Sound !
Piliers de la scène garage niçoise, les Playboys ont influencé de nombreux groupes depuis le milieu des années 80. Derniers en date, les Béberts, dont le nom rend malicieusement hommage à François Albertini, chanteur de ces glorieux anciens. Ce trio de jeunes gens sort aujourd’hui un premier EP empli de fuzz et de promesses d’un avenir radieux.
The Blind Shake “Live At Third Man” Third Man
Difficile de suivre le rythme de publication de Third Man depuis que Jack White a ouvert son usine de pressage à Detroit. Ces derniers mois, de nombreux singles tirés de concerts donnés par la crème de la scène garage américaine ont ainsi été publiés (Archie & The Bunkers, Fred & Toody, Power...). Celui consacré à Blind Shake témoigne une fois de plus du bon goût de la clique Third Man, et de la vitalité de ce groupe qui mêle habilement surf et post-punk.