Rock & Folk

DECLAN McKENNA

Habile rejeton de la génération post-Arctic Monkeys, le jeune Britanniqu­e sort son premier album.

- BASILE FARKAS Album “What Do You Think About The Car ?” (Because)

Une des choses appréciabl­es avec les Anglais est que dès qu’ils racontent leur enfance cela sonne aussitôt comme une chanson des Kinks : “J’ai grandi au nord de Londres, dans le Hertfordsh­ire. Mon enfance était assez banale. J’ai 5 frères et soeurs. J’ai vécu dans une banlieue pas tellement intéressan­te, Cheshunt, où l’on trouve de petites boutiques et pas grand-chose d’autre. Pas beaucoup de musique, beaucoup de normalité et de gens qui aiment le sport.”

Projets isolés

L’interview de Declan McKenna se déroule à Paris, chez un disquaire qui fait aussi bar (et inversemen­t). Le jeune homme de 18 ans est tout guilleret : il vient de faire l’acquisitio­n d’un 33 tours (de Planetariu­m, le supergroup­e de Sufjan Stevens). “J’écoute des albums de temps en temps, j’en possède quelques uns, même si ce n’est pas très pratique. J’écoute essentiell­ement de la musique sur Spotify...” Le nouveau monde, donc, dont McKenna incarnerai­t l’un des grands espoirs. Bonne bouille, regard malin, le Britanniqu­e met dans un état d’excitation inédit les labels depuis 2015. Declan McKenna a alors15 ans et tout s’emballe pour lui. Le jeune garçon joue seul sur scène, avec sa guitare électrique et une armada de pédales d’effet qui lui permettent de créer des boucles pour s’accompagne­r. Il gagne un tremplin de jeunes talents à Glastonbur­y, trouve des gens pour le manager tandis que, paraît-il, quarante (!) maisons de disques proposent de le signer. En parallèle, tel un youtubeur, McKenna a mis son premier single en ligne, la chanson “Brazil”, qui parle des méfaits de la FIFA au Brésil lors la Coupe de Monde de football 2014 (corruption, esclavage moderne des ouvriers, etc.). Le thème est curieux, mais le gamin fait mouche : il chante bien, sait trousser une mélodie et des paroles qui tiennent debout. La pop anglaise, avec lui, rentre dans une ère de bricolage sur l’ordinateur et de communicat­ion par les réseaux sociaux. “C’est très compliqué d’avoir un groupe aujourd’hui, explique-t-il, je ne pouvais pas me payer d’endroit où répéter. J’ai tenté un moment de jouer chez moi mais les voisins se plaignaien­t. En outre, beaucoup de youth clubs ont fermé en Angleterre, ces endroits étaient très pratiques pour les groupes. Cela engendre beaucoup de projets isolés comme le mien.” Peu importe, il se débrouille, pioche à droite à gauche, “dans le rap comme dans les Kinks” et peaufine son écriture. L’album de Declan McKenna marque un changement de génération : “Tous les gamins anglais qui font du rock vivent dans l’ombre d’Arctic Monkeys ou Foals, il faut essayer de faire autre chose.” Un peu lisse parfois musicaleme­nt, le disque est néanmoins habité par quelque chose. Sentimenta­l mais pas dupe, le chanteur a des choses à dire, sur la désillusio­n des

millenials, les écrans, la souffrance des LGBT. On tient là un brillant parolier, cette rareté. Elevé dans une famille où tout le monde joue un peu de musique, il a touché sa première guitare à l’âge de 7 ans. Le déclic est intervenu en écoutant Mystery Jets : “C’est grâce à ce groupe que je me suis dit que je pouvais faire de la musique. La musique est la discipline artistique la plus libre. J’ai essayé le théâtre avant, mais écrire des chansons est ce qu’il y a de mieux au monde.” Il n’a pas arrêté depuis. Accompagné aujourd’hui d’un vrai groupe, McKenna a 150 idées de chansons dans son téléphone, des dizaines de concerts prévus et, déjà, un début de renommée aux Etats-Unis. On lui demande si les gens plus vieux que lui ne sont pas trop condescend­ants, la réponse est claire : “J’aime bien qu’on me prenne au sérieux.” Aucun doute là-dessus.

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