Prophets Of Rage
“Prophets Of Rage”
CAROLINE/UNIVERSAL Le gazon de Clisson ne repoussera pas là où s’est tenu le show tant attendu de Prophets Of Rage en juin — même s’il ne fut à peu de choses près qu’un best-of de Rage Against The Machine pour festivaliers nostalgiques. Au-delà, il restait à apprécier la véritable valeur de cette nouvelle formation, un chapitre de plus dans la fusion hip-hop et rock, un quart de siècle après son âge d’or. En 2017 la Rage restante s’associe à deux MC, empruntés à Public Enemy et Cypress Hill, combos ô combien influents dans sa matrice. Et les comparaisons sont inévitables : là où Zach de la Rocha débitait des shrapnels cinglants à chaque syllabe, Chuck D et B-Real déballent, à deux, un flow plus placide qu’acide. Ce qui ne rend pas Prophets Of Rage moins bon : si l’intention se veut toujours vindicative dans l’espoir de révolutionner le monde (ils semblent y croire), la forme est malgré tout beaucoup plus radio friendly, et se rapproche en ça d’Audioslave, même si la rythmique, auto-recyclée, reste toujours aussi redoutable, et les licks bizarroïdes de Tom Morello si ingénieux — un terrain bien familier dès “Radical Eyes”, qui culmine sur “Strength In Numbers”. La production voluptueuse de Brendan O’Brien, associé historique, est un écrin, et si “Unfuck The World” veut soulever les masses comme un nouvel hymne générationnel, ailleurs le propos est plus apaisé : les morceaux, plus mélodiques, restent en tête (“Living On The 110” ou “Legalize Me”, entre Jimi Hendrix et Red Hot Chili Peppers typiques), alors qu’un funk implacable, inspiration Sly Stone, domine (“Take Me Higher”), avant une dernière partie d’album plus entendue.
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JEAN-CHARLES DESGROUX